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Intervention de Jérôme Bignon

Réunion du 22 novembre 2007 à 21h30
Stabilité des institutions et transparence de la vie politique en polynésie française — Article 6 bis

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérôme Bignon, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

La commission n'est pas favorable à ces amendements.

J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les explications de nos collègues. Il est vrai qu'avec cet article, l'article 166 de la loi de 2004 est complété de façon consistante.

Mon sentiment profond est que l'article 6 bis représente une contrepartie à l'autonomie donnée à la Polynésie, puis renforcée au fil des années. Il faut relire, dans de la loi de 2004, le texte de l'article 1er du titre Ier – appelé précisément « De l'autonomie » – pour bien le comprendre : « La Polynésie française constitue une collectivité d'outre-mer dont l'autonomie est régie par l'article 74 de la Constitution. » – une garantie très forte. « La Polynésie française se gouverne librement et démocratiquement, par ses représentants élus.

« La République garantit l'autonomie de la Polynésie française. Elle favorise l'évolution de cette autonomie de manière à conduire durablement la Polynésie française au développement économique, social et culturel, dans le respect de ses intérêts propres, de ses spécificités géographiques et de l'identité de sa population. »

Quand on lit cet article, on n'a pas le sentiment que l'État n'a rien confié à la Polynésie. Il lui a reconnu un statut, lequel lui donne une autonomie qui n'est pas de façade, mais qui a un contenu réel. En 2004, peu de collectivités sur le territoire de la République française bénéficiaient d'une telle autonomie. L'autonomie ne signifie pas que rien n'est fait et que la République se désintéresse de la gestion du territoire à qui elle a conféré cette autonomie. Un père de famille qui donne une liberté à ses enfants devenus adolescents ne s'en désintéresse pas pour autant, mais reste en relations avec eux. Il existe une contrepartie à l'appartenance à la République : celle-ci doit intervenir, quand cette autonomie n'est plus exercée, mal exercée ou exercée contrairement aux intérêts des citoyens qui vivent sur le territoire autonome. Dans des cas exceptionnels – carence, mise en demeure non suivie d'effets dans des domaines extrêmement spécifiques qui touchent au fonctionnement normal des institutions, des services publics, à la sécurité des populations, à la sauvegarde des intérêts nationaux et au respect des engagements internationaux de la France –, le haut-commissaire peut se substituer aux autorités polynésiennes. Il ne s'agit donc pas d'interférer dans cette autonomie au quotidien, mais dans ce qu'elle représente de plus fondamental dans sa relation avec la mère patrie. Je m'exprime peut-être dans des termes maladroits, mais je le ressens ainsi.

Je n'avais absolument pas l'impression, en lisant le texte – et plus j'y réfléchis, moins j'en ai le sentiment –, que l'on empiète sur les pouvoirs de la Polynésie. Il s'agit, au contraire, de lui dire qu'elle a la chance d'avoir une autonomie extrêmement forte et qu'elle doit l'utiliser pour se développer, mais que, si, toutefois elle se trouve dans un état de carence avancé, l'État se garde la possibilité – ce qui était déjà prévu par l'article 166 de la loi organique du 27 février 2004, conforté par la loi de 2007 –, après carences répétées et mise en demeure, d'intervenir pour défendre les intérêts de la République au sens large et de la population qui vit sur ces territoires.

C'est ainsi que je l'ai ressenti et c'est pourquoi je défends cet article. Je conçois qu'une première lecture puisse laisser accroire que cette disposition est attentatoire à ce que vous avez de plus cher : la défense de cette autonomie conquise de haute lutte, année après année et statut après statut. Mais je pense que cette garantie forte vous contraindra davantage à considérer que l'autonomie est une opportunité extraordinaire, qu'il faut défendre et faire vivre pour éviter précisément l'intervention du haut- commissaire.

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