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Intervention de Patrick Braouezec

Réunion du 23 octobre 2007 à 9h30
Maîtrise de l'immigration intégration et asile — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Braouezec :

La violence contenue dans la plupart des articles de ces lois se manifeste tous les jours dans la vie des migrants qui en sont victimes. Le moindre interstice de liberté est scruté, analysé et aussitôt comblé par un autre article, qui vient renforcer l'arsenal répressif.

La vie des migrants est fracassée par cette violence institutionnelle. Qu'un membre de la famille soit détenu en centre de rétention ou expulsé suite à un contrôle, et c'est l'espoir d'une vie dans la sécurité et hors de la misère qui s'éloigne. L'horreur fuie là-bas resurgit ici.

Vous me permettrez de prendre un seul exemple, celui de Xing, que j'ai parrainée ici, le 2 octobre, lors d'un parrainage soutenu par plusieurs députés. M. Qiu, le père de cette enfant de douze ans, a été expulsé le 11 octobre, par un vol d'Air China en direction de Shanghai, alors qu'une décision de libération avait été prise par le préfet de police de Paris quelques heures avant le départ.

Qui était M. Qiu ? Une personne arrivée en France en 1999, il y a près de neuf ans, mais dont la demande d'asile avait été rejetée. Cet homme est pourtant resté ; il a appris le français, trouvé du travail et fait venir sa femme en 2002, puis sa fille en 2006, après la mort de sa mère. Cette dernière est scolarisée à Pantin, où elle s'est parfaitement intégrée au sein de la communauté scolaire et poursuit une bonne scolarité. Mais aujourd'hui, elle se retrouve sans son père, qui est en Chine, alors qu'il avait été demandé par les services qu'il demeure ici. Quand se reverront-ils et seront-ils enfin réunis ? Non seulement l'ordre d'annulation d'expulsion n'a pas été appliqué, mais ce sont ces lois, censées réguler l'immigration, qui imposent une séparation aussi brutale et un traitement aussi inhumain à une famille entière.

D'autres vies encore sont brisées, celles de citoyens européens expulsés manu militari. C'est ce qui s'est passé le 10 octobre à six heures du matin à Saint-Denis, quand la police a fait irruption dans un camps de Roms, où vit depuis plus de trois ans une communauté de quatre-vingts personnes. Elle était là pour procéder à une expulsion groupée, nouvelle procédure sur laquelle nous n'avons encore obtenu aucun détail.

Les familles, brutalement réveillées, se sont vu offrir un choix honteux à mes yeux : être embarquées par la police ou monter dans deux bus en partance immédiate pour la Roumanie.

Même si ces femmes et ces hommes ne peuvent satisfaire à l'obligation de revenus, sont-ils pour autant des criminels ? Avant toute chose, ils sont dans la précarité. Rappelons enfin que ce sont des citoyens européens. Là encore, cela rappelle des procédés inadmissibles ! Ces familles ont en commun d'avoir fuit la peur, le harcèlement, les menaces de mort, mais aussi la misère imposée aux pays en voie de développement.

Si des femmes et des hommes fuient leur pays, c'est parce qu'il existe des relations économiques, commerciales et financières, dont l'un des effets les plus graves est la violation massive des droits humains par le biais de la mise en place de politiques de démantèlement des compétences des pouvoirs publics. Ce sont des pays où la réduction radicale des dépenses publiques pour la santé, pour l'éducation, pour la culture, et pour d'autres domaines sensibles, est malheureusement un fait quotidien.

C'est la refondation substantielle de cet ordre international de la misère qui doit être visée, avec une politique de développement, notamment par l'apport de 0,7 % du PIB. Même si, effectivement, il y a des progrès dans ce domaine, on n'en est pas arrivé à ce 0,7 % destiné au développement des pays du Sud.

Force est de constater que cette politique de l'immigration choisie est contraire à l'ensemble des droits fondamentaux et humains.

Je terminerai en affirmant qu'un pays se juge par la façon dont il accueille ses étrangers. Alors, pour éviter que nous ne soyons montrés du doigt, notre groupe demande que le droit d'asile redevienne, dans les faits, un droit fondamental, que les droits de vivre en famille et de bénéficier du respect des liens privés soient reconnus et que toutes les restrictions au regroupement familial soient supprimées.

La Convention internationale des droits de l'enfant doit être prise en compte, afin que l'intérêt supérieur de l'enfant soit réellement la préoccupation essentielle dans toutes les décisions administratives ou judiciaires.

Le droit à la santé doit être garanti pour tous, Français ou étrangers, avec ou sans papiers.

Enfin, il est urgent que les pratiques policières, judiciaires et administratives soient respectueuses de la dignité et du droit de la personne.

C'est à ce prix qu'une politique de l'immigration doit être pensée et établie. Aujourd'hui, ce n'est pas la France qui est en danger : ce sont les migrants qui y sont en danger ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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