La vérité apparaît dès l'article 1er du projet de loi : les caisses d'épargne et les banques populaires n'ont que la majorité – pour l'instant – du capital du nouvel organe central, qui est une société anonyme. Si l'on entend par la « majorité » du capital un seuil de 50,01 %, c'est pour le moins fragile. C'est, de surcroît, susceptible de changer : la majorité gouvernementale – pour ne pas dire son chef – a déjà prouvé qu'elle pouvait très bien s'émanciper de ses promesses anciennes, et même récentes. L'épisode Gaz de France est là pour le rappeler.
Avant que vous ne vous prononciez sur ce texte, chers collègues, je veux vous faire partager ma crainte que, par son imprécision, ce projet de loi risque de devenir le cheval de Troie du démantèlement de ces réseaux, ou à tout le moins de leur banalisation ! Il mettra un terme à ce qui a fait leur force pendant plus d'un siècle – leur identité, leur mode de gestion, leurs valeurs, leurs relations avec leur clientèle, leur objet social. Pour nous, socialistes, c'est inacceptable.
Telle est la portée des questions que je tiens à poser dans cette motion de renvoi en commission. À ces questions, madame la ministre, vous ne nous avez pas encore donné de réponses franches. Hélas, je redoute que vous n'en disposiez pas vous-même ! Voilà pourquoi, même si nous pouvons en comprendre les enjeux, le rapprochement des caisses d'épargne et des banques populaires méritait mieux qu'un tel projet de loi. L'urgence est souvent mauvaise conseillère ; en matière financière, elle peut être dramatique. Une trop grande impréparation crée une fragilité intrinsèque, une tare originelle, en quelque sorte, qui, demain, pourrait entraîner de lourdes conséquences. Retravaillons donc ce texte et, pour ce faire, votons son renvoi en commission ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)