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Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 17 novembre 2008 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2009 — Articles non rattachés

Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi :

…mais on peut se flatter qu'il soit positif alors que l'Allemagne, l'Italie, la Grande-Bretagne enregistrent, pour la même période, une baisse de 0,5 % du PIB et la zone euro une baisse de 0,2 %, comme l'Espagne. La performance française est donc plutôt meilleure et, comme l'Allemagne et l'Italie ont le même taux d'intérêt et le même taux de change, la différence s'explique probablement par la politique structurelle économique que nous menons depuis dix-huit mois.

Je voudrais maintenant vous donner quelques éléments du contexte général dans lequel s'inscrira l'action des agents économiques français. Aux États-Unis, la croissance est devenue négative au troisième trimestre 2008 et la situation économique devrait rester problématique pour les prochains trimestres. Les effets favorables du stimulus fiscal lancé en mai 2008 semblent s'être dissipés, probablement en raison d'un sursaut d'épargne inhabituel de la part des consommateurs américains. Lorsque la première puissance économique anticipe de mauvais résultats, tout le commerce international en subit les conséquences.

Mais il y a également quelques éléments favorables qui nous conduisent à réviser certaines des hypothèses sur lesquelles repose notre prévision macroéconomique. D'abord, le prix du baril de brent, qui était monté à 148 dollars en juillet, est passé sous les 60 dollars depuis le début de novembre. Pour la construction du projet de loi de finances, nous avions retenu l'hypothèse d'un baril à 100 dollars. C'était clairement excessif. Nous avons donc ramené cette prévision à 72 dollars, soit le cours moyen observé en octobre – ce cours moyen étant la base statistique la plus sûre à laquelle se référer lorsque les évolutions des facteurs de production sont très incertaines, notamment dans le domaine énergétique.

Ensuite, nous avons révisé l'hypothèse d'inflation de 2 % à 1,5 % en 2009 en raison de cette évolution du cours du pétrole et de ceux de l'ensemble des matières premières, notamment agricoles. La fin de la parenthèse pénible en matière d'inflation est aussi liée, je le crois, aux premiers effets de la loi sur la consommation du 4 janvier 2008 ainsi que de certaines mesures appliquées par anticipation de la loi de modernisation de l'économie d'août 2008.

Par ailleurs, l'euro, après un pic à 1,60 dollar en juillet, est passé au-dessous de 1,30 dollar ces derniers jours. De ce fait, nous avons ramené notre hypothèse de change, toujours en nous référant à la moyenne mensuelle du mois d'octobre, de 1,45 dollar à 1,33 dollar. Cette évolution contribuera à soutenir les exportations, donc ce troisième moteur de la croissance qui bien souvent nous fait défaut. Un autre facteur favorable est lié aux récentes diminutions des taux directeurs de la Banque centrale européenne qui sont passés progressivement de 4,25 % à 3,25 %, l'ensemble des opérateurs attendant d'ailleurs une nouvelle baisse avant la fin de l'année.

Si l'on met en parallèle, d'une part, les effets défavorables de la crise, en particulier les effets de la crise financière sur l'économie réelle et la diminution de croissance dans certains pays, notamment les États-Unis, et, d'autre part, les facteurs positifs que sont la baisse de l'inflation, celle du coût de l'énergie, des taux d'intérêt et de l'euro par rapport au dollar, ces derniers permettront un certain rééquilibrage, mais sans annuler les dommages subis par la croissance. C'est pourquoi nous avons révisé notre prévision de croissance de 1 %, qui était déjà très conservatrice, pour la fixer dans une fourchette entre 0,2 % et 0,5 % du PIB en 2009.

Cette révision nous amène à revoir notre prévision de croissance pour l'année 2010 : initialement fixée à 2,5 %, nous la ramenons à 2 %, car, après 2008 et 2009, la perspective d'un redémarrage demeure et correspond, logiquement, à un rebond assez classique.

En 2009, la baisse de l'inflation soutiendra les gains de pouvoir d'achat dans un contexte de créations d'emplois certainement atone. Au total, le pouvoir d'achat progresserait de 1,5 % en 2009, après une augmentation de 1 % en 2008. Les chiffres dont nous disposons actuellement sur la hausse moyenne des salaires et sur la hausse des prix, dont je vous rappelle qu'elle est aujourd'hui en décélération, nous amènent effectivement à penser que le pouvoir d'achat sera bien en hausse de 1 % cette année.

Dans la situation actuelle, les anticipations des agents économiques s'ajoutent aux difficultés des agents purement financiers, et les uns et les autres ont un effet sur la croissance. Le Gouvernement se gardera donc de suivre le mouvement de certaines prévisions sans cesse modifiées. Je pense à celles du Fonds monétaire international, à celles d'économistes parfois réputés et même au consensus de place qui a eu tendance à considérablement varier au cours des derniers mois.

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