Nous ne sommes pas venus en touristes ou en intermittents. Nous sommes là pour faire notre travail de représentants du peuple.
La nomination et la révocation des présidents de France Télévisions, de Radio France et de la société en charge de l'Audiovisuel extérieur de la France marquent une sorte de caporalisation du service public comme n'en connaît aucun autre pays de l'Union européenne. Le Gouvernement a pris la décision de provoquer une régression démocratique sans précédent, et nous allons devenir la risée de l'Europe et des grands pays démocratiques.
Seulement, après l'autoritarisme, le moment est venu de l'affairisme. L'audiovisuel public, déjà très sérieusement fragilisé par le bon plaisir du Président de la République, doit donc devenir économiquement dépendant. Comme Jean Dionis du Séjour, qui affronte courageusement la majorité à laquelle il appartient, je dirai que cette dernière s'enfonce dans l'erreur et commet sans doute une faute historique qui mettra à mal l'audiovisuel public et le détruira probablement purement et simplement, tout en renforçant l'empire de l'audiovisuel privé détenu principalement par les amis du Président de la République. La décision surprise, univoque et solitaire de Nicolas Sarkozy a été prise le 8 janvier 2008, après la rédaction du Livre blanc de TF1 qui réclamait précisément, entre autres dispositions, et en priorité, la suppression de la publicité pour l'audiovisuel public. Ce que Bouygues a rêvé, Sarkozy l'a fait !
Quant au président de la commission, dont je tairai le nom, il n'est jamais présent dans l'hémicycle et se garde bien d'être là pour l'examen de l'article 18. Il s'est d'ailleurs bien gardé d'être là pour appuyer sur le bouton lorsque nous avons demandé un scrutin public sur l'article relatif à la nomination des présidents des sociétés de l'audiovisuel public par le Président de la République. Sans doute ne veut-il pas que demain, à la lecture des comptes rendus des débats de l'Assemblée nationale, on puisse lui reprocher d'avoir participé à cette forfaiture.
Si le manque à gagner de 450 millions d'euros est inscrit dans le budget, il n'est par directement affecté. Madame la ministre, ne serait-il pas possible d'imaginer un fonds d'investissement et de développement de l'audiovisuel qui permettrait de recueillir ces 450 millions dans un premier temps et les 800 millions d'euros ? Ce serait, en tout cas, un gage de votre sincérité. Si vous refusez cette solution, c'est que vous voulez laisser le budget de France Télévisons et de l'audiovisuel public à la merci des aléas et des humeurs de la majorité. Comme l'a très bien dit M. Brard tout à l'heure, quand en 2012 il faudra revoir les choses, nous serons à la veille d'une élection présidentielle et la situation sera particulièrement difficile.
D'ailleurs, comment peut-on croire aux engagements d'un président de la République qui, en février 2007, c'est-à-dire avant qu'il ne reçoive le Livre blanc de TF1, nous expliquait dans L'Express qu'il ne fallait pas supprimer la publicité pour le service public, mais plutôt en ajouter un peu ? Tout cela a été totalement oublié.
Et puisque Mme Albanel se targuait tout à l'heure du soutien de Marin Karmitz, je vais vous lire ce qu'il disait avant sa conversion dans l'article qu'il a cosigné avec des membres de la commission Copé, le 27 novembre 2008 dans Le Monde : « Si la loi de finances 2009 garantit le versement par l'État d'une somme qui permette dans tous les cas de figure de doter France Télévisions des 450 millions prévus, qu'en sera-t-il à partir de 2010 ? Aucune pérennité de financement de l'audiovisuel public n'est assurée. Comment réaliser alors les ambitions que nous nourrissions pour France Télévisions ?
« Les 450 millions couvrent la disparition de la publicité après vingt heures, en aucun cas cette somme ne peut financer les émissions nouvelles qui remplaceront les espaces publicitaires. »