Mes chers collègues, nous avons commencé la séance de cet après-midi sur un désaccord à mon avis excessif au sujet de l'article 16 de la Constitution. Nous savons tous, en effet, que nous vivons malheureusement dans un monde dangereux et qu'il faut bien, dans certains cas, préserver des pouvoirs exceptionnels. Mais je suis satisfait de constater que, sur le droit de grâce, je me retrouve entièrement dans ce qu'a dit, très brillamment, M. Le Bouillonnec. Pourtant, c'est un sujet tout aussi symbolique que celui de l'article 16, et le symbole de la survivance d'un droit ancré dans des temps très anciens. Le fait que le groupe socialiste et le groupe UMP se retrouvent à ce sujet me renforce dans l'idée que nous sommes tous des constituants, que nous sommes tous libres dans nos têtes – en tout cas, je le suis – et que nous pouvons probablement arriver ensemble à de bonnes décisions dans l'intérêt du pays.
Il reste tout de même parmi nous d'éminents collègues qui, pour des raisons proprement idéologiques, critiquent ce qu'ils appellent « l'archaïsme » du droit de grâce et veulent le supprimer. Je le regrette parce qu'à pousser trop loin l'idéologie de la fausse modernité, on risquerait de supprimer la seule soupape de sécurité qui permette de maintenir l'humanité de notre système. Nulle justice n'est parfaite. Aucune justice humaine ne peut préjuger de toutes les situations.
Qui doit ouvrir la soupape ? M. Lagarde, je le lui dis en toute amitié, confond à cet égard le droit de grâce et le droit d'amnistie.