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Intervention de Michel Barnier

Réunion du 8 avril 2008 à 9h30
Questions orales sans débat — Maladie du vignoble gersois

Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche :

Madame Biémouret, vous appelez mon attention sur la situation très préoccupante des viticulteurs du Gers qui sont en effet confrontés à l'esca. Cette maladie, comme les autres maladies du bois de la vigne, conduit, au terme d'un processus pathologique, à la destruction totale du cep. Elle met donc en péril directement l'outil de production, sa longévité et compromet la viabilité de beaucoup d'exploitations.

J'ai bien entendu, et vous avez été leur porte-parole, le souhait des viticulteurs gersois de disposer d'un moyen de lutte efficace contre cette maladie.

Cependant, pour être tout à fait franc avec vous, l'hypothèse d'autoriser, même sous des conditions très restrictives, l'utilisation de l'arsénite de soude me paraît devoir être exclue.

En effet, la décision de retrait de l'arsénite de soude en France a été prise en 2001, comme vous le savez, à la suite d'une étude réalisée par la Mutualité sociale agricole et après avis scientifique de la Commission d'étude de la toxicité des produits anti-parasitaires concluant à un risque cancérigène inacceptable pour les manipulateurs de ce produit. Dans ces conditions, vous comprendrez aisément qu'il est hors de question pour moi d'exposer nos exploitants à un tel risque.

L'arsénite de soude a d'ailleurs été retiré en 2002 de la liste des substances actives inscrites au niveau européen, ce qui interdit l'autorisation au niveau national d'une préparation en contenant, même à titre temporaire, sauf à exposer la France à de lourdes sanctions communautaires.

Nous devons donc trouver d'autres moyens de lutte contre l'esca et nous y travaillons.

La difficulté avec l'esca réside dans la complexité de cette maladie qui met en jeu plusieurs souches de champignons. De ce fait, l'évaluation de l'efficacité des méthodes de lutte nécessite des expérimentations de très longue durée. Afin d'améliorer les connaissances en la matière, un observatoire national des maladies du bois a été mis en place en 2003 par le service de la protection des végétaux, particulièrement actif en région Midi-Pyrénées.

Je comprends l'impatience des viticulteurs, mais un programme national de recherche a également été engagé, impliquant notamment l'université de Poitiers et l'INRA de Bordeaux. Ce programme vise à améliorer les connaissances des champignons responsables de cette maladie, le développement d'outils de détection, l'étude des facteurs de développement et d'expression de la maladie et la recherche de méthodes nouvelles de lutte chimique.

Localement, l'Institut technique de la vigne et du vin et les chambres d'agriculture suivent ces travaux et en tirent des enseignements pratiques qu'ils diffusent auprès des viticulteurs.

L'ensemble de ces initiatives a permis de faire des progrès dans la connaissance de cette maladie. Ainsi, le fait que les parcelles les plus touchées par l'esca soient âgées de plus de quinze ans pose la question des évolutions des pratiques culturales ces vingt dernières années. La mécanisation du vignoble, la plantation de clones, la diminution de soins manuels aux ceps, le manque d'application des mesures prophylactiques pourraient être des facteurs aggravants.

A contrario, il est apparu qu'une rigoureuse application des mesures prophylactiques consistant notamment en l'élimination des souches ou parties de souches mortes permettrait de maîtriser la maladie. De même, un bon contrôle de la vigueur et une alimentation hydrique régulière contribueraient à améliorer la situation.

Comme vous le voyez, madame la députée, s'il n'y a pas aujourd'hui de solution pleinement satisfaisante contre l'esca, il existe toutefois des mesures qui peuvent aider à freiner ou à maîtriser son développement, et je peux vous assurer que les services du ministère de l'agriculture et de la pêche restent mobilisés aux côtés de la profession pour poursuivre, avec les instituts évoqués et notamment l'INRA, les travaux de recherche.

En outre, nous aurons toujours, dans le domaine de l'agriculture en général et de la viticulture en particulier, à gérer des crises et des aléas climatiques, sanitaires ou économiques. Dans le cadre du budget de la politique agricole commune, notamment du premier pilier, à l'occasion du bilan de santé de la PAC – sorte d'évaluation-adaptation – dont nous débattons en ce moment, je souhaite donc créer, en redistribuant une partie des soutiens financiers, un système permanent durable de protection des exploitations agricoles contre tous ces risques qui vont se multiplier. Je pense aux risques économiques qui touchent la filière du porc et la filière ovine, aux risques sanitaires – fièvre catarrhale ovine – ou climatiques comme le gel de printemps qui a touché la quasi-totalité de l'arboriculture de la vallée du Rhône à Pâques.

On ne peut laisser les entreprises agricoles aussi vulnérables face à ces risques, d'autant qu'elles peuvent être touchées par les trois à la fois ! Je souhaite donc que vous m'aidiez – je m'adresse à tous les députés –, dans le cadre de ce bilan de santé, à prendre les bonnes décisions pour mettre en place un système assurantiel de nature différente selon qu'il s'agit de risques sanitaires ou climatiques. Je vais proposer d'utiliser une partie des crédits de la PAC pour créer ces systèmes durables de mutualisation, de prévention afin de mettre à l'abri, autant que faire se pourra, les exploitations agricoles.

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