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Intervention de Pierre Morel-A-L'Huissier

Réunion du 13 novembre 2007 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2008 — Agriculture pêche forêt et affaires rurales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Morel-A-L'Huissier :

Monsieur le ministre, vous nous proposez un projet de budget doté de 5,19 milliards d'euros. Il s'agit incontestablement d'un budget de transition, dans la mesure où l'actualité est très prégnante sur les problèmes agricoles. J'en veux pour preuve que le Gouvernement a lancé une réflexion, lors du Grenelle de l'environnement, sur la place majeure que doit tenir l'agriculture, laquelle doit répondre aujourd'hui à un défi alimentaire mondial, avec 6,5 milliards d'habitants sur la terre ; j'en veux pour preuve aussi que 2008 sera l'année du bilan de santé de la PAC ainsi que des Assises de l'agriculture, associant les acteurs majeurs du monde agricole.

Dans un contexte budgétaire difficile, vous avez su orienter ce budget vers l'enseignement et la recherche agricoles, premier poste budgétaire, mais aussi vers l'appui au renouvellement des exploitations agricoles, l'ICHN, les mesures agro-environnementales régionales, la PHAE, la promotion de la qualité de la production agricole, le soutien à l'amélioration de la génétique animale, le soutien à la forêt française et la maîtrise des dépenses de personnel de vos services.

Au-delà de ces observations générales, qui me permettent de saluer votre engagement personnel en faveur de l'agriculture de notre pays et votre implication forte et reconnue au niveau européen, je voudrais attirer votre attention sur l'agriculture de montagne.

La montagne souffre et les éleveurs éprouvent bien des difficultés. Ils ont des problèmes de trésorerie – je le vois tous les jours dans mon département – mais également de lisibilité de l'avenir en matière de production, que ce soit pour les bovins – lait et viande – ou pour la filière ovine, qui connaît à l'heure actuelle une très grave crise, et je sais, pour en avoir reçu l'assurance par votre conseiller, M. Dantin, que vous y êtes très sensible.

Cela m'amène à aborder un certain nombre de sujets, que vous connaissez, mais sur lesquels je souhaite tout particulièrement insister devant la représentation parlementaire.

Ce budget entérine pour la première fois le cofinancement communautaire de la PHAE et des MAE. Ces deux outils doivent être dotés de véritables moyens, à la hauteur des besoins ainsi que des ambitions issues du Grenelle de l'environnement, qui sont le reflet des attentes de notre société.

Concernant tout précisément la PHAE 2, au regard des nouvelles contraintes issues du cahier des charges, il est à craindre une baisse importante des aides en faveur des exploitations liée à la sous-consommation de l'enveloppe prévue. Si je note avec satisfaction le relèvement du taux de retournement, qui passe de 20 à 35 % – 40 ou 50 % seraient encore mieux ! – en zone de montagne, je vous demande de mener une réflexion sur le principe d'une fongibilité entre les crédits de la PHAE et ceux des MAE. L'obtention d'une telle mesure, que vos services connaissent bien, permettrait de continuer à donner un véritable sens à la politique de l'herbe.

Par ailleurs, concernant les MAE, outre la nécessité de conforter l'enveloppe financière dévolue – j'y reviendrai dans une question –, il est nécessaire de ne pas créer de distorsions entre les éleveurs sur un même territoire. À cet égard, plusieurs pistes sont possibles, notamment l'élaboration de plusieurs MAET en fonction de petites régions naturelles dont l'agrégation permettrait de couvrir au mieux l'ensemble d'un territoire départemental. Si je prends le cas de la Lozère, une MAET agropastorale déclinée en trois ou quatre zones offrirait une solution permettant d'éviter les dissensions entre éleveurs.

Deuxième sujet important, celui de la revalorisation de l'ICHN. Deux pistes sont possibles : d'une part, l'élargissement au conjoint exploitant ; d'autre part, la revalorisation de 50 % pour les 25 premiers hectares, mesure annoncée à maintes reprises et limitée, aujourd'hui, à 35 %. Les plafonds européens n'étant pas atteints, cette mesure doit permettre de pérenniser et de clarifier la politique de soutien à l'agriculture de montagne.

Un autre dossier concerne le plan de modernisation des bâtiments. Je connais les efforts du Gouvernement en la matière, avec une enveloppe qui est passée depuis 2004 de 23 millions à 100 millions d'euros, dont 42 % pour la montagne, soit 42 millions d'euros. L'aide moyenne était à l'époque de 10 000 euros, elle est aujourd'hui de 19 000 euros en zone de plaine et de 32 000 euros en zone de montagne. En 2005, le nombre de bâtiments à financer était de 5 000 par an ; nous en sommes aujourd'hui à 19 000, soit le double de ce qui était prévu. Ce plan a incontestablement rencontré du succès auprès des agriculteurs. Cela étant, 9 000 dossiers se trouvaient en attente de financement fin août. Vous avez débloqué une enveloppe complémentaire de 23 millions d'euros, portant la participation française à 75 millions. Il est nécessaire aujourd'hui, monsieur le ministre, pour ne pas créer de distorsions, de solder tous les dossiers en attente selon les conditions financières en vigueur lorsqu'ils ont été déposés. Il s'agit d'une mesure d'équité et de justice, et ce d'autant plus que les agriculteurs ont connu une hausse importante du coût de la construction en zone de montagne, aggravée par le fait que les PSM ont été supprimées l'année dernière malgré l'amendement que j'avais déposé.

Il s'agit aussi de ne pas mettre en péril les projets d'installation des jeunes agriculteurs dont les investissements sont d'ores et déjà programmés. Dois-je, monsieur le ministre, vous rappeler ce que représentaient les prêts bonifiés pour nos éleveurs et le poids des investissements agricoles dans notre économie rurale de zone à handicaps. Sans vouloir revenir sur le principe de la suppression des prêts bonifiés, à un moment malheureusement où les taux augmentent, permettez-moi d'insister sur le fait qu'il faudra mettre en place un dispositif supplétif permettant d'investir en zone de montagne, en dehors des bâtiments. J'aurai l'occasion de vous poser une question très précise à ce sujet en m'associant à M. Le Fur.

En conclusion, je voudrais insister sur la nécessaire simplification de toutes les aides à l'agriculture, notamment celles concernant les contrats agri-environnementaux. Je sais que vous êtes d'ores et déjà mobilisé à cet égard, tout comme vous l'êtes en faveur d'un vrai plan de relance de la filière ovine, lait et viande. Vous avez déjà débloqué quelques mesures en urgence, mais je sais que vos services, à votre demande, étudient un corpus de règles venant vraiment au secours de cette filière en crise. Il s'agit d'une production concernant des zones difficiles et pour lesquelles rien d'autre n'est possible. Sa disparition dans de grands espaces du territoire à haute valeur environnementale aurait un tel impact qu'elle n'est pas acceptable.

Au bénéfice de ces quelques observations, monsieur le ministre, je soutiendrai très fortement votre projet de budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

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