Vous rappelez à loisir, madame la ministre, qu'il doit y avoir un équilibre entre droits et devoirs des demandeurs d'emploi. Sur ce point, nous n'avons pas de désaccord, ni de fond ni de forme ; encore faut-il voir ce que signifient vraiment ces mots.
Je vous ai interpellée lors des débats sur des questions qui sont incontournables. S'il y a environ 500 000 offres d'emploi qui ne sont pas pourvues, c'est ultra-majoritairement parce qu'elles sont difficilement acceptables en raison des conditions de travail ou des salaires de misère proposés. On a parlé par exemple des services à la personne : or les salaires payés dans ce secteur sont proprement affligeants... Dans le commerce et la distribution, 80 % des femmes ont des salaires de misère et des horaires de travail éclatés dans la journée mais, qui plus est, elles n'ont aucune garantie d'obtenir un emploi à temps plein. Elles travaillent à temps partiel en permanence, de leur entrée dans l'entreprise jusqu'à leur sortie, dans le meilleur des cas.
Pour que droits et devoirs soient réellement équilibrés, il faudrait que le Gouvernement prenne enfin ses responsabilités et impose à certaines branches professionnelles de respecter la loi. Plusieurs dizaines de conventions collectives sont illégales puisque le salaire de départ est inférieur au SMIC. C'est donc toute la grille professionnelle qui est tirée vers le bas. C'est un vrai problème, madame la ministre. Cela fait partie des droits des salariés d'avoir des conditions de travail et salariales qui leur permettent de regarder d'un oeil nouveau ces différents métiers et emplois. C'est parce que ces derniers sont difficiles que le Gouvernement est amené aujourd'hui à proposer de manière sélective l'immigration choisie. À défaut de parvenir à convaincre nos concitoyens qu'il s'agit de bons emplois, bien rémunérés et respectueux des conditions de vie, vous en êtes réduite à aller chercher une main-d'oeuvre étrangère prête à tout pour échapper à une misère plus grande encore.
Il n'y a pas eu non plus de clarification dans nos débats, mais elle n'est pas près de venir puisque c'est le fil conducteur de la politique gouvernementale et le propos permanent de Mme Parisot pour le MEDEF, sur ce que signifie vraiment une offre d'emploi « acceptable ». J'espère que vous avez compris que, pour nous, cela concerne le contenu des offres d'emploi. Il faut voir ce qu'elles ont de mauvais, qui ne donne pas envie aux demandeurs d'emploi d'occuper les postes proposés. La définition trouvée par Le Canard Enchaîné a le mérite de la concision : un emploi acceptable, c'est un emploi que vous refuseriez !
Quand nous discuterons de ces questions, nous pourrons probablement être sur la voie d'un accord, mais ce n'est pas pour demain matin.