Nous verrons bien !
Cette confusion des rôles autorisera un contrôle accru des demandeurs d'emploi. Elle permettra surtout d'exercer sur eux des pressions, voire un chantage à l'indemnisation, en les jaugeant à l'étalon de l'employabilité. Tel salarié jugé employable devra retrouver rapidement un emploi sous peine de perdre ses indemnités, tel autre jugé lui inemployable devra accepter ce qu'on lui propose. De telles évolutions sont bien évidemment dangereuses. Inspirées du « modèle » anglo-saxon du workfare, elles contribueront à déréguler un peu plus le marché du travail, à la plus grande satisfaction des organisations patronales, mais au détriment des droits des salariés privés d'emploi et de la perspective d'un emploi stable, qui devront aussi renoncer à la reconnaissance des acquis de leur expérience professionnelle.
Il nous faudra certes patienter jusqu'aux réformes annoncées de la formation professionnelle et de l'assurance chômage pour appréhender de façon plus rigoureuse et plus opératoire les tenants et les aboutissants de votre réforme, mais les conséquences des politiques menées sous la précédente mandature, comme les réformes engagées depuis juillet, laissent présager le pire. Que constatons-nous en effet en France depuis six ans ? La précarité s'est étendue et institutionnalisée en « précariat » et les formes d'insécurité au travail se sont multipliées à la faveur d'un « détricotage » méthodique de notre droit du travail. Qui plus est, la situation des chômeurs en France compte parmi les moins enviables de l'Union européenne. Notre pays est un de ceux qui dépense le moins dans l'indemnisation des chômeurs. Dix membres de l'Union font mieux que nous... Nous sommes aussi le pays où 53 % des personnes privées d'emploi ne sont plus indemnisées et cessent le plus souvent d'apparaître dans les statistiques du chômage. Il est facile dès lors d'affirmer qu'il baisse !
Plutôt que de remédier à ces anomalies, vos réformes enfoncent le clou et vous voulez faire passer la pilule grâce à un discours démagogique de culpabilisation des chômeurs. Vous tenez à faire croire que la plupart d'entre eux sont responsables de leur situation. Pour reprendre les termes de Mme Parisot, « le chômage relève trop souvent d'un choix ». Comme si l'on pouvait choisir d'être chômeur !