Je souhaitais interroger M. le Premier ministre sur les conséquences de la réforme de l'État sur l'aménagement du territoire, notamment dans les villes petites et moyennes et les zones rurales.
Chacun convient que la réforme de l'État est urgente et nécessaire. Le Gouvernement a donc raison de vouloir la mener à son terme. Reste que, pour qu'elle soit acceptée et comprise, il faut veiller à répartir les efforts sur l'ensemble du territoire. À cet égard, la réforme de la carte judiciaire, qui a suscité une certaine tension, même dans les rangs de la majorité, ne peut que nous inquiéter.
Nous savons qu'elle sera suivie d'une réforme de la carte hospitalière et que, de manière légitime, tous les ministères devront bientôt revoir leur organisation. Si chacun le fait indépendamment des autres, ce sont toujours les mêmes petites villes et les mêmes zones rurales qui seront sacrifiées. Celles qui ont perdu cette année un tribunal d'instance perdront l'an prochain un hôpital de moyen séjour et, l'année suivante, une caserne militaire, alors même qu'elles sont frappées par les délocalisations. Celles-ci, on le sait, sont particulièrement importantes dans les villes moyennes ou les petites villes des zones rurales où l'activité économique s'était fortement implantée dans les années soixante.
Si l'on tronçonne ainsi la réforme de l'État, certains territoires connaîtront une crise aiguë, sans pour autant que les territoires urbains, notamment les banlieues, bénéficient d'un traitement de faveur. Je rappelle ce qui s'est passé pour la carte judiciaire : on nous a assuré que la suppression des tribunaux était menée dans une optique de redéploiement, afin de créer des tribunaux d'instance là où ils manquaient. Malheureusement, dans l'Essonne, les 160 000 habitants du Val d'Yerres et du Val de Seine n'ont aucun accès à la justice et, malgré l'existence de cités difficiles, le Gouvernement n'a annoncé aucune création. Vous comprendrez donc l'inquiétude des zones rurales et urbaines, qui craignent une réforme de l'État à la hache, appliquée sans concertation ni organisation.
C'est pourquoi j'appelle votre attention sur la nécessité d'établir des schémas départementaux ou régionaux d'aménagement du territoire, qui veilleraient à répartir les efforts de manière équitable entre les petites villes d'un même territoire, afin que ce ne soient pas toujours les mêmes qui paient, souvent très cher, le prix de la réorganisation légitime des services publics. Peut-on savoir ce que le Gouvernement entend faire pour coordonner au niveau régional l'application des réformes des différents ministères ?