Cette proposition de loi est censée se cantonner à une simplification, à une clarification et à un allégement du droit, comme l'indique son titre, mais en dépit de celui-ci, elle procède à des modifications de fond de notre législation. Il ne s'agit pas simplement de dépoussiérage, mais de mesures politiques, tendant à modifier la vie de nos concitoyens. Ce gouvernement, qui prétend porter haut les couleurs de la réforme, semble désormais obligé de cacher son action pour ne pas susciter un surcroît de colère parmi nos concitoyens.
Parmi les réformes de fond dont ce texte est porteur, je voudrais m'arrêter sur trois articles qui bouleversent le statut des personnels des entreprises de transport, parmi lesquels celui des agents de la SNCF ou de la RATP.
Ainsi, l'article 14 quinquies exclut les entreprises de transport des bénéfices de la loi d'orientation des transports intérieurs de 1982 – la LOTI –, qui avait notamment créé le statut d'EPIC de la SNCF et créé un droit au transport devant permettre de se déplacer « dans des conditions raisonnables d'accès, de qualité et de prix ainsi que de coûts pour la collectivité ». La commission au Sénat avait pourtant demandé le retrait de cet article, et le Gouvernement s'en était remis à la sagesse de cette assemblée. Le rapport de notre collègue Étienne Blanc condamne sans appel cet article.
Ensuite, l'article 15 octies est très clair, tout comme le rapport de M. Blanc à son sujet : « Il vise à rendre directement applicable la quatrième partie du code du travail aux entreprises de transport dont le personnel est régi par un statut. » C'est-à-dire que le statut spécifique des agents de la SNCF ou de la RATP en termes de sécurité ou de médecine du travail pourrait être supprimé. À ce sujet, ces agents expriment leur plus vive inquiétude : seul le maintien de mesures particulières prévues par la réglementation actuelle est à même de garantir un haut niveau de sécurité et d'aller dans le sens d'une plus grande protection des personnels.
Ce changement inopiné de statut, réalisé brutalement au prétexte d'une clarification du droit, est décidé d'en haut, sans la moindre concertation avec les personnels concernés ou avec leurs représentants syndicaux. Il néglige l'extrême spécificité des conditions de travail des agents de la SNCF ou de la RATP, leur nécessaire protection et la prévention des risques inhérents au secteur ferroviaire : risques électriques, coactivité ferroviaire, règles d'incendie et de désenfumage, travail en hauteur ou encore règles d'éclairage.
Enfin, l'article 35 ter, déjà évoqué tout à l'heure, autorise le Gouvernement à procéder par ordonnance à la création de la partie législative du code des transports.
C'est donc un dispositif complet qui est créé pour réformer, de façon totalement verrouillée et en confisquant tout débat, le statut des agents des entreprises de transport. Il n'y a pas eu de négociation avec les partenaires sociaux ; il n'y aura pas non plus de débat parlementaire, puisque le Gouvernement s'arroge la possibilité de faire le droit par ordonnance.
C'est le Gouvernement lui-même qui a introduit cet amendement en commission. Ce gouvernement qui ne cesse de répéter qu'il veut « revaloriser le rôle du Parlement » amende donc les propositions de loi pour se donner le droit de légiférer par ordonnance, quitte à demander à sa majorité de ratifier ses textes quelques mois plus tard.
Les députés communistes, républicains et du parti de Gauche protestent contre cette démolition des statuts des personnels des entreprises de transport, cachée derrière une prétendue « simplification du droit » : ils voteront contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)