Avec les articles 1er et 2, nous abordons le mécanisme des peines plancher. M. Raimbourg a eu parfaitement raison de souligner que, en matière criminelle, l'article 1er n'aura probablement aucune conséquence : le tableau publié par le rapporteur est fort clair, les peines plancher sont très inférieures à la moyenne des peines actuellement prononcées en matière criminelle.
Je veux aller plus loin, cependant. Vous savez que, en cour d'assises, au moment du délibéré, la cour et le jury doivent répondre à diverses questions, très précisément définies par le code de procédure pénale. Vous ne prévoyez pas, dans votre texte, que des questions puissent être posées à la cour et au jury sur l'application des peines plancher. Ainsi, ce texte n'aura aucun caractère contraignant pour eux. Autant dire que l'article 1er n'est qu'une déclaration d'intention. Nous affirmions que, par certains aspects, ce projet de loi était un texte d'affichage : nous en avons là la preuve flagrante. Le président de la cour d'assises n'a pas, formellement, la possibilité de demander à la cour s'il faut ou non déroger aux peines plancher.
J'ai posé, tout à l'heure, dans les explications de vote sur la motion de renvoi en commission, une question qui me paraît extrêmement importante : que recouvre pour vous la notion de nouvelle récidive, que vous introduisez dans le code pénal ? S'agit-il d'une récidive qui concerne un crime ou un délit assimilé, ou s'agit-il d'une nouvelle récidive, par rapport à un autre crime ou un autre délit ? Le texte n'est pas clair à cet égard. On peut comprendre que la nouvelle récidive s'applique à l'état de récidive et non pas à l'un des délits ou à l'un des crimes. Il y a là une importante source de confusions : il faudrait la clarifier, au moins dans les débats. Selon les cas, ce ne serait pas du tout la même situation qui serait visée. Si vous avez une interprétation extensive de cette nouvelle récidive, elle concernera des délinquants qui auront commis en récidive des crimes et des délits de natures différentes.
Enfin, dans son article 132-8 qui, à ma connaissance, n'est pas abrogé par votre texte, le code pénal actuel ne prévoit que deux peines pour les crimes commis en récidive : la perpétuité ou trente ans. Or vous prévoyez des peines plancher pour des crimes punis de quinze ou vingt ans de réclusion. Cela veut dire que vous sortez de la notion de récidive et que les peines plancher risquent de s'appliquer à des délinquants qui ne sont pas en état de récidive. Là encore, les ambiguïtés ou les confusions de ce texte n'ont été levées ni par le travail du rapporteur ni par les amendements. Il serait bon de le faire à présent.
En tout état de cause, l'article 1er est un article déclamatoire, d'intention, mais qui n'a aucune portée normative et n'exercera aucune contrainte sur les cours d'assises.