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Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 10 juillet 2009 à 9h30
Dérogations au repos dominical — Article 2, amendements 192 193 194 203

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Vidalies :

Sur votre invitation pressante, monsieur le président, je vais intervenir. (Sourires.)

Il s'agit en l'occurrence de l'organisation à l'intérieur des PUCE. Parmi les différents alinéas dont nous demandons la suppression, je m'intéresserai à ceux qui traitent des contreparties pour les salariés.

Le mécanisme que vous avez imaginé comporte la signature d'un accord collectif, préalable à la demande même d'ouverture, ou, à défaut, un référendum. Si cette dernière procédure est retenue, il y a doublement du salaire, mais seulement dans cette hypothèse.

Le choix que vous avez fait pose de multiples questions, ainsi que la rédaction du texte.

D'abord, pourquoi avoir choisi un accord collectif, entreprise par entreprise ? Puisque vous délimitez des zones, n'était-il pas préférable d'organiser une sorte de négociation territorialisée, au niveau de cette zone ? N'y voyez aucune malignité de ma part, mais je pense que c'eût été un vrai garde-fou. Vous voulez identifier ces zones, donner une autorisation particulière : encore faut-il que les règles soient les mêmes à l'intérieur de ces zones !

Vous avez donc choisi la négociation d'entreprise, avec un accord collectif et, à défaut, un référendum. J'appelle l'attention de notre assemblée sur le caractère particulier de la rédaction, s'agissant de ce dernier point. Spontanément, on imagine que la procédure consistera, pour le chef d'entreprise, à interroger tous les salariés pour savoir si l'on met en place, ou non, le travail du dimanche. Or le texte tel qu'il est rédigé propose un référendum très particulier, puisqu'il est « organisé auprès des personnels concernés par cette dérogation au repos dominical ». Autrement dit, ne seront consultés que ceux qui sont susceptibles de travailler le dimanche, et donc les seuls volontaires ! C'est une conception très particulière du droit social que de ne s'appuyer, pour élaborer une règle collective, que sur une partie du personnel… C'est une violation manifeste de toutes les dispositions relatives aux accords collectifs.

Ensuite, le texte indique qu'après le référendum, un accord collectif pourra remettre en cause la règle. Mais, puisque vous avez décidé que la négociation se déroulera au niveau de l'entreprise, qui va négocier ? Dans les entreprises dépourvues d'instances de négociation, soit dans les très petites entreprises, il n'y a personne pour négocier et établir la règle. Je suppose que c'est pour cette raison que vous avez prévu le référendum !

Par ailleurs, sur quoi va porter la négociation ? Je ne suis pas d'accord avec M. Vercamer : on ne peut pas faire de l'angélisme en matière de négociation, surtout lorsqu'elle a lieu au plus petit niveau. Je partage votre sentiment, monsieur Vercamer, pour ce qui est des négociations interprofessionnelles ou des négociations de branche, car les gens y sont à égalité, et je respecte leurs conclusions même si je ne suis pas d'accord. En revanche, au niveau d'une entreprise, et de surcroît quand ne sont consultés que les salariés concernés, le poids qu'aura le lien de subordination sur la capacité de ces salariés à négocier me trouble fortement.

J'ignore si la rédaction du texte reflète réellement la volonté du rapporteur – je ne crois pas que ce soit le cas. En revanche, ce que vous avez dit ce matin, monsieur le ministre, m'a beaucoup inquiété et c'est pourquoi je l'ai repris dans mon propos préliminaire.

Tout le monde avait compris qu'il y avait un socle : le salarié est payé double et bénéficie d'un repos compensateur. Mais il était possible de négocier parce qu'on peut imaginer autre chose. Cependant, monsieur Vercamer, quand vous dites que l'on peut imaginer autre chose, vous pensez à quelque chose d'équivalent. Nous pourrions en être d'accord, la procédure est connue : on négocie quelque chose d'équivalent et le juge arbitre. Mais le problème est de savoir s'il sera possible de négocier des dispositions en retrait. Sera-t-il possible de négocier une majoration de seulement 0,1 % ou l'absence de repos compensateur ? En l'état du texte, oui.

Vous m'objecterez : pourquoi les salariés accepteraient-ils ? À cause de la pression, bien sûr ! Vous auriez prévu une négociation par zones, je ne serais pas inquiet. Mais dans le cadre d'un accord d'entreprise, un employeur peut convoquer ses salariés qui travaillent le dimanche pour leur dire qu'en raison de la crise de l'électroménager, par exemple, il ne peut plus les payer double et qu'ils doivent y renoncer s'ils veulent garder leur emploi. Les salariés vont signer !

Comme ils signeront, le voisin convoquera alors ses propres salariés pour leur signifier que, les salariés d'à côté n'en bénéficiant plus et la concurrence étant ce qu'elle est, si l'on veut conserver des clients, donc maintenir les emplois, ils doivent signer aussi.

Le diable est dans les détails. On ne peut pas affirmer sur les ondes que le paiement double est garanti dans les PUCE et adopter un dispositif qui, aujourd'hui sur le plan technique, ouvre une telle brèche, autorisant à remettre progressivement en cause ces contreparties. Il faut clairement préciser que celles-ci sont un socle, un minimum. C'est ce que les Français ont compris. Je croyais que telle était l'intention du rapporteur, qui nous répondra sur ce point. C'était jusqu'à présent le sens de la communication du Gouvernement, mais, monsieur le ministre, vous avez été objectif et avez dit autre chose. Le repos compensateur et le doublement du salaire doivent être acquis dans ces PUCE dont nous n'approuvons certes pas la création. La négociation ne doit porter que sur quelque chose en plus ou quelque chose d'équivalent mais ne devra en aucun cas pouvoir remettre en cause ce qui, pour l'instant, apparaît acquis dans la loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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