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Intervention de Antoine Herth

Réunion du 20 mai 2008 à 15h00
Organismes génétiquement modifiés — Discussion du texte de la commission mixte paritaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAntoine Herth, rapporteur de la commission mixte paritaire :

Contrairement aux craintes de l'opposition, les amendements adoptés à l'article 1er lors de l'examen du projet de loi en première lecture à l'Assemblée nationale – qu'il s'agisse de celui de notre collègue André Chassaigne ou de celui de M. François Grosdidier – n'ont pas été remis en cause par la majorité et l'adoption d'un amendement au Sénat lors de l'examen du texte en deuxième lecture ne peut être honnêtement interprétée comme un obstacle à leur mise en oeuvre.

Le débat sur le projet de loi en deuxième lecture à l'Assemblée nationale aurait d'ailleurs permis, s'il avait pu se poursuivre, d'éclaircir ce point. Au lieu de cela, le texte a été rejeté et le débat s'est arrêté. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Je regrette qu'en dépit de la qualité de nos travaux en première lecture et des améliorations notables apportées au texte tant par la majorité que par l'opposition, la procédure l'ait emporté sur le fond. J'estime néanmoins que toutes les explications nécessaires ont pu être apportées lors de la réunion de la commission mixte paritaire, y compris par l'auteur de l'amendement en question, le rapporteur Jean Bizet.

Je tiens néanmoins à rappeler à cette tribune, que cet amendement est un amendement de précision qui n'amoindrit nullement la portée des dispositions introduites par les deux amendements précités. L'amendement de M. Chassaigne fait en effet référence aux « filières de production et commerciales qualifiées “sans organismes génétiquement modifiés” » ; or, sans renvoi à une définition précise ni au décret, qui définira ce que sont ces filières et ce que signifie : « sans OGM » ?

Je sais que l'opposition se contenterait volontiers de la définition utilisée aujourd'hui par la DGCCRF, mais l'administration a justement forgé cette définition en raison d'un vide juridique. La majorité considère donc que l'on ne peut se contenter du statu quo actuel.

D'une part, il convient de porter le débat au niveau communautaire, car c'est là un sujet sur lequel l'Union européenne est fondée à intervenir de manière à ne pas laisser subsister de définitions contradictoires des termes « sans OGM ». D'autre part, et dans l'attente d'une définition harmonisée, il appartient au pouvoir réglementaire de trancher cette question en bénéficiant de l'expertise du Haut conseil des biotechnologies et après avoir recueilli l'avis des consommateurs. Il s'agit à mes yeux d'une démarche de bon sens, qui donne le temps de la réflexion et de la concertation.

À de nombreuses reprises en effet, le cas de l'Allemagne nous a été cité en exemple. Or, chers collègues, la loi allemande qui vient d'être adoptée et qui réglemente notamment l'étiquetage des produits d'origine animale est la quatrième loi que ce pays examine ! Ce qu'il faut retenir de l'exemple allemand, c'est sa méthode : procéder par étapes, prendre le temps de l'écoute et dépassionner le débat.

Pour l'heure, je me félicite du résultat auquel nous sommes parvenus aujourd'hui avec ce texte qui, en dépit de circonstances parfois difficiles, a su se maintenir dans un équilibre respectueux des convictions des uns et des autres et rester fidèle, même si beaucoup ne sont pas prêts à l'admettre, aux conclusions du Grenelle de l'environnement telles qu'énoncées par le Président de la République, qui, dans son discours du 25 octobre dernier, a souhaité que nous garantissions la liberté de consommer ou de produire avec ou sans OGM – phrase centrale, au coeur de notre démarche législative. L'opposition nous a fait un procès sur l'expression : « avec ou sans », mais le mot le plus important de la phrase du Président de la République est celui de « liberté ». Nous souhaitons garantir la liberté, et non pas instituer par la loi une sorte de pensée unique sur les organismes génétiquement modifiés.

L'examen du projet de loi sur les OGM par le Parlement constitue en lui-même une étape importante dans l'élaboration d'une approche rationnelle et constructive de ce sujet en France, alors que le débat s'était jusqu'alors limité à l'opposition frontale entre ceux qui se déclaraient « pour » et « contre » les OGM. Quelque majeur que soit l'apport du Grenelle de l'environnement sur la question des OGM, quelque révélateurs que soient les résultats des sondages d'opinion sur les craintes des Français, il ne s'agit pas pour la représentation nationale de trancher la question : « pour ou contre les OGM ? », mais de proposer un cadre juridique sûr, permettant une évaluation au cas par cas des organismes génétiquement modifiés par une instance d'évaluation indépendante, évaluation qui rendra notamment possible leur utilisation à des fins de recherche. Les parlementaires que nous sommes doivent aujourd'hui assumer la responsabilité qui leur a été confiée de se prononcer sur cette question complexe et adopter définitivement ce projet de loi qui permet à la France de respecter ses engagements communautaires et internationaux, de garantir à nos concitoyens la liberté et la sécurité, la transparence et le respect du droit, d'assurer aux agriculteurs le respect de leurs modes de production et la pérennité de leur activité et d'assurer à nos chercheurs la sécurité dans leur travail.

La mise en oeuvre de ce texte sera à cet égard un enjeu crucial pour les mois et années à venir. Aussi, monsieur le ministre, serez-vous encore en première ligne, avec quelques-uns de vos collègues du Gouvernement, à l'issue du vote et de la promulgation de la loi, pour veiller à sa bonne application. L'Assemblée nationale, en vertu notamment de l'article 86, alinéa 8, de son règlement, sera elle aussi très vigilante sur la mise en oeuvre de ses dispositions, qu'il s'agisse de l'installation du Haut conseil des biotechnologies, de la traduction concrète des conditions techniques de coexistence ou des engagements pris en faveur de la recherche.

Mesdames et messieurs, mes chers collègues, cette liberté de choix que nous souhaitons garantir à nos concitoyens ne peut exister sans courage. Je vous invite donc à adopter le texte qui a été retenu par la commission mixte paritaire afin que la France puisse enfin être dotée d'un dispositif législatif complet et opérationnel en matière d'organismes génétiquement modifiés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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