Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous abordons enfin l'examen du projet de loi de programmation militaire, déposé il y a plus de sept mois sur le bureau de l'Assemblée. Ce retard est regrettable à de nombreux égards ; ainsi, le projet de loi de finances pour 2009 a été voté avant que le présent texte ne soit débattu, et celui-ci a dû être actualisé pour tenir compte du plan de relance. Mais ce retard est surtout dommageable pour nos armées : le Livre blanc a été présenté à l'Assemblée voici près d'un an, et il n'est que temps que la communauté militaire trouve la traduction législative des orientations et des missions nouvelles que nous souhaitons lui donner.
La multiplication des menaces nécessite en effet la mise en place d'une nouvelle stratégie en matière de sécurité nationale. Elle doit avoir un triple objectif : défendre les populations et le territoire ; assurer la contribution de la France à la sécurité européenne et internationale ; défendre les valeurs du pacte républicain.
Pour prendre en compte le nouveau contexte géostratégique né de la mondialisation – un monde multipolaire à l'instabilité et à la complexité croissantes –, le Livre blanc considère que la sécurité nationale doit reposer sur un nouvel équilibre entre cinq grandes fonctions stratégiques : la connaissance et l'anticipation ; la prévention des menaces et des guerres ; la dissuasion nucléaire ; la protection de la population et du territoire ; l'intervention, principalement à l'extérieur du territoire et dans un cadre multinational.
La sécurité ne peut en effet être assurée que de façon collective. La France se doit de participer activement à la sécurité mondiale, notamment en renforçant sa présence et son action au sein de l'Union européenne, de l'OTAN et de l'ONU.
Le projet de loi décline précisément ces orientations et les moyens qui seront consacrés aux forces armées au cours de la période 2009-2014 : moyens humains, moyens financiers et moyens en équipements. Je vais m'attacher à vous les présenter rapidement.
« Si la France est un grand pays à la diplomatie universelle, c'est parce qu'elle a une grande armée composée de soldats compétents, déterminés et engagés », rappelait le Président de la République lors de ses derniers voeux aux armées. Les travaux relatifs au Livre blanc et à la révision générale des politiques publiques ont conclu à la définition de nouveaux formats d'armées. L'article 4 du projet de loi de programmation fixe un objectif de réduction des effectifs de 45 888 équivalents temps plein pour la période 2009-2014. L'effort doit essentiellement porter sur les fonctions de soutien, qui représentent 75 % de ces réductions. Pour atteindre cette cible, il est prévu de supprimer annuellement 8 400 emplois pour la période 2009-2011, chiffre brut que viendront corriger des renforcements d'effectifs dans certains secteurs jugés prioritaires, tels que le renseignement, qui bénéficiera de 700 recrutements supplémentaires.
Il convient toutefois de maintenir un certain équilibre, l'arrêt complet des recrutements pouvant évidemment être lourd de conséquences. C'est pourquoi il est impératif de maintenir des flux d'entrants et de veiller à conserver des personnels détenant les spécialités indispensables à nos capacités opérationnelles. Je vous serais reconnaissant, monsieur le ministre, de bien vouloir nous apporter quelques précisions sur ce point.
Parallèlement à cette réduction des effectifs, un effort particulier sera porté sur l'amélioration de la condition des personnels civils et militaires. La mise en oeuvre du présent texte coïncidera en particulier avec le lancement du plan d'amélioration de la condition du personnel. Il concernera les personnels militaires et civils de la défense en poursuivant deux objectifs majeurs : renforcer l'attractivité des carrières du personnel militaire grâce à un plan de revalorisation indiciaire et valoriser les parcours professionnels du personnel civil.
La loi de programmation militaire donnera également aux armées les moyens financiers d'accomplir leurs missions, notamment en sanctuarisant certaines dépenses considérées comme stratégiques. Les crédits de paiement de la mission « Défense » pour la période de programmation – article 3 – représenteront 184,8 milliards d'euros sur six ans, et 377 milliards d'ici à 2020. Ces crédits ne se limitent plus aux seules dépenses d'investissement, mais couvrent l'ensemble du champ du ministère. Ce choix s'explique par un souci de sincérité et par la logique financière de la réforme du ministère de la défense engagée depuis le mois de juillet 2008. En effet, les économies réalisées sur les dépenses de personnel et de fonctionnement permettront de dégager de nouvelles marges de manoeuvre, entièrement réaffectées aux programmes d'armement.
Par ailleurs, 3,7 milliards d'euros proviennent de ressources exceptionnelles. Celles-ci revêtent un caractère aléatoire, puisqu'elles reposeront sur des cessions d'immeubles – notamment dans le cadre du projet de regroupement des sites à Balard – et des cessions de fréquences, qui, par définition, s'inscrivent dans des calendriers contraints et s'adressent à des marchés spécifiques. De fait, les rentrées de ces ressources connaissent des retards. M. le ministre nous confirmera, je l'espère, que des dispositifs sont prévus pour pallier ces retards et que les rentrées attendues seront bien engrangées d'ici à 2011.