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Intervention de Martine Billard

Réunion du 16 novembre 2007 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2008 — Politique des territoires

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Billard :

La mission « Politique des territoires » est inquiétante à plusieurs titres.

Tout d'abord, son périmètre a été très réduit et son contenu allégé, notamment par le rattachement des programmes « Aménagement, urbanisme et ingénierie publique » et « Information géographique et cartographique » à la mission « Écologie, développement et aménagement durables » ; le programme « Tourisme » a quant à lui été rattaché en tant que simple action à la mission « Développement et régulation économique ». De ses six programmes initiaux, la mission « Politique des territoires » n'en conserve que deux.

Or on constate un déséquilibre flagrant entre ceux-ci : d'un côté, 377,5 millions d'euros pour le programme 112, « Aménagement du territoire », sorte de fourre-tout bénéficiant de la majorité écrasante des crédits ; de l'autre, 42,9 millions pour le programme 162, « Interventions de l'État », réduit à quelques opérations phares. Si l'on excepte ces projets régionaux à caractère grandiose, de nombreux territoires sont laissés de côté. Comme l'a dit M. Duron lors de la commission élargie, c'est bien le signe de la remise en cause de la notion de péréquation, au profit de celle de compétitivité.

D'un point de vue financier, cette mission est l'une des plus petites du projet de loi de finances, puisqu'elle ne représente que 0,1 % des autorisations d'engagement et 0,3 % des crédits de paiement. Or la crise des territoires se manifeste à plusieurs niveaux : au niveau géographique, avec la désertification des zones rurales ; au niveau économique, avec une spécialisation des activités au détriment de la diversité, la faillite des commerces de proximité et la fuite des services publics ; au niveau social, avec la crise urbaine et le morcellement social ; au niveau du développement durable, avec la dégradation de l'environnement et les empiétements urbains sur les espaces ruraux, qui transforment les campagnes en des zones hybrides « rurbanisées » ; au niveau culturel enfin, avec la fracture, non seulement entre les ruraux et les citadins, mais aussi entre les Parisiens et les autres. Cette crise mériterait considération et moyens ; et pourtant, le programme « Aménagement du territoire » voit ses dotations diminuer, passant de 400,4 millions d'euros en 2007 à 377, 5 millions en 2008.

Les dotations du deuxième programme de la mission, « Interventions territoriales de l'État », elles, augmentent. Pourtant, les grands projets régionaux qui le constituent, comme le plan « Eau et agriculture » en Bretagne ou le plan « Filière bois » en Auvergne-Limousin, seront soumis à une évaluation en 2008 afin de juger de leur pertinence et se prononcer sur leur éventuelle reconduite : l'avenir de ce programme est donc d'ores et déjà incertain. En réalité, ce qui occasionne la hausse des crédits, c'est surtout la mise en place du plan d'urgence pour le traitement des eaux en Bretagne, ainsi que l'augmentation des sommes dévolues au plan exceptionnel d'investissement pour la Corse. Proportionnellement, le soutien financier aux autres projets de relance est anecdotique – et ne parlons pas des régions qui ne bénéficient d'aucun d'entre eux.

Au-delà du détail chiffré de cette mission, nous devons examiner la logique sous-jacente à la politique territoriale mise en oeuvre. Qu'est-ce qui rend un territoire attractif ? Il existe deux visions antagonistes de la politique territoriale. Celle du Gouvernement est un assujettissement aux dogmes libéraux : la politique des territoires répond à une logique de rentabilité et d'efficacité, sans chercher à préserver la spécificité des régions et la diversité des activités. Quant à nous, nous privilégions le maintien d'un cadre de vie équilibré, où seraient garantis l'accès aux services, à la formation et à la recherche, des infrastructures ouvertes sur le quotidien, ainsi que la protection de l'environnement et une plus grande autonomie des « pays ». À cet égard, l'opposition de la majorité UMP au schéma directeur d'Ile-de-France est significative : elle prouve la volonté de soustraire la maîtrise de l'aménagement de son territoire à la région.

Pour conclure, le rapport de la commission des finances décrit cette mission comme une « politique offensive illustrée par les pôles de compétitivité ». Ce vocabulaire exprime bien l'écart existant entre l'ambition gouvernementale et une politique des territoires respectueuse de la diversité des paysages, des activités et de l'identité de chaque région : car mettre les espaces en compétition les uns par rapport aux autres, ce n'est pas les encourager à créer du lien social et environnemental ! Ce budget n'a pas pour objectif le rééquilibrage, la solidarité et le respect de l'environnement. C'est pourquoi les députés Verts, communistes et républicains et des DOM-TOM du groupe de la Gauche démocrate et républicaine voteront contre lui. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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