Je m'exprimerai pour l'amendement, monsieur le président. Vous souhaitiez peut-être que je me prononce contre ?
Cet amendement a été effectivement adopté à l'unanimité de la commission mais je ne souhaitais pas que l'article 12 qui traite du « must carry » soit ainsi escamoté dans le débat parlementaire. N'ayant pu m'exprimer dans la discussion sur l'article, je répondrai à notre excellent rapporteur.
Comme il l'a indiqué d'ailleurs, le « must carry », tout le monde le sait, est une obligation de reprise des chaînes publiques, et je cite le rapport de Christian Kert, « sauf si les éditeurs de ces services estiment que l'offre de services du distributeur est manifestement incompatible avec le respect de leurs missions de service public. »
C'est un élément essentiel. Si nous avons voté cet amendement en commission, c'est tout simplement parce qu'il nous est effectivement apparu tout à fait logique que la reprise du contenu des chaînes publiques ainsi validée par l'article 12, qui se fait en simple définition, puisse également se faire en haute définition. Cependant, si cette loi funeste est votée, qu'aura-t-on à reprendre dans un, deux ou trois ans, des chaînes publiques, compte tenu du manque de financement criant qui sera le leur pour éditer, produire, programmer et financer des programmes ?
C'est en cela que cet article 12 n'est une déclaration de principe, certes honorable, et nécessaire, mais comment la reprise des contenus des chaînes publiques sera-t-elle possible avec un financement aussi aléatoire que celui que vous avez prévu ? Compte tenu de l'engagement pris par Mme la ministre, nous y reviendrons à propos de l'article 18 et du contrat d'objectifs et de moyens mais permettez-moi de souligner déjà que, dès 2009, le compte n'y sera pas car, pour compenser la suppression de la publicité après vingt heures, ce sont 450 millions d'euros qu'il faudra trouver. La taxation des chaînes privées et du chiffre d'affaires des fournisseurs d'accès à Internet et des opérateurs télécoms sera insuffisante. De plus, pour rester au même niveau de ressources, en prenant comme année de référence 2007, France Télévisions devra récolter en journée 350 millions de ressources publicitaires. Or nous savons très bien que les chaînes privées ont une démarche commerciale extrêmement agressive, visant à casser les tarifs en journée compte tenu du bonus que leur assurera ce projet de loi, s'il est voté : seconde coupure, passage de l'heure d'horloge à l'heure glissante et passage de six à neuf minutes.
Les 350 millions de ressources publicitaires en journée ne sont donc en rien garantis au moment où nous parlons et l'opinion publique s'inquiète de la façon dont l'audiovisuel public sera financé dans les prochaines années. Le compte n'y est pas, nous l'avons démontré à plusieurs reprises, et nous insistons sur ce point. Le dernier coup d'ailleurs fut donné par cet amendement funeste du Gouvernement visant à ce qu'il n'y ait même plus de publicité sur RFO – nous sommes ici, en effet, devant un texte de loi mouvant, amendé et sous-amendé, quand ce n'est pas par le Gouvernement lui-même, par des députés apprentis sorciers de l'UMP, qui ne sont d'ailleurs pas présents en séance, et je pense au député suppléant d'Issy-les-Moulineaux.
Le compte n'y sera pas en 2009, mais encore moins en 2010 et en 2011. Nous l'avons vu pour l'audiovisuel extérieur de la France en particulier – c'est même un sénateur de la majorité, M. Kergueris, qui a mis le doigt là où ça fait mal – et ce cas préfigure ce qui va arriver à France Télévisions dans les prochaines années.
On se fait donc plaisir avec cet article 12. Certes, l'amendement de notre rapporteur se justifie par lui-même mais la question fondamentale que l'on peut se poser et qui inquiète tant l'opinion publique, c'est de savoir s'il y aura encore un contenu à reprendre des chaînes publiques quand il n'y aura plus d'audiovisuel public dans notre pays.
(L'amendement n° 75 est adopté.)
(L'article 12, amendé, est adopté.)