Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, m'exprimer devant vous aujourd'hui me permet de constater à quel point ce texte a pu être, en peu de temps, non seulement commenté, débattu, mais aussi enrichi. C'est à l'honneur du Parlement d'avoir été à l'origine d'échanges aussi constructifs et c'est, à travers eux, notre démocratie qui s'en trouve confortée.
Après quarante-cinq heures de débat parlementaire, ce projet de loi parvient à son point d'orgue. La commission mixte paritaire a adopté, la semaine dernière, un texte équilibré, qui a entièrement l'accord du Gouvernement.
Je remercie tout particulièrement le président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, M. Jean-Luc Warsmann, et celui de la commission des lois du Sénat, M. Jean-Jacques Hyest, ainsi que les deux rapporteurs, M. Thierry Mariani et M. François-Noël Buffet.
Le moment est donc venu de soumettre ce texte au vote de chacune des deux assemblées. Plus qu'un aboutissement, ce vote constituera une étape vers une meilleure maîtrise de l'immigration. La nouvelle loi permettra, en effet, de répondre à la double ambition du Président de la République et du Gouvernement d'être plus fermes à l'égard des immigrés qui ne respectent pas les lois de la République et, dans le même temps, plus protecteurs à l'égard de ceux qui respectent nos règles et nos valeurs. C'est ainsi que nous favoriserons l'intégration des immigrés légaux et que nous préserverons la cohésion de la communauté nationale.
J'observe, pour m'en réjouir, que les dix-huit articles du projet de loi que j'ai soumis au Parlement ont été adoptés, avec des améliorations, sans être dénaturés. Ils traduisent les engagements fondamentaux pris par le Président de la République devant les Français.
La première réforme nous donnera les moyens de mieux encadrer le regroupement familial. Désormais, les personnes souhaitant rejoindre la France dans ce cadre, tout comme les conjoints étrangers de Français, seront soumis dans leurs pays de résidence à une évaluation de leur degré de connaissance de la langue française et des valeurs de la République.
Cette réforme est le fruit d'une conviction très largement partagée à l'échelon européen. La langue est le meilleur vecteur d'intégration. Elle est la clef de l'accès à l'emploi, au logement, aux services publics et à une vie normale au sein du pays d'accueil. Notre idée est très simple et très claire : il ne faut pas attendre l'arrivée en France pour s'initier à la langue française.
À l'évidence, cette mesure est attendue par nos compatriotes, puisque selon une enquête d'opinion publiée le mois dernier, ils sont 74 % à l'approuver. Demander aux candidats à l'immigration familiale de passer un test de français et d'apprendre notre langue, c'est à la fois combattre le communautarisme et récompenser les efforts des étrangers qui souhaitent vraiment s'intégrer.
De même, l'étranger souhaitant faire venir sa famille dans notre pays devra prouver qu'il dispose de revenus adaptés à la taille de celle-ci. Sans revenir sur les explications fournies par le rapporteur, je rappelle qu'une telle mesure relève du bon sens : comment une famille étrangère de quatre enfants, arrivant en France et devant financer des dépenses liées à son installation, pourrait-elle se loger décemment et vivre dignement avec des revenus trop modestes ?
Enfin, nous renforçons le parcours d'intégration grâce à la création du contrat d'accueil et d'intégration pour la famille. Après avoir signé ce contrat avec l'État, les parents des enfants ayant bénéficié du regroupement familial recevront une formation sur les droits et devoirs des parents en France. Ils s'engageront notamment – j'insiste sur ce point, comme je l'avais fait en première lecture – à respecter l'obligation d'instruction. Ce faisant, ils renforceront les chances qu'auront leurs enfants de réussir leur intégration dans notre pays.
En second lieu, nous confortons les procédures d'examen des demandes d'asile, en respectant, comme par le passé, notre tradition d'accueil des réfugiés politiques, qui est l'honneur de la France. La formule du Préambule de la Constitution de 1946 – « Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d'asile sur les territoires de la République » – témoigne de l'attachement ancien, jamais démenti, de notre République pour le droit d'asile. Cette tradition, nous la respectons : 124 000 personnes bénéficient aujourd'hui, en France, du statut de réfugié politique.
La question de l'asile et celle de l'immigration sont distinctes et doivent le rester. Garanti par la convention de Genève, l'asile a sa finalité propre, qui doit être de protéger les personnes qui ne le sont plus par leur propre État. Il n'est pas et ne sera pas une variable d'ajustement de la politique d'immigration.
Dans cet esprit, le projet de loi tient compte de la nouvelle organisation gouvernementale, en me confiant très logiquement la tutelle de l'OFPRA, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; mais ce n'est pas moi qui, demain, déciderai si tel ou tel étranger doit être reconnu comme réfugié. L'OFPRA restera souverain dans ses décisions sur les cas individuels, sous le contrôle de la Commission de recours des réfugiés. Je me réjouis d'ailleurs que le débat parlementaire ait permis de renforcer l'indépendance de cette juridiction, qui devient la Cour nationale du droit d'asile.
Au-delà des dix-huit articles qui vous avaient été soumis, vous avez souhaité enrichir le projet de loi par un travail parlementaire d'une grande qualité, complétant le texte tout en respectant la cohérence de son architecture.
Le texte initial de dix-huit articles a été étoffé de près de cinquante articles. Le total en représente donc soixante-cinq. En tout, sur quatre cent soixante amendements discutés, cent cinquante ont été adoptés, sans préjuger de leur origine partisane. Sur tous les bancs, des idées ont entraîné l'adhésion. Ainsi, quarante et un amendements ont été adoptés à l'initiative de l'UMP, cinq à celle du Nouveau Centre, quinze à celle du groupe socialiste, quatre à celle des Verts et deux à celle des communistes.