Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation du droit des sociétés au droit communautaire a pour objet la transposition de deux directives, d'octobre 2005 et de juin 2006. Sans entrer dans le détail – bien des choses ont déjà été dites et nous aurons l'occasion de développer tous ces sujets dans les minutes qui suivent –, il s'agit en particulier de permettre la fusion entre les sociétés françaises et celles des autres États membres. C'est l'objet de la transposition en droit français de la directive du 26 octobre 2005 relative aux fusions transfrontalières des sociétés de capitaux.
Il s'agit aussi de permettre aux sociétés coopératives françaises d'adopter le nouveau statut de société coopérative européenne. Les coopératives d'entreprises permettent à des entrepreneurs individuels et à des petites et moyennes entreprises de se fédérer tout en restant indépendantes. Ce nouveau statut permet aux coopératives d'être reconnues dans l'ensemble des États de l'Union et d'y développer leur activité.
Cette transposition démontre l'influence du droit communautaire, qui est de plus en plus prégnant dans notre droit des sociétés. Celui-ci a pourtant des origines anciennes. Je n'en ferai pas l'historique : il remonte au Moyen Âge, nombre d'éléments datant du xve et du xvie siècles, et il n'a pratiquement pas changé du xve siècle à 1925. Mais nous sommes bien loin de cette époque. C'est, en tout cas, un clin d'oeil aux historiens : nous parlions d'archives la semaine dernière ; celles-ci sont largement ouvertes.
Je reviendrai cependant sur les propos de notre collègue Michel Hunault, pour donner à mon tour un coup de chapeau au Gouvernement et à sa majorité qui, par ce projet de loi, transposent une directive européenne dans des délais très courts. Il faut saluer cet effort important à la veille de la présidence française de l'Union européenne. La France, en effet, a transposé près de 99 % des directives européennes émises au premier semestre 2007. Les chiffres sont certes un peu plus modestes si l'on considère une période plus récente, mais il s'agit néanmoins bel et bien d'un record depuis que la Commission européenne mesure les efforts des États membres en matière de transposition et d'application du droit communautaire. Notre pays, souvent montré du doigt pour ses retards dans la transposition des directives et des décisions-cadres européennes, se fixe donc un objectif ambitieux : quarante-deux directives devront être transposées d'ici au mois d'octobre, dont dix nécessiteront l'adoption de mesures législatives.
Mais revenons-en au texte qui nous occupe cet après-midi, et qui a une triple ambition : simplifier la vie des sociétés européennes ; adapter notre droit à la réalité économique des sociétés coopératives, et plus largement à la réalité économique d'une mondialisation de plus en plus poussée, sans pour autant bouleverser la grande charte de 1947 sur les coopératives ; renforcer la transparence des sociétés commerciales.
Il s'agit donc tout d'abord de faciliter la vie des sociétés, en simplifiant les fusions transfrontalières et en pérennisant le statut favorable des administrateurs représentant les salariés, en cas de fusion desdites sociétés. Jusqu'à présent, l'absence d'harmonisation législative rendait juridiquement complexes et économiquement coûteuses de telles fusions. Lorsqu'une société française souhaite fusionner avec une société allemande et avec une société belge, elle doit concilier toutes les lois applicables dans les différents pays. On imagine les difficultés techniques qui en découlent. La transposition de la directive du 26 octobre 2005 résoudra ces problèmes, en combinant des règles de conflit de lois et des règles matérielles harmonisées. Notre rapporteure l'a très bien montré.
Quant aux administrateurs représentant les salariés en cas de fusion transfrontalière, ils ne seront pas pénalisés si une société française fusionne, par exemple, avec une société allemande ou belge. Ils conserveront le système de participation dans la société absorbante ou résultant de la fusion. Cette garantie me paraît très importante.
Mais cette simplification ne signifie pas que la France signe un chèque en blanc. L'article 14 du projet de loi prévoit expressément que le procureur de la République a la possibilité de s'opposer, pour des raisons d'intérêt public, au transfert hors de France du siège d'une société européenne immatriculée en France ou à la constitution d'une société européenne par voie de fusion qui entraînerait un changement du droit applicable pour les actionnaires français.
Le projet de loi adapte également notre droit à la réalité économique des sociétés coopératives européennes, sans bouleverser pour autant les grands principes de la coopération tels qu'ils résultent de la loi fondatrice de 1947, qui a marqué la reconstruction et le monde économique des dernières décennies.
En Europe, le statut coopératif concerne 300 000 entreprises et plusieurs millions de salariés ; en France, 900 000 salariés travaillent dans 21 000 entreprises, réalisant un chiffre d'affaires annuel de plus de 100 milliards d'euros. Rappelons que 75 % des agriculteurs adhèrent à une coopérative, que les banques coopératives réalisent 60 % des dépôts bancaires et que les coopératives de commerçants-détaillants alimentent pour 25 % le commerce de détail en France. C'est dire l'importance du système coopératif en France et l'intérêt de la transposition de ces directives.
Enfin, le projet de loi renforce la transparence des sociétés commerciales, leur permettant de s'adapter à la mondialisation et à un monde sans cesse en mouvement. En transposant la directive du 14 juin 2006, le projet de loi prévoit par exemple que le rapport annuel rédigé par le président du conseil d'une société commerciale et qui retrace le mode de gouvernement d'entreprise et les procédures de contrôle interne, doit être approuvé par le conseil d'administration afin d'impliquer sa responsabilité. C'est mettre le conseil d'administration au coeur du pouvoir décisionnel.
Le texte renforce également la confiance du public envers l'information financière fournie par les sociétés de capitaux, tout en évitant de leur imposer de nouvelles obligations administratives.
Je rappelle que la directive du 14 juin 2006 a prévu une responsabilité collective des membres des organes d'administration, de gestion et de surveillance en ce qui concerne l'établissement et la publication des comptes annuels et consolidés. Tout cette procédure est, bien sûr, placée sous la vigilance du commissaire aux comptes.
Vous le voyez, mes chers collègues, ce texte réalise bien la triple ambition de simplification, d'adaptation économique à la mondialisation et de renforcement de la transparence des sociétés commerciales. Tous ces progrès sont attendus pour la sécurité des transactions comme pour celle de l'installation, et ils sont favorables au développement économique dont nous avons tant besoin.
Comme Mme la rapporteure, je vois dans ce projet de loi beaucoup de bon sens. Il procède à une simplification ; il représente une chance, essentiellement pour nos PME ; il permet un renforcement de la transparence financière. Pour cette triple raison, le groupe UMP le votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)