Nous sommes victimes – et pour certains acteurs – de ce que Yves Durand appelait la « législation émotion ». Un enfant de moins de trois ans est assassiné : il faut une loi pour les assassins des enfants de moins de trois ans. Une personne de plus de quatre-vingt-quinze ans est assassinée : il faut une loi pour les assassins des personnes de plus de quatre-vingt-quinze ans. Quelqu'un se fait tuer en traversant dans les clous : il faut une loi pour les assassins des gens qui traversent dans les clous.
On fait des lois dans l'émotion sans en mesurer les conséquences. Puis, on s'aperçoit, au bout du compte, que beaucoup de ces lois engendrent des dysfonctionnements juridiques. C'est la législation émotion !
Troisième exemple, toujours dans le domaine de la justice. Il y a quelques semaines, Mme la garde des sceaux a mis en oeuvre une réforme de la carte judiciaire. Elle a supprimé, dans un grand nombre de tribunaux, les juges d'instruction pour créer des pôles de l'instruction, regroupés dans un certain nombre de tribunaux. Cette réforme a été mise en place. Et patatras ! Quelques semaines après, le Président de la République annonce que l'on va supprimer les juges d'instruction. La réforme faite il y a quelques semaines est déjà caduque ! Que se serait-il passé si nous avions eu la sagesse d'évaluer cette réforme ? Ne devrait-on pas évaluer tranquillement, sereinement, les conséquences des actes accomplis par un certain nombre de ministres et que le Parlement cautionne parfois ?
Cet amendement a pour but de donner du temps au temps, d'évaluer l'action publique, de mesurer les conséquences de nos actes. Il me semble, monsieur le président, que c'est plus que jamais d'actualité.