Monsieur le ministre, permettez-moi d'insister sur l'une des grandes oubliées de votre budget : l'école maternelle.
S'agirait-il déjà de prendre acte de la déscolarisation des enfants de deux ans ? La Cour des comptes ne s'y trompe pas, qui cite, dans son rapport, la Seine-Saint-Denis, où le taux de scolarisation à deux ans est passé de 22 % en 1998 à 8 % en 2006. De nombreux enfants de plus de trois ans doivent également rester en crèche faute de place à l'école maternelle.
L'école maternelle mérite pourtant, selon les termes de Philippe Meirieu, « un statut d'école fondatrice de la scolarité », qui ambitionne une scolarité réussie pour l'enfant en qui l'on doit voir un être enraciné et émancipé, afin de construire une société démocratique plus juste et plus solidaire.
On est très loin de l'espace fantasmé par le ministre, qui désire imposer l'idée que cette école prolongerait simplement l'action de la famille et resterait dominée par la gestion des affects et cantonnée au pré-apprentissage, au pré-scolaire ou au pré-social.
Pour notre part, nous revendiquons la construction d'une école de la République qui incarne le projet d'une éducation dialectique, articulant continuité et rupture. L'enjeu est considérable. Cessez de vous attaquer à l'école maternelle en l'obligeant à se replier sur des apprentissages mécaniques et à promouvoir des savoir-faire standardisés, et en lui imposant l'évaluation quantitative en guise d'unique outil de pilotage universel. Le Gouvernement devrait au contraire porter les ambitions éducatives de l'école maternelle, en misant sur une éducation globale, et en cherchant à lutter au plus tôt contre les inégalités sociales grâce à un projet national.
C'est à mes yeux le Gouvernement qui commet un « crime contre l'intelligence » – pour reprendre vos termes, monsieur le ministre – en refusant d'écouter les enseignants, les parents et les élus locaux.
Ma question est simple : quand le Gouvernement cessera-t-il de faire des économies en prenant acte de la non-scolarisation des enfants de deux ans et en remettant en cause celle des enfants de trois ans, au risque de nier les besoins futurs et le droit à l'éducation pour tous ?