Monsieur le ministre, nous ne nous faisons guère d'illusions : nous avons bien compris que vous ne reculerez pas. Mais je m'adresse à vous avec une certaine gravité.
Tout le monde comprend que notre pays est dans une situation difficile sur le plan de ses finances publiques. C'est inscrit dans le montant de la dette, dans le projet de loi de finances rectificative et dans le futur budget de 2008.
Le bon sens conduirait à penser que, lorsqu'un pays est en difficulté, ce qui est le cas de la France, il faut faire des sacrifices – c'est le mot qui convient – et non des réformes, comme vous le dites abusivement. Le mot « réforme » est en effet complètement dévoyé. En français, depuis un siècle et demi, « réforme » signifie « plus » ou « mieux », et non « moins » ou « pire ». Vous qualifiez abusivement de réforme ce qui est en réalité un sacrifice, voire une régression. Or, monsieur le ministre, dès lors que vous demandez à nos concitoyens de faire des sacrifices, il faut commencer par ceux qui sont les mieux lotis, les plus nantis. Puis, éventuellement, si cela ne suffit pas, il faut élargir le cercle des sacrifiés.
Mais, et c'est là votre péché originel – j'emploie le mot « péché » à l'intention de M. Mariton, qui parlait hier de « péché véniel » –, vous avez fait exactement l'inverse, et vous persévérez. Vous avez commencé par rendre de l'argent aux mieux lotis – je n'ai pas dit « les riches » ou « les nantis » –, et ce avec quelques difficultés si j'en juge par les relances que vous avez dû faire auprès des heureux bénéficiaires. Puis, vous avez demandé des sacrifices à ceux qui ont la réputation d'être des privilégiés dans ce pays, alors que leur fiche de paie ne dépasse pas les 1 500 ou 1 700 euros bruts ! C'est difficilement admissible, monsieur le ministre, et vous le savez, car vous savez compter aussi bien que nous et connaissez les chiffres aussi bien que nous. Si vous le savez et que vous agissez quand même de cette façon, c'est qu'une certaine dose de cynisme sous-tend votre politique. C'est la raison pour laquelle vous vous heurtez à tant de réticences.