Merci, monsieur Poisson !
Lorsqu'on conduit une politique qui favorise les destructions massives d'emploi, qui fait avec zèle le lit d'un capitalisme financier qui confisque chaque jour un peu plus la richesse créée pour la distribuer à quelques mercenaires, on doit au moins avoir la décence de ne pas tenir les victimes des délocalisations et restructurations de toutes sortes pour des privilégiés ou des fraudeurs, et de ne pas fustiger leur prétendu farniente...
Vous tenez pour inacceptable qu'un demandeur d'emploi puisse refuser de se plier aux lois du marché et vous jugez normal qu'il se résigne à son déclassement, qu'il se contente de vivre d'expédients en renonçant à ses droits les plus élémentaires. Bref, il doit renoncer à construire sa vie. Vous avez tort, madame la ministre, de considérer que le demandeur d'emploi ne demande qu'un emploi, n'importe quel emploi. Il aspire légitimement à un minimum de bien-être économique.
Rien dans la situation économique réelle de notre pays ne justifie, pour peu que l'on ait le souci de garantir un minimum de justice distributive, que l'on tienne cette demande pour illégitime, disproportionnée, voire immorale. Les demandeurs d'emploi considèrent à bon droit que l'État doit assumer ses responsabilités dans la mise en oeuvre des politiques publiques de l'emploi, et qu'il doit également garantir que la rencontre de l'offre et de la demande respecte un équilibre entre droits et devoirs.
Les agents du service public de l'emploi ne s'y sont pas trompés, eux qui contestent avec vigueur votre réforme. Et quoi de plus normal qu'ils refusent de voir leurs missions de service public dévoyées au profit d'objectifs de police des demandeurs d'emploi, qu'ils refusent également de voir remis en cause leur statut, garant de leur indépendance et de leur neutralité ? Ils risquent par là même la dégradation de leurs conditions de travail et l'aggravation des pressions hiérarchiques.
En confiant les clefs de la politique de l'emploi au MEDEF, via le conseil d'administration de la nouvelle institution, et le Conseil national de l'emploi, en détournant les acteurs de leurs missions essentielles, y compris les agents du GARP ou les personnels de l'AFPA, vous entendez inaugurer le règne des marchands de travail, comme il existe des marchands de sommeil.