Comme l'ont expliqué mes collègues, l'article 4 comporte un grand nombre de dispositions qui seront inapplicables. Nous le répétons, monsieur le ministre, il démontre l'absence de service minimum garanti.
L'article 4, c'est la patate chaude ! S'il est voté, les régions, les départements, les agglomérations, bref toutes les autorités organisatrices de transport urbain – qui, faisant confiance à la négociation et au contrat entre les partenaires sociaux, se sont opposées à l'existence d'une loi –, amenées, demain, à faire face à des perturbations, des mouvements de grève ou autres événements décrits dans l'article, s'entendront dire par le Gouvernement que si cela ne se passe pas bien, c'est leur faute car la loi leur donne la responsabilité de tout régler. Et de régler des aspects qui ne peuvent pas l'être – essentiellement quatre inscrits dans l'article.
Premièrement, l'alinéa 7 demande aux autorités organisatrices de transport urbain de définir les dessertes prioritaires au vu d'un certain nombre de principes – ce qui montre votre improvisation en la matière puisqu'il ne fait que reprendre la rédaction de l'article 1er.
En outre, vous faites une confusion entre la notion géographique de desserte et celle de catégorie d'usagers. Le mot « desserte » est, pour moi, une notion géographique : on va dans tel lieu chercher des voyageurs et on dessert telle ou telle localité. L'alinéa 7, en évoquant les personnes qui doivent aller passer un examen, par exemple, parle d'une catégorie d'usagers, et non d'une desserte. Il y a là une confusion des genres.
Deuxièmement, vous évoquez les besoins essentiels sans les caractériser. Par conséquent, les autorités organisatrices de transport urbain, qui ont la charge de définir les priorités de service sur la base de besoins essentiels, n'ont pas de repère dans cette loi pour identifier ces derniers. Ce deuxième problème provoquera des contentieux.
Troisièmement, comme vous avez envie de charger la barque pour que les autorités organisatrices soient accusées de tous les maux en cas de dysfonctionnements, vous leur demandez, à l'alinéa 12, d'approuver les propositions de l'entreprise de transport. Elles auront donc défini un cahier des charges sur des bases extrêmement fluctuantes, à tout le moins imprécises ; le transporteur fera une proposition qu'il ne pourra peut-être pas tenir puisqu'il ne connaît pas à l'avance le nombre de grévistes ; et vous demandez aux autorités organisatrices de transport d'approuver à l'avance, à l'aveugle en quelque sorte, un dispositif qui, de toute façon, ne marchera pas. Elles seront donc accusées d'avoir approuvé quelque chose qui ne peut pas être mis en place.
Quatrièmement – cerise sur le gâteau ! –, le quinzième alinéa, qui constitue en quelque sorte l'article 16 de cette loi, dispose que le préfet pourra, au doigt mouillé, estimer qu'il y a carence, mais sans qu'elle soit définie dans ce texte. Cela s'apparente au fait du prince pour mettre en difficulté les autorités organisatrices.
Tout cela coûtera beaucoup d'argent aux contribuables locaux, aux entreprises et aux usagers car vous aurez multiplié les imprécisions, sans compter que vous aurez aussi beaucoup exigé de la part des autorités organisatrices de transport – qui, je le répète, n'ont pas demandé l'inscription dans une loi de dispositions qu'elles ne pourront pas mettre en oeuvre.
Même si l'expression « patate chaude » est un peu triviale, j'espère avoir fait la démonstration que l'article 4 en est une.