J'insiste sur ce dernier point, qui est crucial. Tous les salariés que nous avons rencontrés nous ont fait part d'une même préoccupation : comment les banques populaires et les caisses d'épargne, déjà secouées par les pertes récentes, qui devront encore absorber de nouvelles pertes de Natixis et réaliser les efforts de gestion nécessaires à leur rapprochement, sauront-elles dégager les ressources financières intrinsèques qui permettront le remboursement des capitaux apportés par l'État ? La question est réelle : elle a trait à la profitabilité, et même à la survie du groupe.
Chacun sait en effet qu'un risque majeur existe ; il est de deux ordres. Tout d'abord, pour dégager les produits qui permettront de faire face à cette charge, les frais de fonctionnement du réseau pourront être sévèrement réduits – et les emplois avec eux ! Premier risque, donc : faire payer aux salariés de douloureux efforts de restructuration.
De bribes d'informations glanées çà et là, qu'apprend-on en effet d'un business plan qui circule à l'intérieur du groupe ? Deux éléments, aussi intéressants qu'inquiétants. Pour les années 2009 à 2012, ce plan d'affaires prévoit d'abord une multiplication par sept des dividendes des filiales remontant vers le nouvel organe central – dividendes qui passeraient de 92 millions d'euros en 2009 à 336 millions en 2011 et à 607 millions en 2012. Comment le nouveau groupe y parviendra-t-il ? C'est très simple : dans les prévisions du nouvel organe central, les charges totales de gestion du groupe passeraient de 652 millions d'euros en 2009 à 561 en 2011 et à 516 en 2012 – soit une baisse de 20 % en trois ans ! Quel contraste entre la diminution de 20 % des charges et la multiplication par sept des dividendes !
Tel est l'avenir du groupe qui rassemblera les banques populaires et les caisses d'épargne. Outre que de telles évolutions ne s'apparentent pas aux caractéristiques fondamentales des valeurs de la coopération, constatons qu'elles ouvrent la voie à la mise sous pression du réseau et de ses agents, pour dégager de copieux dividendes qui remonteront à l'organe central. Dans ces conditions, les salariés ont raison d'être inquiets !
Leur inquiétude est d'autant plus justifiée qu'un second risque ne saurait être négligé, comme l'évoquait à l'instant M. Cahuzac : en effet, à défaut de restauration de l'équilibre financier, le groupe pourrait bientôt être vendu à l'encan – et à quelqu'un qui n'aura plus rien de coopérateur ou de mutualiste !