L'article 3 est symbolique du travail de parachèvement que constitue ce projet de loi, dans la continuité des lois du 26 novembre 2003, du 10 décembre 2003 et du 24 juillet 2006.
Conformément à l'engagement présidentiel, ce texte témoigne d'une démarche cohérente et pragmatique. En effet, ce nouveau volet législatif est le fruit d'une action qui aura permis, en l'espace de quatre années, de rénover, de réformer, d'adapter, d'équilibrer notre politique d'immigration, en la traitant sous ses différents aspects et en l'articulant autour de principes forts : justice et humanité, réalisme et fermeté.
Notre action est fortement empreinte de pragmatisme en ce qu'elle s'appuie sur un véritable retour d'expérience. En légiférant par étapes, selon une logique claire allant de la maîtrise des flux de l'immigration à l'intégration, les parlementaires et le Gouvernement ont, à la lumière des faits, le recul nécessaire pour procéder au réajustement de certaines dispositions. C'est notamment le cas de l'article 2 relatif au renforcement de la condition de ressources exigée pour le regroupement familial.
Dans le prolongement de l'article 2 et de l'article 1er, consacré à la préparation du parcours d'intégration, l'article 3, qui s'attache à l'intégration familiale, constitue un point essentiel. La création du contrat d'accueil et d'intégration pour la famille, par lequel les parents s'obligent à suivre une formation sur leurs droits et devoirs, n'a rien d'idéologique, mais résulte au contraire de l'observation d'une réalité quotidienne.
Dans le Vaucluse, où l'immigration familiale a été importante, les élus locaux, les acteurs sociaux, les responsables éducatifs connaissent en effet toute la difficulté de l'intégration des familles et surtout tous les dangers de leur non-intégration. Le défi de l'intégration est celui de la cohésion même d'une communauté humaine, au sens large du terme. Le contraire de l'intégration, c'est la ghettoïsation urbaine, sociale, économique, intellectuelle et culturelle ; c'est le développement de zones de non-droit où les repères familiaux, les codes sociaux, les principes de mixité, de parité et d'égalité des chances volent en éclat. Les premières victimes de l'échec en ce domaine sont les familles elles-mêmes et tous ceux qui aspirent à vivre paisiblement, à éduquer leurs enfants dans le respect des lois, à s'élever par le travail et les études.
Nombreux sont ceux d'entre nous qui, dans l'exercice de leur mandat, rencontrent, chaque semaine ou presque, des parents démunis face à des enfants qu'ils ne maîtrisent pas, des mères ou des jeunes filles enfermées dans des chemins communautaires dont elles ne sortiront jamais. Parfois, les parents sont d'autant plus dépassés que, arrivés en France à l'âge adulte, ils se heurtent aux barrières de la langue et de l'écriture. Pour certaines démarches, ils doivent s'en remettre à leurs enfants, lesquels deviennent alors l'interface entre les institutions, les administrations et la famille. De telles situations peuvent évidemment poser le problème de l'autorité et de la responsabilité parentale vis-à-vis des siens et de la société. C'est cela, l'échec de l'intégration.
Monsieur le ministre, nous ne pouvons pas nous permettre de laisser sacrifier une nouvelle génération. Aussi, l'obligation d'une connaissance minimale de notre langue, des valeurs républicaines, des devoirs et des droits des parents est-elle une condition préalable à l'immigration et constitue-t-elle un réel progrès dans la conception même du parcours d'intégration. Acquérir un bagage minimum, adhérer au contrat d'accueil et d'intégration ne constitue pas un renoncement de la famille à sa culture d'origine, mais une ouverture sur son pays d'accueil et une acceptation des fondements sociaux et politiques de ce dernier. Il s'agit là d'une démarche indispensable.
Depuis des années, les élus, les travailleurs sociaux, les animateurs et les éducateurs se battent sur le champ de l'intégration : alphabétisation, soutien scolaire, dispositif d'animation, aide à la réalisation de projets personnels et professionnels, politique de la ville. À n'en pas douter, les outils se sont étoffés et améliorés au fil du temps. Pourtant, force est de constater que leurs chances de succès restent aléatoires et qu'ils nécessitent une incroyable mobilisation de toutes les énergies face à des situations parfois irrattrapables. D'une part, ces dispositifs interviennent en aval de l'installation sur notre territoire, d'autre part, ils relèvent de l'adhésion volontaire des familles, ce qui implique l'existence d'une volonté forte pour aller à la rencontre des parents, leur rappeler leurs obligations envers leurs enfants, les persuader du bien-fondé de telle ou telle mesure, les convaincre de l'utilité de tel ou tel dispositif, les encourager dans telle ou telle voie.
L'article 3 du projet de loi, à l'instar des articles 1er et 2, a d'abord la vertu de l'anticipation, de la préparation. Il ne s'agit plus de courir après l'objectif d'intégration, mais de créer les conditions de sa réussite.
Il présente ensuite l'avantage d'instituer de véritables sanctions en cas de non-respect des stipulations du contrat d'accueil et d'intégration pour la famille. La possibilité de mettre sous tutelle les allocations familiales, qui participent de l'exercice même de la responsabilité parentale, apparaît parfaitement justifiée lorsque cette responsabilité fait défaut ou lorsque le contrat d'accueil est manifestement ignoré. À ce titre, je me réjouis des amendements présentés par notre rapporteur, Thierry Mariani, et adoptés en commission : ils donnent de la portée au dispositif de l'article 3 et sont gages d'efficacité.