L'article 2 rend obligatoire, avant tout dépôt d'un préavis de grève, une négociation préalable. Pour de multiples raisons déjà évoquées, nous doutons que cette nouvelle phase de « préavis du préavis » soit la voie la plus appropriée pour améliorer la qualité du dialogue social, car ce n'est pas tant en allongeant la durée totale des préavis qu'en s'attachant au contenu de la négociation, notamment aux différentes étapes que sont les réponses circonstanciées aux revendications, le constat d'accord ou de désaccord, que l'on parviendra à prévenir les conflits et leur expression ultime, la grève.
Dans l'esprit du législateur, la raison d'être du préavis de grève applicable dans le cadre du secteur public était de permettre de nouer un dialogue et d'ouvrir des négociations sur l'objet de la grève.
Le problème, même si l'on vous crédite de ne pas vouloir travestir la nature du préavis en délai supplémentaire afin d'organiser le service minimum, c'est que vous tenez à cette période de dialogue, en toutes circonstances, quel que soit le motif de la grève. Ce n'est plus du pragmatisme, c'est de la schizophrénie ! Comment en effet contraindre l'employeur et les organisations syndicales à discuter de sujets généraux de notre législation sociale sur lesquels ils n'ont pas le pouvoir d'agir directement ?
Les revendications professionnelles liées à l'organisation et aux conditions de travail, aux salaires, à la protection de l'emploi, à la prévoyance, aux droits collectifs, sont souvent internes à l'entreprise ou au secteur d'activité. Mais les griefs peuvent aussi être généraux, extérieurs à l'établissement, et les grèves interprofessionnelles ne sauraient être négligées. Si les griefs notifiés à l'employeur sont extérieurs à l'entreprise, rien ne justifie une négociation préalable.
A moins que, comme semblent le révéler les débats au Sénat, le Gouvernement ne veuille éviter que les salariés du secteur public des transports ne s'engagent dans une grève pour des motifs qui ne les concerneraient pas directement… Sachant que les mauvais coups à venir en matière de protection sociale auront du mal à passer, votre ambition, monsieur le ministre, serait-elle d'empêcher la participation des salariés du secteur public aux conflits nationaux interprofessionnels ? Décidément, les grèves de 1995 et celles, plus récentes, contre le CPE vous ont marqués ! Mais en enserrant ainsi l'exercice du droit de grève, vous allez conduire les travailleurs à faire entendre leurs désaccords et leurs aspirations par des actions plus radicales. Auriez-vous oublié Metaleurop ?
Notre amendement prend en compte la particularité des mouvements interprofessionnels ou spontanés. Pour éviter de placer les acteurs sociaux dans des situations ubuesques et insolubles, il vise à limiter la négociation préalable aux préavis déposés pour des motifs liés au fonctionnement de l'entreprise.