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Intervention de Catherine Vautrin

Réunion du 15 mai 2008 à 9h30
Protection des personnes contre les chiens dangereux — Discussion d'un projet de loi adopté par le sénat en deuxième lecture

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Vautrin, rapporteure de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire :

Comme vient de le rappeler Mme la ministre, les morsures, notamment de jeunes enfants, constituent des accidents malheureusement relativement fréquents ; c'est pourquoi le Gouvernement et plusieurs d'entre nous ont souhaité élaborer un texte articulant prévention et protection des personnes contre les chiens dangereux.

L'objectif de ce projet de loi est de sensibiliser les détenteurs de chiens à leurs responsabilités, sans oublier bien entendu que le chien est et doit rester le meilleur ami de l'homme. Il convient en effet de rappeler que le comportement des maîtres joue un rôle absolument crucial : selon les conditions dans lesquelles il est placé, un chien peut devenir plus ou moins dangereux. Aussi ce texte prévoit-il l'évaluation comportementale des chiens de première et deuxième catégorie et des chiens ayant montré leur dangerosité potentielle, un test d'aptitude, un permis de détention ainsi qu'un renforcement des sanctions en cas de non-respect des règles.

Déposé le 11 octobre dernier, le projet de loi a subi plusieurs modifications importantes destinées à renforcer tant la prévention que la répression : alourdissement des sanctions pénales, mesures spécifiques pour les agents de sécurité travaillant avec des chiens, alourdissement des systèmes d'information afin de mieux connaître les causes et les conséquences de la dangerosité des chiens, création d'un permis de détention.

En deuxième lecture, le Sénat a rétabli l'observatoire national du comportement canin et étendu la possibilité de constituer des fichiers pour le suivi statistique et administratif des animaux. L'observatoire aura pour mission d'effectuer un relevé très précis des circonstances des morsures et des accidents : l'idée est de mettre en place un véritable réseau de surveillance des morsures des carnivores domestiques. Cet observatoire permettra ainsi de renforcer la prévention en mesurant, à l'aune de faits précis, la dangerosité réelle de certaines races ou de certains comportements : nous avons encore besoin de progresser dans ce domaine. Par ailleurs, les travaux engagés sous l'égide du ministère de l'agriculture sur le thème « Animal et société », tout comme ceux de la mission d'information sur la filière canine créée par notre commission avec le soutien de son président, soutiendront une réflexion globale sur la place de l'animal dans notre quotidien.

Au terme de la première lecture, les divergences avec le Sénat portaient sur deux points principaux.

Tout d'abord, nous avions eu dans cet hémicycle un long débat sur les détenteurs occasionnels des chiens de première et deuxième catégories. En première lecture, l'Assemblée avait inclus dans le dispositif toutes les personnes amenées à garder un chien dangereux, fût-ce durant quelques minutes. J'avais alors souligné que cela risquait d'avoir des conséquences extrêmement lourdes pour nos concitoyens : une personne malade demandant à sa gardienne de sortir le chien pendant cinq minutes se trouverait sous le coup de l'article 8… Le Sénat a estimé qu'il ne fallait pas maintenir une disposition dont la mise en oeuvre et le contrôle eussent été concrètement impossibles. C'est pourquoi il a exclu les détenteurs occasionnels des contraintes prévues par le projet de loi. Cette solution semblant raisonnable, notre commission a adopté l'article 2 bis A sans modification, sachant que les conséquences pénales demeurent bien évidemment à l'appréciation du juge, qui pourra toujours examiner les conditions de détention.

La seconde divergence portait sur le critère du poids : nous avions, vous vous en souvenez, supprimé en première lecture cette notion introduite par les sénateurs, à charge pour le Gouvernement d'en fixer le seuil par arrêté. Le Sénat l'a rétablie. Si nous partageons son analyse et son objectif, nous ne soutenons pas la mesure qu'il propose : outre les problèmes liés à tout effet de seuil, tout porte à craindre que certains chiens n'en viennent à subir de mauvais traitements qui ne pourraient qu'aggraver leur dangerosité, à moins qu'ils ne soient purement et simplement abandonnés. Le seuil envisagé était un poids de 30 kilogrammes : concrètement, cela conduirait à envoyer plus de 2 millions et demi de Français chez le vétérinaire ! Cela nous semble excessif.

Constatant ce net désaccord avec le Sénat, j'ai recherché une solution de compromis, étudié des critères plus pertinents, envisagé une expérimentation. Après une nouvelle concertation avec les professionnels, il nous a paru raisonnable de retirer pour le moment cette disposition et de laisser l'observatoire faire son travail de veille, ce qui nous permettra peut-être de déterminer, plus tard, de nouveaux critères. C'est pourquoi, comme en première lecture, la commission a supprimé, à l'unanimité – je tiens à le saluer –, l'article 4 bis.

Enfin, le texte a renforcé les sanctions contre les agents de sécurité ne respectant pas les règles d'utilisation des chiens, afin de les rendre conformes au barème prévu par la loi de 1983 sur les activités de sécurité privée ; cela vise plus particulièrement les travailleurs indépendants. Il me semble toutefois important de prévoir la possibilité de retirer leur agrément aux agents cynophiles détenant leurs chiens à domicile dans des conditions indignes, ce qui constitue une source majeure d'insécurité. La commission a donc adopté un amendement en ce sens.

Les autres points du texte restant en discussion ont fait l'objet d'améliorations techniques : clarifications rédactionnelles, harmonisation des délais d'entrée en vigueur.

Je voudrais enfin, madame la ministre, vous remercier d'avoir veillé à ce que les décrets d'application soient préparés dès la navette, afin que le texte entre en vigueur dans les meilleurs délais.

Notre commission vous propose donc, mes chers collègues, d'adopter conformes les articles restant en discussion, à l'exception des articles 4 bis et 13 bis, relatifs au poids, et 5 ter sur les vigiles. Seuls trois articles resteraient ainsi en discussion en commission mixte paritaire.

Nous achevons la discussion d'un texte qui articule, Mme la ministre vient de le souligner, les notions de liberté et de sécurité, de prévention et de répression. Nous sommes conscients que nous pénétrons au coeur des familles et des relations affectives. Le chien est avant tout une compagnie ; il doit rester un élément de bonheur. C'est ce que nous avons souhaité sauvegarder à travers ce texte, aussi équilibré que possible, tout en améliorant la sécurité de nos concitoyens et en ne perdant jamais de vue le déséquilibre physique entre l'enfant et le chien. Bien entendu, la vigilance des maîtres reste la meilleure des préventions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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