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Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 31 janvier 2008 à 9h30
Pouvoir d'achat — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoland Muzeau :

Il ajoute : « Les salaires, eux, n'ont guère augmenté : entre 1 400 et 1 500 euros nets par mois pour des employés dont l'âge moyen est de quarante-trois à quarante-cinq ans ». Un autre employé résume : « Il y a de moins en moins de monde dans l'usine et la charge de travail est de plus en plus élevée. Pendant ce temps, tout augmente, les prix et les bénéfices de l'entreprise, tout sauf nos salaires ».

Quant aux 35 heures, on ne sait même plus quelle est votre position. Un jour, vous annoncez dans les médias leur suppression pour 2008, voire celle de toute durée légale du travail. Un autre jour, vous faites machine arrière, et pour cause ! En l'absence de durée légale, il n'y a plus d'heures supplémentaires, et donc plus de majoration salariale. Et c'est tout votre slogan du « travailler plus » qui s'effondre. Vous êtes coincés entre les demandes du MEDEF et vos promesses électorales.

Depuis des mois, vous annoncez aux Français une augmentation de leur pouvoir d'achat, mais l'immense majorité d'entre eux ne voit rien venir. Seuls les plus riches n'ont pas à se plaindre de votre politique du « toujours plus pour ceux qui ont déjà beaucoup ». Ce n'est pas en travaillant plus que l'on s'enrichit dans la France de M. Sarkozy : c'est en profitant de son patrimoine, de ses rentes, de ses relations familiales, de ses amitiés dans la finance et dans la politique. Les patrons de nos grandes sociétés sont les mieux payés d'Europe, avec une rémunération annuelle moyenne de près de 6 millions d'euros, dont seulement 1,25 million de salaire et le reste en stock-options. Pour eux, il n'est jamais question de remettre en cause les augmentations salariales, ni de les rendre responsables des mauvais résultats de leur entreprise : ils partent plutôt avec une « retraite chapeau ».

C'est la majorité de nos concitoyens qui doit payer l'addition des mesures d'assistanat pour les riches de la loi TEPA, tout en subissant la hausse des prix du logement, de l'énergie et des denrées alimentaires. Pendant que certains bénéficient de baisses d'impôts sans précédent avec le « bouclier fiscal », d'autres souffrent des déremboursements de l'assurance maladie, que vous avez aggravés avec la franchise médicale de 50 euros entrée en vigueur au 1er janvier dernier. La hausse du pouvoir d'achat, déjà inférieure à 1 % en 2003, s'est effondrée à 0,4 % en 2006. Et encore, ce n'est qu'une moyenne pour l'ensemble des salariés. Dans sa dernière publication, l'INSEE relève que les augmentations salariales de pouvoir d'achat ne concernent que les cadres et les professions intermédiaires. Si M. Lefebvre n'était pas parti, il aurait appris qu'elles stagnent pour les employés, et qu'elles baissent de 0,2 % pour les ouvriers. La situation des quelque 1,6 million de salariés employés par les particuliers au titre des emplois d'aide à la personne, que vous encouragez fiscalement et socialement, n'est guère plus enviable. Il s'agit, pour plus de 90 %, de femmes qui courent entre plusieurs employeurs particuliers, obligées qu'elles sont de cumuler plusieurs emplois pour gagner des revenus très faibles : 80 % d'entre elles touchent entre 6,2 et 9,40 euros nets de l'heure.

Les retraités, notamment ceux qui touchent de petites pensions, frappés de plein fouet par les hausses de prix et la stagnation des aides sociales, sont aussi les grands oubliés de ce texte. Il n'y a là rien d'étonnant, puisque votre idéologie aveugle n'envisage d'augmentation de revenus que dans le culte du « travailler plus ». Par essence, les personnes âgées et les personnes handicapées en sont les premières victimes.

En décembre dernier, le Gouvernement a attendu la fin de la session parlementaire pour annoncer honteusement une revalorisation des pensions au 1er janvier 2008 de seulement 1,1 %, soit moins que le taux d'inflation du niveau général des prix, qui, s'élevant à 2,6 % en 2007 sera probablement du même ordre en 2008. Ainsi, au pied du mur, le Gouvernement a explicitement entériné la baisse du pouvoir d'achat des retraités. Mais, pour mieux faire passer ce 1,1 % resté en travers de la gorge, il annonce vite fait un petit coup de pouce en février : comme par hasard, juste avant les élections municipales. Ce n'est vraiment pas sérieux !

Quant au minimum vieillesse, dont vivent 600 000 personnes âgées, il est toujours aussi chichement compté : 628 euros mensuels pour une personne seule, 1 126 euros pour un couple, au 1er janvier 2008.

Les beaux discours de la campagne électorale présidentielle – il faut le rappeler – promettaient d'augmenter les petites retraites à 75 % du SMIC net. Ces beaux discours sont restés dans les placards. Comment croire les nouvelles promesses du Président de la République, qui annonce une augmentation du minimum vieillesse avant l'été ? Pourquoi attendre l'été ? L'urgence de cette législature n'était-elle pas de redistribuer la richesse nationale vers ces personnes plutôt que d'offrir avec l'argent public 15 milliards de cadeaux fiscaux aux plus riches, en juillet dernier.

Aujourd'hui, vous n'osez plus affirmer que la baisse du pouvoir d'achat est plus un « ressenti » qu'une réalité. Si l'inflation moyenne reste en deçà de 3 %, c'est surtout dû à la baisse de certains produits manufacturés qui ne sont pas de première nécessité. En revanche, les produits alimentaires, et particulièrement les produits frais, ont battu des records : plus de 8 % en 2007, sans compter le renchérissement du prix de l'énergie – plus 22 % pour le gaz de ville. L'informatique, la téléphonie, les appareils photos ne se mettent pas sur la table trois fois par jour et ne permettent ni de se loger, ni de se chauffer, ni de se nourrir.

Vous ne proposez rien pour compenser cette inflation qui touche les plus modestes. En matière de logement, depuis six ans, vos gouvernements s'en sont tenus à bloquer les APL. La première augmentation depuis 2002 a seulement été faite en 2005, ne rattrapant même pas le retard accumulé pendant les trois années précédentes.

Vous vous accrochez désespérément à l'idée que l'enrichissement des plus nantis permet mécaniquement l'enrichissement de ceux qui ne le sont pas. C'est une vieille recette néolibérale qui n'a jamais fonctionné que dans l'esprit obtus des droites les plus conservatrices. Vous les incarnez aujourd'hui à merveille avec la politique menée par l'UMP depuis six ans sous la direction de votre leader, M. Sarkozy. Ces politiques fonctionnent d'autant moins aujourd'hui que les surplus financiers des plus riches alimentent directement la spéculation boursière internationale, beaucoup plus rentable que les investissements productifs, ainsi qu'un gaspillage de consommations de luxe, néfastes pour l'environnement et les ressources de notre planète.

Le décalage est énorme entre le luxe ostentatoire exhibé par certains, à commencer par le Président de la République, et le vécu du plus grand nombre de nos compatriotes.

Les députés Verts, communistes et républicains et des DOM-TOM du groupe de la Gauche démocrate et républicaine voteront contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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