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Intervention de Delphine Batho

Réunion du 4 novembre 2008 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2009 — Sécurité

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDelphine Batho :

En matière de redéploiements, de bonnes réformes pourraient être faites, mais vous tardez à les mettre en oeuvre.

La deuxième priorité de la politique de lutte contre l'insécurité devrait être la lutte contre les violences faites aux personnes. C'est l'autre échec majeur de votre prédécesseur, madame la ministre, le point noir de son bilan. Les violences physiques non crapuleuses ont augmenté de 30 % depuis 2002 et continuent de progresser depuis – elles ont ainsi augmenté de 6 % en 2007 et de 5 % au cours des douze derniers mois. Encore ces chiffres ne disent-ils pas tout, puisque les enquêtes de victimation montrent que deux millions de personnes ont été victimes de violences au cours des deux dernières années et que, parmi elles, deux victimes sur trois ne portent pas plainte.

Cette montée des violences, en particulier des violences commises par les mineurs, devrait être une priorité d'action clairement identifiée pour les forces de sécurité. Mais la lutte contre les violences aux personnes ne fait même pas partie des objectifs et des indicateurs de la LOLF ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Quant à la prévention de ces violences, c'est l'angle mort de la politique du Gouvernement. Tous les acteurs de terrain dénoncent, dans une indifférence quasi générale, le manque de moyens éducatifs et la nécessité de mettre en place une véritable politique de prévention précoce, comme cela a été fait au Canada.

Voilà quelles devraient être à nos yeux les priorités de ce budget. Au lieu de cela, vous nous présentez des moyens en baisse, ce qui risque de brider les capacités opérationnelles des forces de l'ordre et de conduire à une certaine paralysie. Dans la police, ce budget et la future LOPPSI reviennent non seulement sur les postes créés depuis 2002, mais aussi sur les engagements pris en 2004 dans le cadre de la réforme « Corps et carrières ». C'est désormais la déflation des gradés et des gardiens de la paix qui est à l'ordre du jour.

Ces réductions d'effectifs ont pour corollaire un nouveau recul social pour les policiers. Alors qu'ils sont déjà fatigués par la pression qu'exerce sur eux la culture du chiffre, vous vous attaquez désormais à leur temps de travail. Il ne nous appartient pas, madame la ministre, de nous immiscer dans les débats syndicaux. Mais force est de constater que le climat social dans la police n'est pas bon. Le Président de la République avait pris l'engagement de respecter le dialogue social et le principe des accords majoritaires. Ce principe n'est pas respecté dans la police. C'est pourquoi nous vous demandons, madame la ministre, si vous avez l'intention de rouvrir les négociations avec l'ensemble des organisations syndicales.

Dans la gendarmerie nationale, le malaise est également palpable, car l'inquiétude est grande face aux menaces de suppression d'un certain nombre de brigades territoriales. Après avoir été le parent pauvre de la LOPSI 1, la gendarmerie voit son budget diminuer de 1 % en 2009 et un militaire sur deux partant à la retraite ne sera pas remplacé. Nous constatons déjà sur les territoires les conséquences de la contraction budgétaire de l'année 2008, j'en veux pour preuve que dans la circonscription rurale dont je suis l'élue, la gendarmerie est confrontée à des mesures de rationnement du carburant. Le rapporteur pour avis de la commission de la défense a souligné tout à l'heure les difficultés que pose le budget 2009, et sur lesquelles notre collègue Jean-Jacques Urvoas reviendra dans quelques instants.

Dans ce contexte tendu pour les finances publiques, vous justifiez les suppressions de postes en expliquant qu'elles seront compensées par trois instruments.

D'abord par l'embauche de personnels administratifs. Cependant, on voit mal comment 320 personnels administratifs supplémentaires pourront remplacer 1 446 gardiens de la paix.

La deuxième marge de manoeuvre réside dans les tâches indues. Mais, comme nous aurons l'occasion de le dire lors de la présentation de nos amendements, il nous semble que ce problème lancinant tarde à être réglé.

La troisième perspective d'amélioration des capacités opérationnelles des policiers et gendarmes est le recours aux nouvelles technologies. Qu'il faille moderniser les outils de travail des forces de l'ordre et investir dans les nouvelles technologies est une évidence, mais vous ne vous donnez pas les moyens de cette politique, puisque les crédits d'investissement pour 2009 seront en baisse de 22 % pour la police et de 50 % pour la gendarmerie. Toutes vos annonces de ces derniers mois – triplement du nombre des installations de vidéoprotection, police technique et scientifique de masse, et j'en passe – se heurteront donc très certainement aux restrictions budgétaires.

Chers collègues, tout au long de ces dernières années, par-delà les désaccords politiques, le groupe socialiste n'a jamais hésité à donner aux forces de sécurité les moyens budgétaires dont elles ont besoin pour accomplir leur mission. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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