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Intervention de Jean-Jacques Urvoas

Réunion du 25 septembre 2007 à 21h45
Contrôleur général des lieux de privation de liberté — Article 10

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Urvoas :

Le texte n'apporte aucune garantie quant aux moyens dont disposera le Contrôleur général dans l'exercice de ses missions. Pourtant, l'article 18-3 du protocole de l'ONU stipule que les États membres s'engagent à financer les ressources nécessaires au fonctionnement des mécanismes nationaux de prévention.

Face à nos critiques sur les moyens que le Gouvernement souhaite accorder au Contrôleur général, vous nous opposerez la situation initiale de l'inspecteur en chef des prisons d'Angleterre en nous appelant à la patience. Vous allez sans doute nous rappeler, comme le fait M. Goujon à la page 30 de son rapport, que si actuellement l'inspecteur en chef anglais dispose de 41 collaborateurs et d'un budget de 5 millions d'euros, lors de sa création, en 1980, il n'était pas si richement doté et qu'en comparaison les 2,5 millions d'euros et les 18 Contrôleurs que vous prévoyez font presque de cette nouvelle institution une privilégiée.

Pourtant, alors même que l'inspecteur en chef des prisons d'Angleterre dispose de 41 collaborateurs et n'a que 139 établissements à contrôler, ses inspecteurs n'effectuent qu'un contrôle tous les trois ans dans les établissements pour mineurs et tous les cinq ans dans les autres prisons, selon un calendrier déterminé. Ils n'ont, en définitive, que peu de temps pour des visites inopinées. On peut donc en conclure que les moyens de l'inspecteur en chef anglais sont eux-mêmes insuffisants pour qu'il puisse assurer totalement sa mission. Que dire, alors, de notre futur Contrôleur général ? D'autant que le nombre actuel des lieux à contrôler va augmenter, ainsi que la garde des sceaux l'a souligné. Dans les deux années qui viennent, vingt-huit établissements sont en projet, ce qui représente 13 200 places supplémentaires.

N'oublions pas non plus que Jean-Paul Delevoye, le médiateur, prévoyait, pour exercer ces nouvelles missions, une équipe spécifique de trente personnes, capable d'effectuer jusqu'à 1 000 visites par an avec un budget de 3 millions d'euros. Certes, le budget prévisionnel du Contrôleur général est supérieur à celui du médiateur, qui reçoit 1,5 million et instruit tout de même plusieurs millions de demandes individuelles. Souvenons-nous cependant que la CNIL disposait pour 2006 d'un budget de 9 millions d'euros, mais que, le 21 novembre dernier, son président, Alex Türk, a dû alerter les pouvoirs publics sur sa situation budgétaire catastrophique, comparable selon lui à une cessation de paiement. Le trou était alors estimé à plusieurs centaines de milliers d'euros, et il a fallu que le Premier ministre accorde, le 4 décembre, une dotation rectificative de 300 000 euros à la CNIL pour qu'elle puisse boucler l'exercice comptable.

Compte tenu du champ de compétences étendu du Contrôleur général et de l'attente que sa mission suscite, nos craintes risquent très rapidement de se révéler fondées. Il ne sert à rien d'empiler les structures, surtout si l'on ne leur donne pas les moyens de leur ambition.

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