J'ai un doute et une interrogation.
Si j'ai bien compris, et alors que vous avez tout misé sur Pôle emploi, il s'agit aujourd'hui d'essayer de faire mieux en demandant au préfet – à titre heureusement expérimental – de mobiliser les organismes privés de placement ! On imagine ce qui va se passer. Le préfet va réunir tout le monde et essayer de trouver quelques organismes – sur la qualité desquels on peut s'interroger – puis tout le monde va partir sur le terrain sabre au clair, à la recherche des offres d'emploi.
Le Gouvernement a déjà tenté quelque chose du même ordre avec le contrat d'autonomie. C'était le même principe, mais il y avait une sorte de contrat-type sur la base duquel on pouvait négocier avec des entreprises. Force est de constater que cela n'a pas marché ; cela a même été perçu sur le terrain, comme je l'ai souligné à plusieurs reprises, comme un signe de défiance à l'égard à la fois de Pôle emploi et, surtout – puisqu'il s'agissait des jeunes –, des missions locales. Dans un deuxième temps, ce n'est plus le préfet mais la Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle qui a convoqué tout le monde, en tapant du poing sur la table et en disant qu'il fallait que ça marche, sans quoi on changerait le préfet ! Même si l'intention de départ n'était pas mauvaise, on ne peut pas dire qu'on ait vu l'État dans ce qu'il a de meilleur...
Je suis donc réticent envers ce dispositif qui suscitera plus de pagaille que de réussite, en ce qu'il créera, sur le terrain, une sorte de dichotomie entre Pôle emploi et les missions locales, d'une part, qui essaient de faire leur travail même si ce n'est pas toujours parfait, et le préfet qui sera soumis à une obligation de résultats, d'autre part. Il y aura donc des mouvements de menton et des coups de poing sur la table – je m'arrêterai là pour ne pas me mettre à dos le corps préfectoral. (Sourires.) Je ne suis pas sûr que cela puisse fonctionner jusqu'au bout, et ce doute m'inciterait plutôt à ne pas suivre le rapporteur sur cet article, même si nous l'avons suivi sur les autres points.
J'en viens à mon interrogation. Est-ce que le dispositif ne rejoint pas l'idée, qu'on entend défendre ces temps-ci, d'utiliser les entreprises d'intérim, dont l'activité est en forte baisse – proche de 40 % – au détriment, d'ailleurs, des jeunes, qui en sont les premières victimes ? Mobiliser ces entreprises privées pour une mission publique est une idée que je ne rejette pas a priori, mais qui demande à être discutée. Nous aurions donc besoin d'explications sur ce point.
Face à la crise à laquelle nous sommes confrontés, il faut faire feu de tout bois, mais il ne faut pas pour autant lancer dans la précipitation des dispositifs qui causeront plus de désordre qu'ils n'apporteront de résultats.
Il s'ensuivra, en outre, une sorte de suspicion, comme celle à laquelle ont donné lieu les contrats d'autonomie. Les nouveaux partenaires qui découvrent le terrain se tourneront vers les municipalités pour leur expliquer qu'ils ont été missionnés et leur demander la mise à disposition d'un local ; si elles accèdent à cette demande, les partenaires plus « institutionnels » ne manqueront pas de le leur reprocher.
Je pense que nous pourrions faire l'économie d'un tel dispositif.
(L'amendement n° 105 n'est pas adopté.)
(Mme Danièle Hoffman-Rispal remplace M. Bernard Accoyer au fauteuil de la présidence.)