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Intervention de Michel Barnier

Réunion du 13 novembre 2007 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2008 — Agriculture pêche forêt et affaires rurales

Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche :

Ce plan est à la fois très difficile à mettre en oeuvre et totalement nécessaire. Nous y consacrerons sur cinq ans 86 millions d'euros, dont 68 millions exclusivement à l'agriculture, dans le cadre du programme d'intervention territoriale de l'État. L'objectif, c'est de ramener les eaux des bassins versants concernés à un taux de nitrates conforme à la norme.

Mesdames et messieurs les députés, au-delà de cette très grande et fondamentale priorité qu'est l'agriculture durable, la seconde priorité de ce budget est celle de la pêche durable et de l'aquaculture.

Je le dis à votre rapporteur Gilles d'Ettore, que je connais bien : je crois en l'avenir de ces deux secteurs qui contribuent à l'équilibre de nos littoraux en métropole et outre-mer, et qui se trouvent, eux aussi, au coeur du défi alimentaire. Je crois en leur capacité de création de richesses. Cette conviction est aussi celle du Président de la République, qui a tenu à la dire lui-même, au Guilvinec, à l'ensemble des marins pêcheurs de métropole et d'outre-mer. C'est aussi celle du Premier ministre.

Nous devons consacrer à ce secteur beaucoup d'efforts pour l'aider à relever trois défis.

Le défi de l'environnement et de la ressource, qui doit être gérée avec précaution.

Le défi de l'économie, avec un problème réel, évident, grave, de viabilité de ce secteur que la crise du gazole a aggravé. Une vraie crise, a dit Louis Guédon avec beaucoup de justesse.

Le défi de la réglementation, avec la politique commune de la pêche, un cadre à la fois exigeant et nécessaire. Imaginez, s'agissant de ces ressources halieutiques qui ne connaissent naturellement pas les frontières politiques, ce que serait la situation si nous n'avions pas le cadre de cette politique commune de la pêche et si c'était le chacun pour soi ou le chacun chez soi qui l'emporte ! Il nous faut donc un cadre exigeant et nécessaire, que je veux mettre au clair et auquel je veux donner davantage de lisibilité.

Pour mettre nos actes en accord avec nos convictions, je vous propose de consolider les moyens consacrés à la pêche à hauteur de 60 millions d'euros. Il s'agit de poursuivre l'effort entrepris en 2007, année qui avait vu le budget de la pêche augmenter de 50 %. À ce montant, s'ajoutent plus de 30 millions annuels de crédits du Fonds européen de la pêche.

De plus, en concertation avec mon collègue Jean-Louis Borloo, dont dépend l'administration des affaires maritimes, nous allons renforcer substantiellement les moyens de la direction des pêches de mon ministère.

Enfin, pour donner à ces activités la perspective qui leur manque, la lisibilité, je viens de lancer deux missions sur la pêche et sur l'aquaculture.

La première, confiée à M. Paul Roncière, conseiller d'État et ancien secrétaire général de la mer, s'attachera à trois objectifs principaux : une meilleure structuration de la profession ; la gestion de la ressource et les droits à produire ; le contrôle des pêches – M. Guédon et M. D'Ettore ont demandé des contrôles européens rigoureux, mais équitables entre tous les pays de l'Union européenne.

La seconde mission, consacrée au développement durable de l'aquaculture, est interministérielle puisqu'elle associe le ministère de l'agriculture et de la pêche et le ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables. Jean-Louis Borloo et moi-même l'avons confiée à votre ancienne collègue, Mme Hélène Tanguy, maire du Guilvinec.

Sur les conséquences de la hausse du gazole pour les entreprises de pêche, dans le prolongement des décisions annoncées par le Président de la République au Guilvinec et des décisions prises le 7 novembre, dans nos bureaux, avec les professionnels de la pêche, nous nous sommes engagés à mettre en oeuvre rapidement, en concertation avec les autres membres du Gouvernement et avec la Commission européenne, des décisions qui permettront de conforter la filière de la pêche. Je veux dire à M. D'Ettore et à M. Guédon que j'ai simplement besoin de quelques semaines pour travailler sur ces propositions. Naturellement, j'informerai l'Assemblée nationale dès qu'elles seront arrêtées.

Enfin, nous avons accueilli avec grand intérêt l'annonce, faite il y a quelques jours par la Commission, d'un projet de grande politique maritime pour l'Union européenne. C'est un sujet auquel tiennent beaucoup le commissaire Borg et le président de la Commission européenne, M. Barroso.

Nous partageons la conviction du commissaire chargé de la pêche et des affaires maritimes : la mer est une ressource productive que les Européens doivent valoriser de manière durable. Seule une politique maritime européenne ambitieuse permettra d'atteindre cet objectif.

Notre pays, dont les espaces maritimes sont parmi les plus étendus et les plus riches en ressources du monde – 11 millions de km2 –, continuera de soutenir résolument le projet de la Commission. Je prendrai une part active aux travaux qui seront menés en ce sens lors des présidences portugaise et française de l'Union.

Une troisième priorité pour 2008 doit être d'améliorer les outils de gestion des aléas climatiques, sanitaires et économiques. Depuis cinq mois, en tant que ministre de l'agriculture et de la pêche, je suis confronté chaque semaine, avec vous, à des crises économiques liées à la volatilité croissante des prix : les producteurs de porcs, de volailles, d'ovins ou de veaux sont durement éprouvés ces derniers temps. D'autres secteurs sont également touchés par des aléas climatiques, tel celui des fruits et légumes. Enfin, est-il besoin d'insister sur les crises sanitaires : influenza aviaire, dioxines, sharka, chrysomèle du maïs, et surtout cette fièvre catarrhale ovine que les éleveurs de soixante-sept départements, les services de l'État, les vétérinaires et les laboratoires affrontent, depuis plusieurs mois, avec un grand sens des responsabilités ?

Votre rapporteur, M. Forissier, l'a dit, et j'en ai acquis la certitude au cours des cinq mois qui viennent de s'écouler : la France ne dispose pas, aujourd'hui, des outils nécessaires pour bien gérer ces risques économiques, pour prévenir et traiter ces crises sanitaires et climatiques. (Approbation sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Et je ne parle pas seulement, comme l'a dit M. Sauvadet, de la communication partagée, qui doit être liée à une bonne gestion de crise. Aussi le Président de la République m'a-t-il demandé de travailler, avec Christine Lagarde, à une généralisation des mécanismes de gestion des risques à partir de l'expérience de l'assurance récolte.

Nous allons placer ces questions, à commencer par celles de la prévention des risques économiques, de la bonne gestion et de la réparation des aléas climatiques et sanitaires, au coeur du débat européen. Ce sera l'une de mes priorités pour le bilan de santé de la PAC puis sous la présidence française. En attendant, nous allons nous efforcer de mieux utiliser les outils dont nous disposons.

MM. Raison, Sauvadet et Le Fur ont plaidé pour des mécanismes communautaires de régulation de marché. À ce propos, je veux insister sur un point. Nous avons tous parlé de la très grave crise qui touche les producteurs de porcs : je suis opposé, pour l'avenir, au démantèlement de certains outils qui existent déjà au niveau européen…

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