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Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 13 juillet 2007 à 15h00
Travail emploi et pouvoir d'achat — Article 7

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoland Muzeau :

La question des indemnités de départ des dirigeants de grandes entreprises a fait irruption dans la campagne présidentielle en avril dernier, à la suite de l'annonce de l'octroi d'une somme de plus de 12 millions de dollars au directeur général sortant du consortium franco-allemand EADS, Noël Forgeard. Cela s'ajoutait à la liste des scandales relevés par la presse et les salariés dans les entreprises, salariés qui, eux, n'ont jamais leur mot à dire. Les propositions formulées ici ou là sont toujours discutées, en effet, entre gens de bonne compagnie. Les salariés, les comités d'établissement ou les comités de groupe ne sont évidemment pas tenus informés de ces stratégies.

La décision concernant Noël Forgeard avait semé un vif émoi en France, puisqu'elle survenait quelques semaines à peine après que le fabricant d'Airbus, miné par de graves problèmes de production, eut annoncé la mise à pied de 10 000 employés. Belle récompense pour un tel résultat !

Tous les candidats à la présidentielle étaient montés au front pour dénoncer les conditions de départ de l'administrateur congédié, Nicolas Sarkozy promettant alors d'interdire les parachutes dorés.

À l'arrivée, les mesures qui nous sont proposées sont, ainsi qu'on pouvait s'y attendre, beaucoup moins ambitieuses. Un « petit peu de moralisation » dans le versement des indemnités de départ ne « fera pas de mal », avez-vous affirmé, madame la ministre, confirmant l'approche plus timide adoptée par le Gouvernement.

De fait, votre réforme permet le maintien des indemnités de départ, se contentant de les « moraliser », c'est-à-dire – et c'est une curieuse conception de la moralisation – de les lier directement à la performance enregistrée par l'entreprise sous la gouverne du dirigeant concerné.

Le conseil d'administration sera tenu d'établir d'emblée des critères d'évaluation pouvant porter sur le cours boursier, les emplois créés ou les bénéfices générés. Ceux-ci pourraient être utilisés au moment du départ du gestionnaire pour statuer sur la somme appropriée. La décision devrait ensuite être approuvée par l'assemblée des actionnaires. Or, rappelons-le, les cours boursiers flambent dès qu'est annoncé un plan dit social – je parlerai quant à moi de plan de suppressions d'emplois et de licenciements. La récompense sera donc d'autant plus importante pour le PDG coupable de cet assainissement économique.

« Si on réussit, on est récompensé. Si on échoue, on est sanctionné », résumait Nicolas Sarkozy, qui insiste sur l'importance d'un resserrement dans ce domaine « pour réconcilier les Français avec l'entreprise ». M. Kossowski vient d'ailleurs d'y faire allusion.

Le MEDEF, principale organisation patronale française, a accueilli avec satisfaction le projet de loi. Sa présidente, Laurence Parisot, estime qu'il va « rendre les indemnités plus transparentes » tout en permettant à la France de « conserver sa compétitivité » dans le recrutement d'administrateurs de haut niveau. On comprend sa satisfaction puisque, au fond, votre réforme est vide de tout contenu et ne se propose ni d'interdire les parachutes dorés ni de moraliser les pratiques.

Pour cela, il faudrait s'attacher à prendre des mesures d'une tout autre ampleur. Les amendements que nous allons vous proposer auront vocation à vous mettre sur la voie d'une authentique réforme, prévoyant non seulement l'interdiction des parachutes dorés, mais encore, par le plafonnement des revenus des dirigeants d'entreprises, l'exercice d'un droit de regard des comités d'entreprise, ou encore l'intégration de la fixation des revenus des dirigeants salariés dans la négociation salariale globale.

Enfin, je reprendrai les recommandations de l'Institut Montaigne, que je lis toujours attentivement car ses membres sont en quelque sorte vos penseurs.

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