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Intervention de Jean-Jacques Candelier

Réunion du 29 janvier 2008 à 15h00
Renforcement de la coopération transfrontalière — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Candelier :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte qui nous est proposé a pour objet de rénover en profondeur les instruments de la coopération transfrontalière et territoriale en Europe, dont l'importance n'échappera pas aux élus du Nord, majoritaires aujourd'hui dans cet hémicycle. Les modifications de notre législation découlent des différents textes qui engagent la France au niveau européen. Il s'agit aujourd'hui de mettre notre cadre juridique en conformité avec le règlement relatif au groupement européen de coopération territoriale. Avec son adoption en juillet 2006, une étape décisive a été franchie. Il constitue en effet un bouleversement majeur des structures de la coopération territoriale, dont nous n'avons pas fini de ressentir les effets.

De quoi s'agit-il exactement ? Le GECT est un nouvel instrument juridique européen qui permet aux autorités territoriales de différents États de mettre en place des groupes de coopération. Jusque-là, rien de bien neuf, me direz-vous. La révolution en la matière est pourtant de taille. Elle réside dans le fait que, contrairement aux structures qui encadraient ce type de coopération auparavant, le GECT dispose désormais de la personnalité et de la capacité juridiques. Ainsi, pour mener à bien ses missions de coopération transfrontalière, transnationale etou interrégionale, un tel groupement peut se doter d'une organisation, disposer d'un budget, abondé ou non par l'Union européenne, acheter et vendre des biens et services, mais aussi employer du personnel.

La convention de constitution d'un GECT, autorisée par arrêté du représentant de l'État, précise le nom de la structure, son siège, la liste de ses membres, l'étendue du territoire qu'il couvre, sa mission, ses objectifs, ainsi que sa durée. Des actions de coopération inédites pourront être mises en oeuvre dans des domaines tels que les transports, la santé, l'urbanisme, l'éducation, ou encore la gestion des espaces naturels protégés. Les changements sont radicaux : l'organisation d'un service sanitaire ou de transport transfrontalier, la gestion d'un projet ou d'un programme communautaire cofinancé par le FEDER au titre de l'objectif 3 « Coopération territoriale », ex-Interreg, la gestion d'un projet au titre du programme-cadre pour la recherche et le développement technologique font désormais partie des champs de compétence couverts par cette nouvelle forme d'association.

Cet outil juridique innovant mis à disposition des collectivités, des autorités nationales, des organismes de droit public ainsi que des associations rendra plus efficace la coopération territoriale européenne, qui figure parmi les trois objectifs principaux de la politique européenne de cohésion pour la période 2007-2013.

L'Europe ne nous avait pourtant pas habitués à encourager les coopérations entre territoires. En effet, je ne compte plus les innombrables directives qui dérégulent les services publics et qui mettent en concurrence les travailleurs des différents États membres au nom du respect absolu des lois de la marchandisation. Voilà pourquoi les politiques libérales prônées au niveau européen et les textes qui en découlent suscitent chez moi la plus grande prudence.

Chers collègues, comme vous le savez, la coopération des collectivités territoriales ou de leurs groupements avec ceux de pays étrangers ne date pas d'hier. Le chemin de la coopération transfrontalière a été long et celui de la coopération territoriale plus long encore. Pendant trop longtemps, des difficultés ont empêché les collectivités territoriales de s'associer dans de nombreux domaines. Réaliser et gérer des actions de coopération dans le cadre de législations et de procédures nationales différentes n'a rien de simple alors qu'il est pourtant clair que les enjeux liés à telles opérations sortent très souvent du cadre strict des frontières nationales.

Pour réaliser l'objectif de cohésion économique, sociale et territoriale indispensable au développement harmonieux de l'ensemble de la Communauté, des actions spécifiques ont été mises en oeuvre. Mais renforcer pleinement cette cohésion implique obligatoirement l'établissement de coopérations. Cela est d'autant plus vrai qu'il existe une réelle conurbation, de nombreuses zones de continuité urbaine en Europe, d'un pays à l'autre. Les bassins de vie, de populations et d'activités ne sont plus séparés par les frontières nationales, devenues depuis longtemps symboliques. Voilà qui donne toute sa dimension et tout son sens à la coopération car l'une de ses raisons d'être est de veiller à la cohérence des politiques urbaines menées par-delà les frontières.

Élu du Nord, je pense naturellement aux partenariats engagés autour de la conurbation lilloise. Le 2 mai 2005, vingt-trois structures publiques françaises et belges ont signé une déclaration d'intention afin de créer l'Aire métropolitaine de Lille. Ce nouveau territoire, idéalement situé au coeur du triangle Paris-Londres-Bruxelles, constitue l'une des vingt plus grandes agglomérations européennes. M. le rapporteur nous en dira certainement plus mais, en tant que président du Coeur d'Ostrevent, communauté de communes de près de 75 000 habitants, j'ai déjà eu l'occasion d'approcher ces questions de coopération transfrontalière et je pressens que le nouvel outil qu'est le GECT nous permettra d'aller encore plus loin.

Certains peuvent y voir une usine à gaz. Nous devrons nous montrer vigilants pour poser les jalons d'une structure souple et réactive aux enjeux et projets d'une grande métropole, ayant pour ambition de créer une culture commune. Toutefois, je me garderai d'évoquer ici l'ensemble des différentes réformes et étapes de la coopération, car, vous le savez, elles sont nombreuses, et celle-ci est toujours en devenir.

La réussite de la coopération dépendra beaucoup des positions de nos partenaires européens sur le sujet ainsi que de l'utilisation qui sera faite des GECT. En accordant des moyens juridiques supplémentaires et innovants aux acteurs concernés – qui, je n'en doute pas, les utiliseront –, ces groupements seront de nature à consolider la dimension territoriale du processus d'intégration.

Je voudrais ici affirmer ma certitude que c'est par des réalisations concrètes au service de nos concitoyens que l'Europe pourra être utile en favorisant la compétitivité de nos territoires et en assurant la nécessaire solidarité entre pays. Une politique différente doit voir le jour, une politique qui place l'homme et son développement au coeur de son programme, une politique qui attaque de front la libéralisation des mouvements de capitaux, facteur de ravages considérables dans l'emploi, de délocalisations et de casse de l'industrie française.

Comme nous le voyons avec la crise financière actuelle, la coopération en Europe ne voudra pas dire grand-chose et n'aura pas les effets escomptés si nous ne faisons rien pour lutter contre le système dominant de la spéculation et de l'argent roi.

En conclusion, je tiens à saluer la persévérance dont ont su faire preuve les élus et les responsables de nos collectivités. Ceux-ci ont jusqu'à présent bien souvent agi dans des cadres légaux trop peu appropriés et c'est en partie grâce à leur détermination et leur volontarisme que nous en sommes là aujourd'hui.

C'est pourquoi je ne pense pas me tromper en disant que les élus des intercommunalités et des collectivités de notre pays voient comme un soulagement les modifications concernant les institutions dont ils ont la charge. Nombre d'entre eux se sont efforcés d'anticiper les évolutions réglementaires et législatives pour mener une action plus efficace dans des territoires fortement interdépendants.

Mes chers collègues, vous l'aurez compris, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera cette proposition de loi de nos collègues nordistes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, ainsi que du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

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