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Intervention de Jean-Frédéric Poisson

Réunion du 29 janvier 2008 à 21h30
Personnels enseignants de médecine générale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Frédéric Poisson :

Beaucoup de choses ont été dites sur ce sujet et je ne veux pas prolonger inutilement les débats. Nous légiférons dans un contexte de relative dévalorisation de la médecine générale ; les généralistes expriment un certain nombre d'inquiétudes quant au devenir de leur profession et à la motivation des étudiants pour s'inscrire dans cette voie. La proposition de loi dont nous discutons doit justement contribuer à les rassurer.

Je souhaite pour ma part insister sur un aspect qui me tient particulièrement à coeur, même s'il n'entre pas directement dans le cadre de la proposition de loi : celui du contenu de l'enseignement dans la filière de médecine générale.

En effet, parmi les sujets de préoccupation des médecins généralistes figure la complexité de leur situation : confrontés à des demandes de plus en plus exigeantes de la part des patients, intervenant souvent dans les réseaux des collectivités locales – réseaux de soins ou à caractère social – de plus en plus denses et qui ont davantage besoin d'eux, ils doivent attacher une plus grande importance aux aspects relationnel et administratif du métier. Cette complexification de leur travail n'est d'ailleurs pas sans lien avec le relatif désintérêt dont souffre la filière auprès des étudiants, à l'entrée comme à la sortie de l'université.

Il me semble urgent – et ce n'est sans doute pas dans votre cabinet que l'on entendra le contraire, madame la ministre – de renforcer l'enseignement de l'éthique médicale en médecine générale, et de le faire intervenir le plus tôt possible dans la formation. La plupart du temps, cet enseignement est optionnel, assuré à partir du deuxième cycle – en première année de mastère dans la plupart des cas –, de manière « expérimentale » et propre à chaque professeur : sous forme de séminaire d'une quinzaine d'étudiants, de cours magistral, d'études de cas… Des médecins généralistes peuvent très bien terminer leur formation et passer le doctorat sans avoir reçu un enseignement structuré d'éthique médicale, adapté aux exigences du temps, aux nouvelles techniques ou aux exigences de la biomédecine. Une telle lacune me semble regrettable.

Par ailleurs, je constate que la place des sciences dures est toujours aussi importante dans l'enseignement obligatoire. Je me prends à douter – n'étant pas de la corporation, je le fais avec la réserve qui convient – de l'utilité de former des médecins devenus « forts en thème » – ou plutôt en mathématiques, en l'occurrence – après les deux premières années de leurs études et qui, parce qu'ils ne sont pas suffisamment confrontés aux enseignements adéquats, passent par-dessus les exigences éthiques et sociales du temps.

C'est pourquoi, madame la ministre, je voulais attirer votre attention sur ce sujet, bien qu'il déborde du cadre de la proposition de loi. Dans le cadre des discussions que vous aurez avec les organismes participant à l'organisation de ces filières, dont l'Ordre national des médecins, je vous engage à soutenir les nombreuses initiatives relatives à cet aspect de l'enseignement médical. Je pense notamment aux journées universitaires francophones de pédagogie médicale de Nancy, dont toute une partie, en 2003, a été consacrée à l'enseignement et la pédagogie de l'éthique médicale, mais aussi au rapport rendu en mai 2007, au nom de l'Ordre national des médecins, par MM. Degos, Roland et Deau : « Si l'on peut admettre, disent ses auteurs, que la première année doit apporter les bases du début, donc comporter l'enseignement de sciences fondamentales, on peut se poser le problème de leur choix : manifestement les notions d'anthropologie, de sociologie, de psychologie, d'éthique, d'économie de la santé ont été oubliées. »

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