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Intervention de Louis Guédon

Réunion du 13 novembre 2007 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2008 — Agriculture pêche forêt et affaires rurales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLouis Guédon :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget de la pêche pour 2008 entre en discussion sur fond de crise – une crise récurrente depuis que la nécessité de la protection de la ressource halieutique entrave le développement harmonieux de nos armements et de nos ports.

Cette année, cependant, la crise est aiguë, avec notamment la flambée des cours du gasoil, qui a porté la part du poste carburant à 30 % à 40 % du chiffre d'affaires des chalutiers, la suppression des quotas sur les anchois et le thon rouge et les divergences entre les observations tirées du pragmatisme quotidien de nos marins et de nos professionnels et les directives issues des organismes nationaux ou européens détenteurs du pouvoir de décision.

Fin 2007, la pêche, c'est encore 5 232 navires, dont une grande majorité de navires de moins de 12 mètres, qui ont tous plus de vingt ans de navigation. Rappelons qu'ils étaient plus de 11 500 en 1984. C'est aussi 25 250 marins, avec, pour les « patrons » en charge du commandement, une moyenne d'âge de 43 à 47 ans – pour une limite à 52 ans. C'est, enfin, un tonnage de 585 millions de tonnes et un chiffre d'affaires de 1,04 milliard d'euros.

Sommes-nous satisfaits de voir un bateau sur deux sortir de flotte depuis 1980 ? Certes non !

Si le budget pour 2008, avec 60,461 millions d'euros, n'a pas progressé par rapport à celui de 2007, nous devons rappeler qu'un effort considérable avait été fait l'an dernier, puisque le montant avait doublé par rapport à 2006.

L'examen analytique de la répartition des postes laisse cependant apparaître de sensibles variantes et des différences importantes d'orientation.

Le budget fait apparaître des efforts, avec une augmentation de 56 % des dépenses de fonctionnement du budget de l'OFIMER, qui s'élèvent à 17 795 500 euros en crédits de paiement, et, surtout, du budget alloué au contrôle des pêches maritimes, qui augmente de 83 %, passant de 2,7 millions à 5,045 millions d'euros.

Si tous les professionnels reconnaissent le bien-fondé et la nécessité de contrôles, en particulier en mer, pour assurer la moralité de la profession et sa sécurité, nombreux sont ceux qui ont du mal à comprendre une telle augmentation de ce poste, car les moyens dont dispose la France sont, avec les affaires maritimes les douanes, la gendarmerie et la marine nationale, déjà très importants. On voit bien que ces moyens ne peuvent être indépendants des prises de position européennes, et c'est bien dommage, car ces dernières, par manque de transparence et de concertation, ne semblent pas adaptées au but louable qu'elles prétendent poursuivre. En revanche, leurs conséquences sur notre économie de la pêche restent très dommageables.

Nous souhaitons en effet que les contrôles soient de la même qualité dans tous les pays de l'Union européenne que ceux qui sont effectués en France et portés à la connaissance de tous. Les limites de capture qui en découlent doivent être la conséquence d une évaluation scientifique en tous points irréprochable, recoupée quotidiennement par l'observation régulière de nos marins. Si les conditions ne sont pas réunies, c'est tout l'équilibre économique de la filière qui se trouve rompu. Il est évident que nous ne pouvons rester sans réagir en attendant que la situation de la pêche évolue jusqu'à atteindre ou dépasser le point de non-retour.

De la même manière, nous constatons une baisse de 28,5 % des sommes consacrées à la modernisation et à la restructuration de la flottille. Nous le regrettons car notre flottille vieillit et son renouvellement, s'il conditionne certes la qualité de vie qu'attendent légitimement nos marins dans l'exercice d'une profession très pénible, conditionne aussi et surtout, dans un souci prioritaire de sécurité, l'assurance que nous pourrons éviter au mieux les drames de la mer, toujours trop nombreux et trop cruels.

Nous constatons également une diminution de 28 % des sommes transférées aux caisses de garantie chômage, intempéries et avaries. Ce choix mérite une explication détaillée, car il paraît difficilement compatible avec les difficultés structurelles considérables que cumule ce secteur fondamental de notre économie du littoral.

Nous saluons l'augmentation importante des crédits consacrés au suivi de la qualité de la ressource aquacole, qui passent de 2,2 millions à 4 millions, soit une augmentation de 82 %. Outre l'évaluation quantitative de l'aquaculture, c'est tout le devenir de nos estuaires et la protection de nos activités ostréicoles et conchylicoles qui sont en jeu, activités qui représentent 3 700 entreprises produisant 185 000 tonnes.

Ce budget permet donc d'espérer une gestion favorable de la pêche, mais répond-il pour autant aux difficultés du moment ? La crise pétrolière, notamment, fait réapparaître le déséquilibre financier des armements. La gestion contestée de la ressource halieutique, le renouvellement attendu de la flottille, la défense du niveau de vie des équipages, la recherche des moyens nécessaires à la défense du mareyage sont à l'origine de difficultés auxquelles il n'est plus possible de faire face avec les solutions habituelles.

Il faut faire preuve d'imagination, car la balance commerciale des produits aquatiques reste déficitaire. Les organisations professionnelles travaillent en ce sens, en investissant notamment dans la recherche de nouveaux types de navires, de nouvelles méthodes de pêche plus protectrices du milieu et dans le projet « Pêche-C02 ». Ce projet, qui vise à réduire, conformément au protocole de Kyoto, les émissions de gaz à effet de serre dans le secteur de la pêche maritime et professionnelle, repose sur des investissements nouveaux, ainsi que sur des modifications des pratiques et des comportements.

Une orientation nouvelle est prise avec la création d'un fonds de couverture des risques pêche réservé aux seuls adhérents du Fonds de prévention des aléas pêche, le FPAP. Il serait réservé aux navires de plus de six mètres et exclurait les navires qui s'approvisionnent à l'étranger. Rappelons que la pêche consomme 355 millions de litres de gazole et produit 1 million de tonnes de gaz à effet de serre. Le projet « Pêche-C02 » aurait deux avantages immédiats : la diminution de la consommation de carburant et une meilleure rémunération des équipages.

Le groupe UMP, monsieur le ministre, votera votre budget et vous aidera dans votre tâche, qui est très difficile. La pêche ne peut se satisfaire d'expédients ex temporis et conjoncturels. Elle mérite un programme responsable, transparent et concerté, en particulier au sein de la Communauté européenne. Avec le CSPM, je suis heureux de voir enfin naître l'instance reposant sur trois piliers – les marins, les scientifiques et les élus du littoral – dont je réclame, ici même, la création depuis plusieurs années. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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