Je défendrai ces trois amendements qui se succèdent mais je me contenterai de m'exprimer sur le premier.
Il porte sur un non-dit, ou plutôt sur la décision autoritaire de ne pas parler du nucléaire dans le Grenelle de l'environnement. Évidemment, je regrette cette situation car s'il y a une activité qui n'est pas écologique et qui présente de nombreux inconvénients, c'est bien le nucléaire.
Les risques d'accident, les problèmes de gestion à long terme des déchets de haute activité et à vie longue, le coût réel du kilowattheure actuellement notoirement sous-évalué ou les risques de prolifération, comme nous le montre depuis quelque temps l'actualité iranienne, sont autant de problèmes.
J'ajouterai un argument qui devrait emporter l'adhésion de tous. Pour qu'une société utilise massivement le nucléaire, comme c'est le cas en France qui en tire 80 % de son électricité, il lui faut trois qualités.
Il faut d'abord qu'elle soit technologique : le Zimbabwe ne produira pas de nucléaire parce qu'il ne dispose pas en nombre suffisant des écoles d'ingénieurs, des infrastructures et des techniciens nécessaires. Il faut ensuite que cette société soit démocratique ; c'est pourquoi nous avons beaucoup de réticences pour que le nucléaire même civil puisse s'installer en Iran. Il faut enfin que cette société soit stable.
En effet, la durée de vie d'un EPR est de soixante ans, mais il faut dix ans pour prendre une décision et le construire, et sans doute plusieurs décennies pour le démanteler. Lorsque vous construisez un seul réacteur EPR, nous en prenons pour un siècle ! À Flamanville et bientôt à Penly, selon le Président de la République, nous en prenons donc pour tout le XXIe siècle. C'est dément !
Il faut vraiment être atteint de naïveté anthropologique, et être un très mauvais historien pour parier ainsi sur la bonté humaine. En réalité, même en ce qui concerne la France et l'espace européen, rien ne garantit que les sociétés soient durant un siècle à la fois démocratiques, stables et technologiques. Il suffit de regarder un siècle en arrière et de constater combien l'Europe a pu se déchirer, par exemple entre 1914 et 1918, entre 1939 et 1945. Que serions-nous aujourd'hui si, à l'époque, le nucléaire avait existé ? Parier aujourd'hui, de façon angélique, que l'espèce humaine, dont nous connaissons bien, hélas, tous les défauts, pourra gérer le nucléaire pendant plus d'un siècle en s'organisant en sociétés qui resteraient stables, démocratiques et technologiques, c'est insensé au regard de l'histoire et de la raison.
Cet argument n'est ni technologique ni scientifique mais, bien au-delà de tous problèmes que pose le nucléaire, il montre que ce dernier ne peut constituer un choix de société valide – alors que les énergies renouvelables ne peuvent être détournées à des fins létales.