…c'est encore une contre-vérité. Car votre projet de loi comporte un vice fondamental : selon ce texte, on peut produire et consommer « avec ou sans OGM », alors que le Grenelle de l'environnement avait demandé la possibilité de produire et de consommer « sans OGM ».
Vous avez beau jeu de nous dire que vous renverrez la question de savoir ce qui est sans OGM à votre Haut conseil, auquel vous avez d'ailleurs tordu le cou si l'on se reporte aux prescriptions du Grenelle de l'environnement : comme l'a souligné Yves Cochet, il s'agit en effet de séparer les scientifiques de la société civile et d'imposer une hiérarchie des normes entre les avis et les recommandations. Nous sommes donc bien loin de la transparence démocratique et de l'instance de débat que vous annonciez.
Même si quelques négationnistes soutiennent le contraire, tous les scientifiques sont d'accord pour dire qu'il n'est pas possible de faire coexister les cultures OGM et les cultures non OGM. Comment, monsieur le ministre d'État, vous-même et le Président de la République pouvez-vous, avec le Grenelle de l'environnement, inciter les cantines de nos municipalités à augmenter la part de produits « bio » dans leurs menus, et faire voter le présent texte, qui légalise la contamination ? Comment pouvez-vous, après le Grenelle, écrire la chronique de la mort annoncée de l'agriculture biologique, de l'agriculture de qualité, des AOC et des labels ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – « Démagogie ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous prétendez, avec ce projet de loi, pacifier nos campagnes, comme nous l'attendions, mais, bien au contraire, vous jouez aux apprentis sorciers et allez y remettre le feu. Ce ne sont en effet pas seulement les écologistes et les Français qui vous disent : « Nous ne voulons pas que vous transformiez nos champs en paillasses de laboratoire. » (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ce ne sont pas seulement les Français qui vous disent : « Nous ne voulons pas d'OGM dans nos assiettes. » Ce sont des agriculteurs, qui diront un jour à nos collègues : « Vous nous avez condamnés à mort car vous avez légalisé la contamination et la dissémination irréversibles. » (« Démago ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
C'est pourquoi vous prenez une responsabilité très importante. Dans cette discussion lamentable qui humilie la représentation nationale (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et donne un bien mauvais signe juste avant l'examen, dans cet hémicycle, d'un projet de réforme des institutions qui prétend renforcer les pouvoirs du Parlement, la seule satisfaction pour nous, rares écologistes qui siégeons sur ces bancs (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), est que, pour la première fois dans l'histoire de la Ve République, une question écologique a provoqué un accident politique ! (Mêmes mouvements.) Un pas décisif a ainsi été franchi : la société est entrée dans cet hémicycle et a permis à quelques-uns de nos collègues d'activer leur « clause de conscience ». J'espère qu'ils seront encore nombreux pour le faire.
Le Gouvernement prend une responsabilité très importante à l'égard des agriculteurs, de la biodiversité et de la santé de nos enfants. C'est pourquoi je vous invite tous à voter, et le plus largement possible, l'exception d'irrecevabilité présentée, au nom du principe constitutionnel de précaution, par Yves Cochet. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)