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Intervention de Manuel Valls

Réunion du 17 juillet 2007 à 21h30
Lutte contre la récidive — Avant l'article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaManuel Valls :

Ce débat est tout à fait sympathique et intéressant, mais il passe à côté de l'essentiel, qui était déjà au coeur des interventions de cet après-midi : le nombre de détenus. Le Gouvernement fait le pari que les peines plancher vont dissuader les auteurs de crimes ou délits de recommencer. Si tel est bien le cas, la loi n'aura pas à être appliquée par les juges, puisque la seule menace suffira à dissuader les délinquants. On devrait donc assister à une diminution de la population carcérale. C'est d'ailleurs avec un certain étonnement que j'ai vu, tout à l'heure, M. le rapporteur reprendre cet argument et s'appuyer sur le travail de M. Tournier, souvent cité aujourd'hui, pour prédire que l'on aboutirait à une baisse de 8 000 incarcérations − c'est le fameux scénario déflationniste que Mme la garde des sceaux a également repris à son compte. Or vous avez oublié de signaler que le chercheur, quant à lui, ne croit pas à cette thèse. Vous-même, d'ailleurs, en même temps que vous mettez en place les peines plancher, vous prévoyez d'accroître le parc pénitentiaire, et ce n'est pas seulement pour résoudre le problème de la surpopulation carcérale, qui est bien réel, mais aussi parce que vous savez, comme le confirment les chiffres qui ont été publiés tout à l'heure dans le journal Le Monde et qui émanent de votre administration, madame la ministre, que nous allons assister, dans les années qui viennent, à une augmentation de la surpopulation carcérale.

Je veux bien que des rapports annuels permettent de mieux connaître la situation : on ne peut que s'en réjouir. Mais, si je me réfère à mon tour aux travaux de M. Tournier, une fois que j'ai écarté le premier scénario, auquel vous ne croyez pas, et le second, puisqu'il présuppose que, les peines plancher ne se révélant aucunement dissuasives, les magistrats seront portés à utiliser systématiquement la marge de manoeuvre prévue par le projet de loi, ce qui impliquera qu'il n'y ait aucun changement − hypothèse à laquelle vous ne croyez pas davantage, sinon vous n'auriez pas présenté cette loi −, je suis bien obligé de conclure qu'il faut travailler très sérieusement sur les conséquences que votre loi aura sur l'augmentation du nombre des détenus dans les prisons françaises, ce qui justifiait d'ailleurs la motion de renvoi en commission.

Madame la ministre, j'imagine que vous disposez depuis un certain temps déjà de statistiques précises sur le nombre de personnes écrouées au 1er juillet 2007. Pour honorer vos engagements et répondre le plus précisément possible aux amendements qui ont été déposés, je vous demande de bien vouloir nous communiquer ces chiffres dans le courant de la soirée. Nous en avons besoin pour étayer nos arguments et mieux comprendre où vous voulez aller, car, permettez-moi de vous le dire, vos propos ou ceux de M. le rapporteur sur les statistiques publiées par M. Tournier sèment une grande confusion ou, plutôt, confortent la thèse selon laquelle ce texte va provoquer une véritable explosion dans nos prisons.

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