Ils voient les banques bénéficier de largesses. Peut-être fallait-il le faire, mais peut-être fallait-il aussi leur expliquer pourquoi il fallait accorder ces largesses, financées par nos impôts. Tout cela parce que, pendant trop longtemps, ces établissements financiers ont joué avec l'économie virtuelle au lieu de faire véritablement un travail de fond – nous en avons parlé hier à l'occasion du texte relatif à l'accès des petites et moyennes entreprises au crédit –, au lieu de soutenir l'économie réelle partout diffuse et inscrite dans nos territoires.
Au plan économique, nos concitoyens mesurent l'ensemble des suppressions d'emplois. Ils les vivent durement, et sont nombreux à être touchés sur des sites industriels partout en France, qui subissent le choc dans le secteur automobile et dans toute la sous-traitance qui lui est liée.
Ils voient aussi les décisions prises par le groupe Total, que nous considérons comme une véritable provocation, dans cette économie libérale exacerbée. Évoquer Total, oui, c'est mettre en parallèle les 14 milliards d'euros de bénéfices en 2008 et les catastrophes que cette entreprise a générées et génère encore. Dans une actualité marquée par les suppressions d'emplois, notre indignation est partagée par Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Il n'y a bien que le Premier ministre, le ministre du budget et la ministre de l'économie qui rendent hommage à cette entreprise au motif qu'elle crée de la richesse nationale et investit dans la recherche. Il faudra bien que nous ayons ce débat au fond : cette entreprise est-elle véritablement citoyenne lorsqu'elle agit ainsi dans le présent ? Et l'a-t-elle été lorsque, dans le passé, elle a laissé des traces indélébiles dans l'environnement national et dans les corps et les âmes de nos concitoyens. Je pense ici, évidemment, à l'Erika et à AZF.
En ce qui concerne la crise sociale, les Français voient la précarité et les fins de mois difficiles. Vous nous opposez, madame la ministre, l'excuse du revenu de solidarité active. Mais là aussi, dans ce domaine, il faut ramener les chiffres à ce qu'ils représentent pour l'individu et comparer des choses comparables. En face des 460 millions d'euros qui bénéficient à quelque 16 000 personnes au titre du bouclier fiscal – nous en avons longuement parlé, et cela a l'air de vous ennuyer –, vous nous opposez 1,5 milliard de mesures nouvelles. Mais encore faut-il préciser qu'elles bénéficient à 1 million d'attributaires du RMI. Ces attributaires du RMI, c'est souvent toute une famille, autrement dit plusieurs personnes. On peut donc estimer que ces mesures concernent 2,5 millions de bénéficiaires. Il nous faut donc garder des ordres de grandeur raisonnables. Les Français ont l'habitude de la raison et des chiffres raisonnables. En face de la valse des milliards, ils auraient aussi besoin de voir, dans ces modifications de l'action du Gouvernement que sont les lois de finances rectificatives, qu'ils ont la place et la considération qu'ils méritent.
Pour toutes ces raisons, nous voterons la question préalable défendue par notre collègue Sandrier.