Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que les effets négatifs de la crise bancaire et financière générée par celle des subprimes se font sentir sur les marchés de l'immobilier et de la construction, le Gouvernement fait le choix inacceptable d'un désengagement de l'État en matière de logement. Pour endiguer la crise, il intervient ; en revanche, il se retire de la politique publique en faveur du logement, comme en témoigne une baisse des crédits sans précédent.
« Mon premier budget véritable sera celui de 2009. » C'est en ces termes que, l'an dernier, la ministre avait pris ses distances avec le budget pour 2008, déjà en régression. Or son budget pour 2009 est bien pire, puisqu'il consacre le désengagement financier de l'État et implique la dénaturation et donc, à terme, la destruction des instruments d'intervention, lesquels démultipliaient pourtant l'efficacité de l'action publique. Je pense au 1 % logement, à l'ANRU, à l'ANAH et aux bailleurs sociaux.
Non seulement ce budget est en totale contradiction avec la philosophie qui a inspiré le droit au logement opposable et qui a fait de l'État le garant de ce droit, mais il viole les engagements législatifs, réglementaires et conventionnels intervenus ces dernières années. Que valent, en effet, la parole de l'État et celle de ses ministres, que valent la signature de l'État et celle du Gouvernement, quand ce budget remet en cause tous les engagements pris dans les lois « Renouvellement urbain », « Cohésion sociale », ENL et DALO ? Car il préfigure, selon une procédure scandaleusement inversée, la loi de prétendue mobilisation pour le logement, que l'Assemblée nationale examinera dans quelques semaines et qui remettra en cause toutes les missions et tous les modes de financement partenariaux de l'ANRU et de l'ANAH, ainsi que toutes les conventions passées avec l'UESH pour le 1 % et avec l'Union des HLM pour les bailleurs sociaux, qu'elles aient été signées par la ministre elle-même – qui les a d'ailleurs surmédiatisées, comme à Lyon en septembre 2007 ou au mois de décembre dernier – ou par ses prédécesseurs. Et vous prétendez vouloir mobiliser ces partenaires !
Comment peut-on parler de respect du Parlement, et singulièrement de l'Assemblée nationale, quand le projet de loi de finances pour 2009 comporte une réduction de la participation budgétaire de l'État au financement de l'aide à la pierre et la suppression du financement des actions concernant les patrimoines dégradés et la rénovation urbaine, alors que celle-ci est à la charge de l'État en vertu de la loi, de ses engagements conventionnels et des contrats qu'il a souscrits avec ses partenaires, collectivités locales et opérateurs ?
Vous invoquez une loi qui modifie les compétences, les modes de gouvernance et de fonctionnement de ces établissements pour légitimer vos désengagements budgétaires, mais cette loi n'a pas encore été examinée par l'Assemblée et n'a donc pas encore été adoptée par le Parlement ni, a fortiori, promulguée ! Et si le projet de loi de mobilisation pour le logement n'était pas adopté ? Vous ne pouvez pas davantage alléguer des conventions à venir, des accords ou des contrats négociés, dont notre assemblée ignore le contenu et qui ne peuvent constituer un engagement budgétaire de l'État, que la représentation nationale est chargée d'élaborer puis de voter avant d'en contrôler, demain, l'exécution !
Le projet de budget de la mission « Logement » est donc entaché d'un vice rédhibitoire. Il est insincère et fallacieux au regard du cadre législatif, réglementaire et conventionnel des engagements actuels de l'État. Ce budget est un véritable cataclysme, car c'est un budget de renoncement, au moment où l'État devrait prendre l'initiative d'une véritable offensive.
Vous avez commencé à dépouiller l'État de tous les instruments lui permettant d'agir et d'accompagner les actions publiques en faveur du logement. Outre la réforme du livret A, qui s'inscrivait déjà dans cette inavouable logique, je pourrais citer la baisse bien supérieure aux 7 % officiellement annoncés ; les objectifs impossibles à atteindre – 547 millions d'euros ne suffiront pas pour financer les 78 000 logements sociaux annoncés, dont 20 000 PLA-I et 50 000 PLUS – ; la non-prise en compte de l'augmentation de plus de 4 % du coût de la construction depuis trois ans ; l'absence de revalorisation, depuis trois ans également, de la subvention unitaire moyenne octroyée aux opérations de PLA-I et de PLUS, qui perd donc une partie de son efficacité en tant qu'accompagnement financier ; la réduction de moitié de l'enveloppe de la surcharge foncière, qui tombe ainsi de 260 millions d'euros à 143 millions d'euros – votre objectif est-il que les bailleurs sociaux construisent moins ou que les communes qui abondaient ces financements à égalité paient davantage ? – ; la suppression des financements PALULOS servant aux opérations de réhabilitation : il n'y a plus de financement de droit commun de la réhabilitation. Bravo ! Vous préparez les quartiers insalubres, déstructurés et socialement abandonnés qui feront l'objet de grands plans Marshall pour les banlieues en 2020 !
Quant au 1 %, il s'agit d'un alibi dont personne n'est dupe. Le transfert, du 1 % vers la politique publique du logement, d'une somme déjà affectée au préalable au logement par les partenaires sociaux n'apportera aucun moyen financier supplémentaire en faveur du logement en 2009. En ponctionnant les fonds du 1 %, vous prenez la responsabilité de déstructurer cet instrument, en l'asséchant par la privation des retours sur emprunts, qu'il gérait et réinvestissait dans l'accompagnement des opérateurs du logement.
Et puis, dans trois, quatre ou cinq ans, comment les actions de l'ANAH ou de l'ANRU seront-elles financées ? À cette question, que tout le monde se pose, vous n'apportez aucune réponse.
En fait, c'est sur le dos des locataires que vous équilibrez votre budget : relèvement de deux euros de la participation forfaitaire des ménages, non-réactualisation des aides personnelles, période de carence pour le versement des aides, maintien du seuil de non-versement de quinze euros, évaluation forfaitaire pour les moins de 25 ans, non-réactualisation des barèmes. Voilà les mesures d'ajustement que vous prenez sur le dos des plus pauvres, alors que la situation économique se dégrade et que baisse le pouvoir d'achat des ménages les plus vulnérables !
Comment ne pas mettre en parallèle ce constat désolant et celui-ci, que je ne fais qu'énoncer sans le commenter : les dépenses fiscales inscrites dans le budget pour 2009 augmentent de plus de 17 % !