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Intervention de Francis Hillmeyer

Réunion du 31 octobre 2007 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2008 — Immigration asile et intégration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrancis Hillmeyer :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget de la mission « Immigration, asile et intégration » que nous examinons aujourd'hui est le premier présenté par ce nouveau ministère. En créant une mission unique, qui rassemble des actions auparavant éclatées entre plusieurs missions et ministères, le Gouvernement adresse un signal fort démontrant sa volonté de rationaliser l'action publique dans le domaine de l'immigration et de mener une politique coordonnée et réfléchie, à l'opposé de la politique de régularisation massive de 1997, qui a entraîné le quadruplement des demandes d'asile.

La diversité et l'ampleur de la politique d'immigration dans de nombreux domaines de la vie nationale imposent une analyse régulière et attentive de l'action publique. La cohésion nationale dépend en effet, pour une large part, de la réussite de la politique d'immigration, notamment des actions d'accueil et d'intégration. Le Nouveau Centre a donc accueilli favorablement la création d'un grand ministère de l'immigration, capable de répondre à cette logique imparable à laquelle sont confrontées les démocraties occidentales.

Une immigration non maîtrisée, sans anticipation ni capacité d'absorption, ne peut que générer exclusion, pauvreté et précarité.

La France est historiquement une terre d'accueil et elle doit le rester. Mais pour bien accueillir les immigrés, il faut avoir envie, de part et d'autre, de vivre ensemble. Le contrat d'intégration, qui repose sur des fondamentaux comme la maîtrise de la langue française ou la connaissance des moeurs et des valeurs de notre pays, nous paraît donc indispensable.

Cette mission est d'autant plus significative qu'elle consacre l'instauration d'un ministère unique, regroupant l'ensemble des services concernés, en lui donnant clairement les moyens dont il a besoin. Ainsi, le parcours d'un étranger, de son entrée sur notre territoire jusqu'à une éventuelle mesure d'éloignement ou de naturalisation, sera désormais suivi par une seule administration.

Ce budget exprime plusieurs orientations. Tout d'abord, les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » reflètent un changement de périmètre de l'action gouvernementale. Telles qu'elles ont été définies dans le décret portant création de votre ministère, vos attributions sont larges, monsieur le ministre, et ce projet de budget traduit bien les priorités définies par la lettre de mission du Président de la République.

Ces priorités ont été en grande partie prises en compte. Des efforts importants ont ainsi été accomplis pour optimiser les dispositifs en faveur de l'hébergement des demandeurs d'asile et de l'insertion des étrangers, pour garantir le fonctionnement des centres de rétention administrative et pour réduire le coût et le délai d'examen de la demande d'asile.

Pourtant, on peut s'interroger sur la portée des moyens alloués, dans ce projet de budget, aux objectifs ainsi définis. On peut également regretter l'absence de certains indicateurs.

Il aurait été logique d'inclure le programme « Codéveloppement » dans la mission « Immigration, asile et intégration », compte tenu de l'importance accordée au codéveloppement dans le cadre d'une politique d'immigration choisie et concertée. Nous pouvons regretter le manque de lisibilité provoqué par ce choix.

Le programme « Intégration et accès à la nationalité », auquel sont alloués 195 millions d'euros, voit son budget diminuer de presque 2 % par rapport à 2007. Ce programme, qui se répartit en cinq actions, marque une certaine orientation donnée à la mission d'intégration des étrangers vivant sur le sol français. L'action «Accueil des étrangers primo-arrivants » fait l'objet d'une diminution de 4,3 %. Or cette action vise précisément à préparer les modalités de la mise en oeuvre de la nouvelle loi relative à l'immigration, à l'intégration et à l'asile – laquelle, il faut le préciser, venait compléter la loi de 2006 relative à la maîtrise de l'immigration et au séjour des étrangers en France – ainsi qu'à étendre aux bénéficiaires du regroupement familial le contrat d'accueil et d'intégration. Or cette action n'est pas des moindres, puisqu'elle vise à faciliter l'accès à l'emploi des primo-arrivants, à accompagner les familles dans la compréhension des mécanismes français de responsabilité à l'égard des enfants, à élever le niveau de maîtrise de la langue française et à renforcer les liens entre les acteurs locaux, par le biais des plans départementaux d'accueil des nouveaux migrants.

On peut donc, monsieur le ministre, se demander légitimement comment, à périmètre presque constant, seront financées ces nouvelles mesures qui viennent s'ajouter à celles déjà en place depuis 2006. Cette loi restera-t-elle un voeu pieu, ou bien de réels moyens seront-ils alloués aux services centraux et déconcentrés de votre ministère pour atteindre ces objectifs ?

Par ailleurs, on voit s'esquisser une politique claire en matière d'aide au retour des étrangers. Vous allouez près de 3 millions d'euros à cette action, alors que rien n'était prévu pour 2007. Parallèlement, le Gouvernement n'aurait-il pas tout à gagner à combattre en amont, aux côtés de nos partenaires européens, une immigration clandestine devenue trop importante ?

Porter les flux migratoires d'origine économique de 7 % à 50 % à l'horizon 2012 changera le regard sur les personnes accueillies, leur donnera de véritables perspectives d'avenir et leur permettra de vivre dignement. Pourtant, cette orientation n'apparaît pas clairement dans le projet de budget. Certes, la LOLF invite davantage les administrations à la réalisation d'objectifs de gestion et à l'amélioration de leurs performances qu'à la fixation d'objectifs qualitatifs ; mais votre ministère devrait présenter à notre assemblée les moyens à mettre en oeuvre afin de parvenir à cet objectif, louable, de 50 % d'immigration économique.

Comme l'a souligné le rapporteur, le projet annuel de performances ne comporte qu'un indicateur sur ce sujet, relatif à la durée moyenne d'instruction des recours hiérarchiques dirigés vers des décisions de refus d'autorisation de travail. Nous souhaiterions donc obtenir plus de précisions, ainsi qu'une définition précise de ce que votre ministère entend par « immigration économique », afin que des indicateurs puissent évaluer celle-ci en fonction du flux total.

Ce budget, parce qu'il fixe des objectifs de performance à l'administration en charge de la délivrance des titres de séjours, tente de traiter de la question de la précarité dans laquelle les procédures administratives interminables plongent les personnes en attente de régularisation. Trop d'étrangers ayant noué des attaches personnelles dans notre pays et vivant une intégration de fait, souffrent aujourd'hui d'un manque de considération de la part des pouvoirs publics. Leur détresse fait le lit des marchands de sommeil, des réseaux mafieux et des employeurs malhonnêtes, qui assoient toute une économie sur leur exploitation. Tout doit être mis en oeuvre pour que cela cesse ! La diminution de la durée des procédures éviterait la pérennisation des situations précaires.

Je voudrais encore aborder un sujet qui préoccupe le Nouveau Centre : la nécessité de réformer la France et de moderniser sa structure administrative, qui n'est pas satisfaisante. Les préfets et les maires, par exemple, rencontrent de nombreuses difficultés en matière d'information et de suivi des dossiers. Plusieurs débats à ce sujet n'ont rien changé. Je souhaite que l'action gouvernementale permette enfin de réaliser des progrès sur ce point.

Pour conclure, monsieur le ministre, ce premier projet de budget a pour mérite de mettre en exergue la volonté d'agir de votre ministère et celle de rassembler sous son autorité tous les sujets relatifs à l'immigration. Il installe la politique d'immigration dans une continuité d'action que je salue. Il prolonge et élargit le spectre des mesures mises en place sous la dernière législature et rationalise notre droit d'asile. Le groupe Nouveau Centre souhaite pourtant que vous lui apportiez un éclairage sur les thèmes que j'ai soulevés, afin de mieux comprendre et de mieux cerner, à travers ces données, les orientations qui sont les vôtres.

Mes chers collègues, le Nouveau Centre votera les crédits de cette mission.

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