Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, trois mois à peine se sont écoulés depuis le début de l'année, et nous examinons déjà une deuxième loi de finances rectificative. Sa teneur ne laissera pas de surprendre ceux qui se souviennent des propos tenus à cette tribune par les membres du Gouvernement, qu'il s'agisse de l'examen de la loi de finances initiale, de la première loi de finances rectificative ou de la loi de finances rectificative de l'été 2007, plus communément appelée « paquet fiscal » puisque telle est désormais la terminologie consacrée.
Le souvenir, étrange, de ces propos, nous revient comme atténué, tant les mesures de cette loi de finances rectificative s'inscrivent mal, semble-t-il, dans ce qui avait alors été présenté comme étant la politique intangible du Gouvernement, c'est-à-dire en réalité, celle du Président de la République. Aux mois de novembre et de décembre derniers, lorsque nous avons commencé à examiner la loi de finances initiale, madame Lagarde, vous nous expliquiez de cette tribune que la crise n'avait commencé qu'au mois de septembre, avec la faillite de Lehman Brothers, quand beaucoup la voyaient démarrer bien avant. D'ailleurs, vous l'aviez indiqué dès ce moment – je pense, bien sûr, au mois de juillet 2007. Mais à cette tribune, vous faisiez démarrer la crise au mois de septembre 2008 et vous nous indiquiez, prévisions de croissance à l'appui, que la France résistait mieux que ses voisins, que la croissance pour 2009, même faible, serait positive, bref, que si crise il y avait, elle serait probablement d'une faible ampleur et que notre pays en sortirait vite.
On sait ce qu'il en est aujourd'hui ! Les propos tenus au début de l'examen du projet de loi de finances annonçaient un déficit budgétaire d'une cinquantaine de milliards d'euros – 52 pour être précis, mais à quoi bon rappeler les unités quand, à chaque déclaration présidentielle, les milliards valsent par dizaines ! De 52 milliards d'euros, nous sommes passés à 65 ou 66 milliards à la fin de la discussion budgétaire, et à 85 ou 87 milliards lors de la loi de finances rectificative. Aujourd'hui, nous en sommes à 104 milliards d'euros, soit, en quelques mois, le double du déficit prévu initialement. Il est vrai que la prévision est un art difficile, madame la ministre, mais il faut reconnaître que, depuis bientôt deux ans, les erreurs que vous commettez en annonçant des éléments relatifs à notre économie, dans cette enceinte comme ailleurs, ont une fâcheuse tendance à connaître la répétition, s'agissant notamment de la gravité des pronostics.
Étrange écho que vos propos pour la loi de finances initiale, comme pour cette loi de finances rectificative, étant entendu, comme l'a rappelé le président de la commission des finances, que la dette publique s'élèvera, à la fin de l'année, à 6 % du PIB ! Le record atteint en 1993, dû au ministre du budget de l'époque, Nicolas Sarkozy, est donc égalé par le même Nicolas Sarkozy, aujourd'hui Président de la République ! Il occupera à lui seul les deux premières marches du podium…