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Intervention de Jean-Christophe Lagarde

Réunion du 8 juillet 2008 à 15h00
Modernisation des institutions de la ve république — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Christophe Lagarde :

De même, la possibilité pour le Parlement d'être assisté par le Conseil d'État ou la Cour des comptes donnera plus de force aux propositions parlementaires, évitant ainsi qu'il nous soit régulièrement répondu par le Gouvernement que ce que nous avons fait est mal fait, mal écrit, mal compris, voire mal pensé. Nous apprécions par ailleurs que notre constitution s'apprête enfin à reconnaître le rôle et l'importance des langues régionales dans notre pays.

Le Nouveau Centre souhaitait que notre loi fondamentale oblige à la responsabilité en matière budgétaire car, depuis au moins trois décennies, les gouvernements qui se succèdent dépensent en laissant la facture aux suivants. Le résultat est que nous avons alourdi à hauteur de près de 1 300 milliards d'euros, rien que pour le budget de l'État, les charges qui pèseront pendant des décennies sur la tête de nos enfants. C'est chose faite, puisque, pour la première fois dans la Constitution, il est affirmé la nécessité de concilier les deux exigences de la pluriannualité budgétaire et de l'objectif d'équilibre des comptes publics. C'est plus qu'un progrès : si, nous, parlementaires, savons nous en saisir, ce sera une vraie révolution dans les politiques budgétaires de la France.

Ainsi, la réforme proposée nous paraît, madame la garde des sceaux, monsieur le secrétaire d'État, aller dans le bon sens. Toutefois, pour qu'elle puisse emporter notre adhésion, nous souhaitons l'améliorer encore.

Alors qu'un rééquilibrage est nécessaire pour que le Parlement maîtrise mieux son ordre du jour et retrouve ses droits, nous ne comprenons pas le choix du Sénat de revenir en arrière et de refuser un partage équitable de l'ordre du jour avec le Gouvernement. Nous souhaitons sur ce point que notre Assemblée rétablisse ce qu'elle avait voté en première lecture. Le rôle du Parlement ne saurait être renforcé si celui-ci ne peut décider de l'organisation de son travail. Il ne s'agit pas d'empêcher le Gouvernent d'agir, bien au contraire, puisque celui-ci gardera la primauté pour les textes majeurs, mais de sortir le Parlement de l'infantilisation dans laquelle il est placé.

Cela vaut également dans le domaine des affaires européennes, qui dictent aujourd'hui l'essentiel de notre législation, ainsi que dans le domaine des interventions militaires et des affaires étrangères. Il faut, comme le font du reste la plupart des parlements européens, que notre parlement puisse suggérer des orientations au Gouvernement et non pas seulement répondre aux décisions de celui-ci.

Nous voulons évidemment depuis longtemps que nos institutions, à commencer par le Parlement, respectent le pluralisme, qu'il s'agisse de son mode d'élection, qui n'est pas d'ordre constitutionnel, ou du droit des groupes qui le composent. Nous nous réjouissons que les nominations du Président de la République et des présidents des assemblées soient enfin soumises à l'avis du Parlement qui pourra s'y opposer. Nous nous réjouissons également de l'introduction de certains droits pour les groupes parlementaires qui composent nos assemblées et font vivre le pluralisme dans le débat démocratique.

Nous voulions que notre constitution reconnaisse le pluralisme et la diversité des courants d'opinion comme ferments de notre démocratie : c'est en passe d'être réalisé.

Nous nous sommes battus, au Nouveau Centre, contre l'instauration d'un bipartisme réducteur, éloigné de la conception française du débat et de la démocratie, et pour que les groupes aient des droits qui leur soient reconnus au Parlement : nous nous réjouissons des avancées en la matière, notamment de l'engagement du président Bernard Accoyer relatif aux commissions d'enquête. Nous regrettons toutefois l'obstination de la commission des lois de l'Assemblée nationale à refuser aux groupes parlementaires la possibilité de saisir le Conseil constitutionnel, disposition sagement introduite par nos collègues sénateurs. Cela demeure pour nous un point de blocage puissant à l'adhésion unanime de notre groupe au texte qui nous est soumis.

L'élargissement de la saisine du Conseil, qui, je l'espère, deviendra Cour constitutionnelle, va dans le sens d'une plus grande transparence de nos institutions et d'un plus grand respect de la hiérarchie des normes par le contrôle démocratique, parlementaire et citoyen, avec l'introduction de l'exception d'inconstitutionnalité. Allons dès lors jusqu'au bout de la logique : si les citoyens peuvent demain se protéger contre l'inconstitutionnalité d'une loi, au nom de quoi voudrait-on empêcher un groupe parlementaire de le faire en amont ?

Nous souhaitons également que le Parlement dispose d'un plus grand nombre de commissions. Un des instruments dont le législateur constitutionnel de 1958 s'est servi pour le corseter était en effet de limiter à l'excès le nombre de celles-ci, de façon à leur interdire de travailler dans le détail. D'autres parlements, ceux d'Allemagne, de Grande-Bretagne ou d'Espagne, notamment, ont deux à trois fois plus de commissions que le nôtre et ils travaillent mieux. Si le projet de loi propose d'augmenter leur nombre, nous souhaitons, comme le montrent nos amendements, aller un peu plus loin que lui dans ce domaine.

Vous l'avez compris, madame la garde des sceaux, fidèle aux idées institutionnelles que l'UDF a toujours défendues, le Nouveau Centre est prêt à soutenir ce projet de loi s'il conserve ses avancées en matière d'impartialité de l'État et de pluralisme politique, notamment en ce qui concerne les droits de l'opposition et des groupes, qui sont des droits nouveaux et significatifs donnés aux parlementaires. Nous veillerons à la cohérence de nos débats et au respect des engagements du Gouvernement en deuxième lecture.

Nous avons oeuvré ensemble pour moderniser nos institutions et les rendre plus démocratiques. Il est de notre responsabilité d'aller jusqu'au bout de cette démarche pour que cette réforme soit une réforme utile, qui sortira la démocratie française de sa léthargie, redonnera des pouvoirs et des droits aux citoyens, imposera la responsabilité budgétaire aux gouvernants et permettra le partage des décisions afin de les légitimer aux yeux de nos concitoyens.

Si le Gouvernement respecte ses engagements et si une majorité des trois cinquièmes est réunie à Versailles, nous aurons, mes chers collègues, plus de responsabilités et plus de pouvoirs. Nous donnerons surtout la possibilité à notre démocratie d'être un peu moins virtuelle et d'entrer réellement dans le monde de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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