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Intervention de Michèle Alliot-Marie

Réunion du 29 janvier 2008 à 15h00
Renforcement de la coopération transfrontalière — Discussion d'une proposition de loi

Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, travailler ensemble par-delà les frontières, c'est dépasser la barrière d'un territoire et d'une langue, et préparer l'avenir à la hauteur des enjeux de l'Europe et du monde de demain. Dans une Europe qui ne cesse de se développer, pour constituer un grand ensemble capable de faire face aux grands pôles mondiaux, la coopération transfrontalière prend tout son sens lorsqu'elle permet des réalisations concrètes, au bénéfice des citoyens.

L'objectif de la proposition de loi que vous présentez aujourd'hui vise, au-delà des frontières, à répondre aux besoins des citoyens dans des domaines aussi divers que la santé, l'environnement, les transports ou l'économie. Elle répond à une grande ambition, avec un objet juridique précis : permettre au règlement communautaire de trouver sa place dans le droit français.

Jusqu'alors existaient de nombreuses structures juridiques, qui reposaient sur des accords internationaux. Cette multiplicité de statuts était source de complexité et manquait de lisibilité pour les citoyens. Elle était un frein à l'aboutissement des projets de coopération transfrontalière.

Le groupement européen de coopération territoriale a vocation à se substituer à ces montages juridiques multiples et complexes. Il vise à devenir l'instrument de droit commun de la coopération transfrontalière, transnationale ou interrégionale sur le territoire de l'Union européenne. Dès son origine, la France a soutenu ce projet qui constitue une réponse concrète, sous-tendue par une grande vision. Ce support juridique nous permettra de concrétiser de nombreux projets en cours d'élaboration.

Le groupement européen de coopération territoriale est l'aboutissement d'un travail commun de la Commission européenne et des États membres de l'Union, tout particulièrement de la France. En juillet 2004, la Commission a souhaité inclure dans la réforme de la politique régionale un nouvel instrument de coopération au niveau communautaire. Cette initiative était d'autant plus utile que l'Union européenne connaissait un nouvel élargissement. Avec davantage de membres et donc de frontières communes, le renforcement de la coopération territoriale devenait essentiel.

Le groupement européen de coopération territoriale permettra de résoudre des difficultés rencontrées par les acteurs locaux – dont je suis –, confrontés à la disparité des droits nationaux. Bien entendu, cet outil juridique ne sera pas imposé aux collectivités territoriales : c'est une faculté qui leur est offerte. Les accords existants pourront subsister et de nouveaux pourront continuer d'être négociés, si les États et les collectivités le souhaitent. Néanmoins, la signature d'accords internationaux ne sera plus nécessaire, dès lors que ce texte sera entré en en vigueur, et cela constitue l'un de ses apports majeurs. De plus, les collectivités territoriales d'un État européen qui n'auraient pas signé les accords de Rome ou de Karlsruhe pourront désormais adhérer à un groupement de coopération territoriale, ce qui constitue un atout important du dispositif. Un amendement de M. Guibal, que nous examinerons tout à l'heure, propose même d'étendre ce statut aux États européens qui ne sont pas membres de l'Union européenne. Il me semble que cela sera fort utile pour des projets avec Andorre ou la Suisse. Ma conviction est qu'un statut juridique clair, unique, partagé par tous les États membres, est un véritable atout pour le développement de projets menés conjointement par des collectivités territoriales.

Si ce statut est applicable sur le territoire de l'Union européenne depuis le 1er août 2007, date d'entrée en vigueur du règlement communautaire, quelques adaptations du droit français étaient nécessaires. La proposition de loi précise ainsi le régime juridique applicable, ou encore les modalités de contrôle de l'État. En outre, comme votre rapporteur l'a précisé, il est prévu que les établissements publics puissent être membres d'un groupement européen de coopération territoriale, ce qui permet à des parcs nationaux d'être partie prenante à de tels projets. Enfin, pour la première fois en droit français, la possibilité est donnée aux collectivités territoriales de conclure des conventions avec des États étrangers.

Les collectivités territoriales françaises disposeront enfin d'un outil adapté à la mise en oeuvre d'une politique territoriale ambitieuse et moderne. Il permettra des coopérations inédites dans des domaines tels que les transports, la santé, l'éducation ou la gestion des espaces naturels protégés.

La coopération transfrontalière n'est pas un simple concept technique : elle est la marque d'un engagement politique fort de la part des élus locaux et régionaux au service de projets ambitieux. De nombreuses collectivités territoriales françaises se sont d'ores et déjà engagées dans des projets de coopération transfrontalière. Plusieurs groupements européens sont ainsi en cours de constitution. À la suite de M. le rapporteur, je citerai quelques-unes de ces initiatives locales : 1' Eurométropole Lille-Courtrai-Tournai, la plus grande agglomération transfrontalière d'un seul tenant en Europe, rassemblant 2 millions d'habitants ; à la frontière franco-luxembourgeoise, la mobilisation de l'État, de la région Lorraine, des conseils généraux, de la communauté de communes de la vallée de l'Alzette et de quatre communes luxembourgeoises autour de la reconversion d'une friche industrielle ; la convention, signée en mars 2007, pour la gestion du futur hôpital commun transfrontalier de la Cerdagne, en Catalogne. Tout cela témoigne de la diversité des domaines donnant lieu à des coopérations, mais également de la grande vitalité des collectivités locales, laquelle sera renforcée par ce texte.

Je fais totalement confiance aux collectivités territoriales pour tirer parti de ce nouvel instrument juridique. Le groupement européen de coopération territoriale verra naître des projets concrets, de nature à faire comprendre à nos concitoyens, qui ont souvent le sentiment que les institutions européennes et les règles internationales sont lointaines et abstraites, ce que peut leur apporter notre volonté de passer outre aux frontières pour partager ensemble un destin commun. C'est comme cela que je conçois l'Europe : non pas l'Europe de la réglementation et de la technocratie, mais l'Europe des projets et des ambitions au service de tous les citoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre, ainsi que du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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