Tout le monde aura noté que nous acceptons de discuter de l'ensemble de ces amendements, qui traduisent pourtant des positions relativement différentes. Marisol Touraine a expliqué l'intérêt stratégique pour le Fonds de réserve pour les retraites, donc pour l'avenir des retraites, des propositions tout à fait raisonnables qui sont les nôtres.
Mon intervention portera sur la question des stock-options qui est au coeur de l'actualité, ici même d'ailleurs, puisque la commission des finances reçoit aujourd'hui les parties prenantes de l'affaire EADS. Cette question pose à l'évidence le problème de l'efficacité sociale de certaines rémunérations, ou détournements de rémunérations plus exactement, et, sur un plan général, celui de l'équité.
À l'évidence, il y a eu une dérive dans le mécanisme des stock-options. Au départ, celles-ci devaient permettre à celui qui lance une entreprise en forte croissance – une start-up, comme dirait Mme Lagarde – d'en garder la maîtrise par rapport aux investisseurs financiers. C'est d'ailleurs pourquoi nous ne souhaitons pas taxer les stock-options strictement comme des revenus du travail, ainsi que le proposent certains collègues. Nous avons estimé qu'il s'agissait d'un outil juste, équitable, efficace, permettant aux innovateurs de conserver la propriété de leur entreprise. Dans cette logique, nous pensons qu'il doit y avoir une taxation sur cette forme de rémunération, mais qu'elle n'est pas directement assimilable à une taxation du travail.
Cela dit, Roland Muzeau a rappelé comment avaient été distribués quelques-uns des plus gros paquets de stock-options, et l'on voit bien qu'il y a eu une dérive complète du système ! Comment justifier qu'un mécanisme qui a été créé pour des jeunes entrepreneurs innovants permette de rémunérer massivement des patrons d'industries du CAC 40 qui s'auto-attribuent, dans des conditions totalement opaques, des rémunérations exorbitantes ? On pourrait d'ailleurs sous-amender les amendements de Marisol Touraine pour taxer beaucoup plus les dirigeants de grandes entreprises. C'est d'ailleurs l'esprit des deux amendements que nous proposons. Il pourrait y avoir une super taxation, qui n'en resterait pas moins très raisonnable, pour les chefs d'entreprise qui s'attribuent des revenus exorbitants, contraires à la morale publique et dérogatoires à notre droit social.
Le Gouvernement fait sans cesse appel, parfois non sans raison, à l'équité, à la nécessité d'une harmonisation, d'une plus grande justice. Alors, expliquez-nous, monsieur le ministre, votre philosophie des stock-options ! Comment justifiez-vous qu'elles ne fassent pas l'objet d'une taxation réelle ? Je parle de taxation réelle, car M. Bur va nous proposer tout à l'heure une taxation purement symbolique, homéopathique, cosmétique, qui me fait penser aux indulgences papales ! Or, vous vous souvenez sans doute comment s'est terminé l'abus d'indulgences. La Réforme est arrivée brutalement, sans parler du saccage de Rome par les troupes de l'Empereur ! (Rires.) Nous n'en sommes pas là, mais l'abus d'indulgences n'est certainement pas une bonne façon de parvenir à l'équité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)