Je souhaite en effet attirer l'attention du Gouvernement sur les conditions de fonctionnement du TGV Est qui, un an après sa mise en service, présente encore de nombreuses insuffisances.
Il faut d'abord rappeler que la réalisation de cette ligne ouvrant sur l'Europe un couloir de circulation essentiel n'a été entreprise que très tardivement. La SNCF et le Gouvernement avaient mis en avant des raisons financières pour contraindre – et ce fut une première en France – les collectivités territoriales, et notamment les régions, à cofinancer l'investissement de la voie. Par exemple, la seule région Lorraine et ses contribuables ont déboursé plus de 250 millions d'euros pour la réalisation de la première phase de la LGV Est.
Aujourd'hui, obtenir une réservation relève souvent de l'exploit, les tarifs ont explosé et les dessertes restent incomplètes. La saturation de l'offre, les voyageurs peuvent en témoigner : paradoxalement, cette liaison que l'on craignait comme peu rentable connaît aujourd'hui des taux de remplissage exceptionnels. Les tarifs, dont la variabilité défie tout esprit cartésien – dans le même train, un billet de seconde est parfois plus cher qu'un billet de première ! –, ont explosé de plus de 40 %, et deviennent dissuasifs pour les usagers étudiants, retraités et les familles, qui reprennent leur voiture ou renoncent à se déplacer. Quant aux dessertes, le bassin de Longwy-Briey et 400 000 habitants de ce ressort, incluant le sud du Luxembourg et le sud-est de la Belgique, n'ont pas de solution ferrée pour se rendre à Paris et accéder au réseau TGV. Quelles sont les intentions du Gouvernement et de la SNCF sur ces sujets ?
Par ailleurs, pouvons-nous disposer d'un bilan financier précis de la première année d'exploitation ? Devons-nous craindre une nouvelle hausse annoncée des tarifs de RFF, qui remettrait plus encore les gens dans leur voiture ? La SNCF persistera-t-elle à refuser de remettre en service quelques trains classiques à tarifs normaux pour les plus modestes ou les moins pressés ? Enfin, les habitants du nord de la Meurthe-et-Moselle, des bassins de Longwy-Briey devront-ils encore attendre la Saint-Glinglin pour avoir un accès TGV comme tout le monde ?
Le TGV Est européen participe à l'aménagement du territoire. Les taux de remplissage enregistrés après presque un an de service, supérieurs aux prévisions initiales qui avaient fondé le niveau de contribution des collectivités territoriales, doivent inciter à le concevoir comme tel. Aussi, est-il pertinent de considérer l'économie globale et mutualisée du TGV Est européen pour envisager des dessertes complémentaires par la SNCF des territoires oubliés à ce jour, comme Longwy, dans l'esprit de la clause de « bonne fortune » contractuelle.
Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire, les contribuables locaux alsaciens, champardennais et lorrains sont les seuls à avoir financé leur TGV. Ne leur infligez pas une double peine en refusant de voir dans le TGV Est autre chose qu'une machine à produire des dividendes, pour l'État aujourd'hui ou pour d'autres actionnaires demain. Faites-en un vrai outil au service de tous, un outil d'aménagement du territoire pour favoriser les transports collectifs que les Français de l'Est méritent : en effet, les rails d'une grande partie des réseaux ferrés de France et bien d'autres ont été et sont encore fabriqués en Lorraine.