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Intervention de Abdoulatifou Aly

Réunion du 7 novembre 2008 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2009 — Outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAbdoulatifou Aly :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-moi de vous livrer d'emblée quelques observations générales sur les crédits de la mission « Outre-mer » pour 2009.

Je tiens, en premier lieu, à saluer un certain nombre de bonnes mesures de ce projet de loi de finances. Je pense, par exemple, au soutien renouvelé au service militaire adapté dans nos départements et collectivités d'outre-mer. Il s'agit d'un dispositif particulièrement intéressant et utile pour aider nos jeunes à se trouver un avenir. Je pense aussi à tout ce qui va dans le sens de la continuité territoriale, et que nous soutenons.

Je veux également formuler ici une remarque concernant les dossiers chauds, qui ont largement nourri les polémiques ces dernières semaines. Je ne reviens pas sur l'ITR, réforme déjà votée dans le PLFSS, d'ailleurs sans les voix de nos collègues UMP de la Réunion. Concernant la défiscalisation, j'approuve l'orientation donnée prioritairement au logement social mais je ne peux que déplorer qu'elle ne s'applique pas totalement à Mayotte.

Globalement, je regrette l'ambition insuffisante de votre gouvernement en direction de l'outre-mer. Si les crédits de paiement augmentent en valeur absolue de 1,72 à 1,88 milliard d'euros, cette hausse, comme l'a relevé le rapporteur spécial Jérôme Cahuzac, est en grande partie fictive, ou du moins sans effet concret, car liée au transfert des contrats de projets et au rattrapage de l'endettement de l'État auprès des organismes de sécurité sociale au titre des exonérations de charges, d'ailleurs inapplicables à Mayotte. Un de vos prédécesseurs, monsieur le secrétaire d'État, et qui plus est de la même sensibilité politique que vous, vient d'ailleurs de s'émouvoir de ce manque de prise en compte des problématiques ultramarines.

J'en viens à la deuxième partie de mon propos, à ce que j'appellerai les urgences de Mayotte.

Bien sûr, des besoins se font ressentir dans tous nos outre-mers, mais la situation est particulièrement critique, parfois dramatique, dans notre île, pour une raison simple : le droit et la loi républicaine sont quotidiennement bafoués par celui-là même qui devrait les appliquer rigoureusement : l'État.

Je citerai deux dossiers révélateurs.

Premier dossier : l'éducation. Les principes de l'égalité républicaine sont gravement violés, avec une formation déficiente des enseignants du primaire, une dotation spéciale instituteurs toujours non appliquée à ce jour, une pénurie inadmissible de locaux et de moyens matériels, et j'en passe... Dois-je rappeler que le préambule de la Constitution de 1946 proclame que « l'organisation de l'enseignement public, gratuit et laïc, à tous les degrés, est un devoir de l'État » ?

Deuxième dossier : l'état civil. Le défaut de délivrance aux Mahorais de leurs titres d'identité crée une situation catastrophique, contraire aux principes fondamentaux de la République et préjudiciable au développement de Mayotte. J'ai donc déposé un amendement, qui sera examiné tout à l'heure, pour tenter de remédier rapidement à cette situation. Mes chers collègues, je vous propose de vous livrer à un exercice inhabituel : fermez les yeux et, l'espace de quelques secondes, mettez-vous à la place d'un compatriote mahorais. Imaginez-vous sollicitant la délivrance d'un extrait d'acte de naissance que l'administration se trouve dans l'incapacité de vous délivrer depuis sept années et pensez à ce que peuvent en être les conséquences dans votre vie quotidienne ! Ce n'est pas une vue de l'esprit, c'est la réalité vécue par des dizaines de milliers de Français de Mayotte, qu'ils se trouvent en métropole, à la Réunion ou dans leur île.

Enfin, j'en arrive à ce qui constituera la grande actualité de l'outre-mer en 2009 : la départementalisation de Mayotte.

Sur la méthode d'abord, je rappelle à notre assemblée que, suite à la résolution adoptée à l'unanimité par le conseil général de Mayotte le 18 avril dernier, un référendum local est annoncé en mars prochain. Il est donc urgent, monsieur le secrétaire d'État, d'organiser un débat dans les deux assemblées, comme le prévoit la loi organique du 21 février 2007. Je m'en suis d'ailleurs ouvert formellement au président de l'Assemblée nationale et au Président de la République lui-même. Je souhaite donc que vous puissiez me répondre précisément sur l'opportunité de ce débat. Pour ma part, j'ai pris l'initiative d'organiser, le week-end dernier, le congrès des élus de Mayotte, à l'occasion du cinquantenaire du projet de départementalisation. Ce fut un moment privilégié d'échanges entre Mahorais, mais aussi entre nous et nos amis réunionnais et métropolitains. Nous tous avons plaidé pour un vrai département, dans la plénitude de ses prérogatives, compétences et moyens.

Pour en revenir au projet de loi de finances, il serait particulièrement bienvenu que les moyens financiers alloués en 2009 à ce processus de départementalisation soient clairement identifiés.

Monsieur le secrétaire d'État, c'est à la lumière de vos réponses que je me prononcerai globalement sur le vote de ce budget. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

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